LE PRONOSTIC du carcinome hépato-cellulaire (CHC) est mauvais, les patients ayant une survie de moins de 5 % à cinq ans. On ne peut raisonnablement espérer l’améliorer qu’en commençant le traitement (résection chirurgicale, greffe ou thérapies de type chimioembolisation) très tôt dans l’évolution de la tumeur. Soit au stade de petit CHC (moins de 3 cm de diamètre). Des chercheurs anglais et français ont évalué, chez près de 200 patients, une méthode diagnostique de bonne sensibilité qui pourrait permettre un dépistage de l’hépatome à ce stade (1). Elle repose sur l’analyse du protéome (2) par spectrométrie de masse de type SELDI-TOF (surface-enhanced laser désorption/ionisation time-of-flight).
Le dosage de l’alpha-foetoprotéine est de sensibilité trop faible pour permettre le diagnostic de la tumeur à un stade précoce. Le scanner abdominal a une meilleure sensibilité, mais son interprétation peut être problématique. Les chercheurs de l’université de Birmingham (centre de l’Angleterre) et de l’hôpital Jean-Verdier (Bondy) ont conduit une analyse sophistiquée du protéome sérique chez 182 patients ayant une cirrhose hépatique secondaire à une hépatite C, dont 77 présentaient un CHC. Les malades étaient répartis en deux groupes : un groupe d’étude (training set) avec 84 patients non cancéreux et 60 atteints de CHC, et un groupe « aveugle » (les examinateurs ne connaissant pas le statut CHC ou non CHC des malades) constitué par le reste des patients.
Spectrométrie de masse.
La méthode d’analyse de spectrométrie de masse SELDI-TOF, développée dans le groupe d’étude, a permis de reconnaître le statut CHC ou non CHC des patients du groupe aveugle avec une sensibilité de 94 % et une spécificité de 86 %. Les auteurs ont par ailleurs identifié deux pics de spectrométrie (23/23,5 kDa) qui étaient plus élevés, d’environ 50 %, dans le sérum des patients présentant un CHC (p < 0,001), par rapport aux patients non cancéreux. Ces pics correspondaient à des chaînes légères d’immunoglobulines kappa et lambda. Les auteurs espèrent donc parvenir, par cette méthode, à identifier une série de protéines qui pourraient être à la base d’un test de dépistage précoce de l’hépatome chez les sujets à haut risque. La spectrométrie de masse SELDI-TOF s’était déjà révélée prometteuse dans la recherche de marqueurs biologiques dans d’autres cancers (ovaire, prostate, sein et côlon).
«Nous avons montré que, en combinant la spectrométrie de masse SELDI-TOF et l’analyse informatique, déclare le Pr Philip Johnson (université de Birmingham), qui a dirigé ces travaux, il est possible de décoder le cancer du foie. Cette approche s’avère plus précise que les moyens de diagnostic actuels. Nous n’en sommes toutefois qu’aux prémices, et nous devons encore perfectionner notre technique.» Le Pr John Toy (de l’organisation britannique Cancer Research UK) souligne, en effet, qu’on est encore loin d’avoir établi que «l’existence d’une association entre certains profils protéiques et le cancer du foie puisse être exploitée de manière suffisamment fiable au titre du dépistage du CHC chez les sujets à haut risque».
(1) D.G. Ward, Y. Cheng, G. N’Kontchou, T.T. Thar, N. Barget, W. Wei, L.J. Billingham, A. Martin, M. Beaugrand, P.J. Johnson. Changes in the serum proteome associated with the development of hepatocellular carcinoma in hepatitis C-related cirrhosis. « British Journal of Cancer » (2006) 94 ; 287-292, publié en ligne.
(2) Ensemble des protéines exprimées du génome.
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