À PEINE une minute à la fin d'un discours-catalogue de plus d'une heure : c'est le temps limité qu'a choisi de réserver François Fillon à l'assurance-maladie, paradoxalement désignée comme «le plus urgent» des défis à relever. Sur ce sujet, les députés ont entendu des propos mesurés de la part du Premier ministre (lire ci-dessus) . Et aucune annonce sur des mesures structurelles à se mettre sous la dent.
Au PS, on condamne autant la forme que le contenu de l'intervention. Le député socialiste de l'Ardèche, Pascal Terrasse, secrétaire national du PS à la Santé, chargé de suivre particulièrement l'activité ministérielle de Roselyne Bachelot avenue de Ségur, se montre cinglant. «Ces quelques phrases de fin de discours sur l'assurance-maladie ne prennent absolument pas la mesure de la situation catastrophique actuelle des comptes sociaux, analyse-t-il. La réalité, c'est que l'on est proche du dépôt de bilan. Dès lors, j'ai trouvé François Fillon un peu court sur l'assurance-maladie…»
Pour le député, la validation par le gouvernement du plan de redressement de la Cnam relève du simple «colmatage» et signe «l'échec de la réforme de 2004».Or Pascal Terrasse n'a trouvé dans le discours de politique générale de François Fillon «aucune vision globale structurante de l'organisation et de l'offre de soins, ni réflexion sur les modes opératoires ou encore la réforme globale du financement». Et François Fillon n'aurait pas répondu à la question essentielle : «Comment on bouche» un déficit abyssal au-delà de mesures d'économies d'urgence. «J'ai trouvé beaucoup d'improvisation dans tout ça», juge Pascal Terrasse.
Le député affirme néanmoins que le PS ne se cantonnera pas dans un rôle stérile d'opposant et proposera le moment venu des mesures de financement alternatives comme la «contribution sur la valeur ajoutée des entreprises» ou le reversement de cotisations sociales par les entreprises qui bénéficient d'exonérations mais délocalisent quand même leur activité .
« Péage médical ».
Les socialistes ont-ils été rassurés par la « méthode » Fillon, qui semble laisser une large place au «débat» et à la concertation, qu'il s'agisse aussi bien des franchises médicales que de la TVA dite « sociale » ? Pas vraiment. «Sur la TVA, on a déjà entendu tout et son contraire, analyse Pascal Terrasse. La menace, en réalité, c'est une TVA qui n'aura rien de “social”, qui sera même “antisociale” avec des conséquences lourdes pour les assurés.» Quant aux franchises, le PS y voit, au-delà de l' «habillage» du discours, un «péage médical», même si François Fillon semble reprendre à son compte l'idée d'un «bouclier sanitaire» formulée par Martin Hirsch, haut commissaire aux Solidarités actives. Pour Claude Pigement, responsable national du PS à la Santé, ce fameux bouclier sanitaire, qui permettrait de plafonner ce que chacun paie pour sa santé en fonction de son revenu (par exemple de 3 à 5 % au maximum), est «une fausse bonne idée». «D'une part, on risque de construire une usine à gaz ou un Big Brother et, d'autre part, ce mécanisme découragera les classes moyennes ou supérieures qui voudront sortir de notre système d'assurance-maladie et on cassera le principe de la solidarité»,explique-t-il . Une position également défendue par Jean-Pierre Davant, président de la Mutualité française.
Le «débat sans a priori » réclamé par François Fillon promet déjà de belles empoignades.
> CYRILLE DUPUIS
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