CELA FAIT bientôt trois ans que les Urml cherchent des solutions pour régler le problème du coût, pour les spécialistes libéraux à risque, de l’assurance en responsabilité civile médicale.
Avec l’appui de juristes, elles ont monté un groupe de travail, baptisé « Réconcilier droit et soin », qui propose un scénario offrant une issue à la crise. Le projet rendrait la charge de l’assurance «financièrement et moralement acceptable» pour les médecins. «L’actualité nous a rattrapés», constate le président de la Conférence des unions, le Dr Pierre Monod. Une semaine après l’annonce de la Macsf qui considère le risque obstétrical « inassurable » au regard de récentes décisions de justice (« le Quotidien » du 27 janvier), les présidents d’Urml en profitent donc pour remettre leur projet sur la table, en espérant attirer l’attention des pouvoirs publics.
La proposition des unions repose sur trois volets : une indemnisation automatique et complète des patients sans mise en cause judiciaire des praticiens, sauf faute inexcusable ou intentionnelle ; une répartition équitable des indemnisations « obstétriques » entre solidarité nationale et médecins ; et une prévention des accidents en maintenant un haut niveau de responsabilité pour les praticiens.
Une deuxième branche à l’Oniam.
Concrètement, le groupe inter Urml propose de distinguer deux niveaux d’assurance civile médicale, selon la nature de la faute.
Seules les fautes médicales inexcusables ou intentionnelles resteraient à la charge du praticien et seraient couvertes par les assureurs privés habituels (Macsf, AXA, etc.). En revanche, la responsabilité de toutes les autres fautes médicales – hors aléas thérapeutiques et infections nosocomiales, pris en charge par l’Oniam – serait transférée sur une nouvelle structure. Les Urml proposent à ce titre de créer une deuxième branche à l’Oniam.
Il s’agirait, expliquent les unions, d’une «assurance professionnelle cogérée et financée par les médecins, l’assurance-maladie et les assurés sociaux».
L’ensemble des praticiens libéraux abonderaient ce nouveau fond ; leur cotisation, fondée sur un système de bonus et de malus, serait individualisée en fonction de la nature de leur activité, à risque ou non. L’assurance-maladie apporterait aussi sa contribution, récupérée sur l’aide actuellement versée aux spécialistes pour qu’ils s’assurent.
Rétablir la confiance.
Cette piste de travail présente un avantage certain pour les médecins : elle permettrait de réduire leur prime en RC médicale. «Il faut arriver à ne pas payer plus de 5000euros», résume le Dr Jean Marty, du Syngof.
«Avec cette démarche, expose le Dr Pierre Monod, les médecins n’essayent pas de s’exonérer de leurs responsabilités. Au contraire. C’est parce que l’Etat n’a pas traité le problème que nous nous retrouvons dans une situation de défiance vis-à-vis de nos patients. Le but, c’est donc de rétablir la confiance médecin-malade.»
En clair, il s’agit de «concilier l’indemnisation automatique des victimes et la responsabilisation du professionnel», précise Rémi Pellet, un avocat qui a apporté son expertise au montage du projet « Réconcilier droit et soin ».
Le Dr Jacques Caton, qui préside à la fois le Syndicat national des chirurgiens orthopédistes et l’Urml Rhône-Alpes, insiste de son côté sur la nécessité, en parallèle, de développer la gestion des risques. «Il faut collecter toutes les déclarations, y compris celles d’événements indésirables non graves, et développer les actions de prévention, de formation et d’évaluation», déclare le chirurgien. «D’ailleurs, enchaîne le Dr Marty, nous sommes prêts à accepter que l’accréditation soit obligatoire.»
Le projet inter Urml a-t-il des chances d’être adopté ? Les assureurs, qui ont à y perdre une bonne partie de leurs cotisations, feront peut-être barrage.
Car les compagnies d’assurances ont une autre idée en tête : l’écrêtement de l’indemnisation des sinistres, qui ferait jouer la solidarité nationale ( via l’Oniam) au-delà d’un certain plafond d’indemnisation. Mais ce mécanisme ne permettrait pas de réduire la fréquence des réclamations et des plaintes, déplorent les Urml. «Notre solution a l’air assez consensuelle car elle ne remet pas en cause le droit des patients à être indemnisés», note Rémi Pellet, l’avocat.
Les présidents d’Urml se disent prêts à présenter leur projet aux pouvoirs publics ; ne reste plus que le montage financier à affiner, et notamment la part incombant à l’assurance-maladie, pour abonder la deuxième branche de l’Oniam.
* Oniam, Office national d’indemnisation des accidents médicaux.
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