LE PROJET de loi, qui comprend des dispositions sur l’adoption par un couple homosexuel sera présenté le 24 octobre au Conseil des ministres. Mme Taubira est allée vite, prenant de court ceux de ses collègues qui ont voix au chapitre, de la même manière qu’elle a aboli le durcissement des procédures judiciaires contre les mineurs délinquants adopté par la précédente majorité. Il y a déjà eu un mariage homosexuel à Bègles, dont le maire est Noël Mamère. Il a été défait par la justice puisqu’il était illégal. Interrogé lundi par Europe 1, le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a dit qu’il a reçu plusieurs demandes de mariage homosexuel, tout en déplorant les propos du cardinal.
Aucune Église n’est prête à reconnaitre le mariage homosexuel. Le débat ne concerne donc que le mariage civil. Lequel a été complété par le PACS. Les homosexuels peuvent déjà bénéficier d’une reconnaissance officielle par l’État de leur situation matrimoniale. Ils ne se battent plus pour la protection sociale du conjoint, par exemple en cas de décès et d’héritage, ils l’ont déjà. Ce qu’ils veulent désormais, c’est qu’il n’y ait plus aucune différence d’ordre fiscal, social, civil ou même symbolique entre eux et les hétérosexuels. Ils veulent le même mariage pour tous.
Bénéfices incertains.
Cette demande est parfaitement recevable. Cela fait des décennies que l’homosexualité est considérée par la société comme le choix souverain de sa sexualité par une personne parfaitement normale. Les hétéros respectent donc les homos, à part les cas d’intolérance agressive auxquels nous nous sommes habitués tout en les combattant. Il n’y a plus aucune raison d’établir une différence entre les uns et les autres. Il n’empêche que l’aspiration des gays et des lesbiennes au mariage s’exprime alors que l’institution a perdu son caractère sacré depuis au moins un demi-siècle. Le mariage civil n’est plus, comme celui de l’Église, un engagement pour la vie. Il s’interrompt, parfois tôt, parfois tard. Dans les grandes villes de France, un mariage sur deux aboutit à un divorce. Pourquoi ? Parce que les valeurs ont été inversées : autrefois, tout, la lassitude, le désir de changement, la perte d’un emploi, l’usure de l’amour, restait soumis aux liens inaltérables du pacte unissant un homme et une femme. Aujourd’hui, c’est le contraire : quand on a un problème sentimental, professionnel ou autre, on commence par sacrifier le mariage, tout en assumant les conséquences de la séparation, depuis la pension alimentaire jusqu’aux familles recomposées.
Les homosexuels demandent donc un droit dont les bénéfices sont plus qu’incertains. Et, en vérité, c’est le mariage qu’il faudrait abolir, puisqu’il ne dure pas toujours et c’est le PACS, instrument économique et fiscal, qu’il faudrait universaliser. L’avantage serait énorme. L’État, en effet, a fait du mariage un domaine où il est omniprésent alors que le mariage relève directement de l’amour et de l’intimité personnelle. On ne se marie plus, en tout cas pas toujours, pour fusionner avec l’être aimé, mais à cause des allocations familiales, des déductions fiscales, et, sans qu’on le sache, pour servir la politique nataliste de l’État, qui doit renouveler les générations pour le financement des retraites, mais ne sait pas forcément donner un emploi à chacun des jeunes qui se présentent sur le marché du travail. Pourquoi les Français ont-ils tous un livret de famille ? Parce que l’État garde la trace des grands-parents, des parents, des enfants, des petits-enfants, d’une ligne généalogique qui a un intérêt à la foi sécuritaire et économique. Il encourage les naissances par les allocations familiales, il facilite la formation de familles nombreuses ou de deux enfants au moins par un réseau serré de crèches et d’écoles. Il a pris possession, sans que les familles en soient conscientes, de la vie privée des couples, dont les choix ne dépendent plus de l’amour ou du désir d’enfant, mais du contexte social où s’expriment des sentiments pourtant personnels.
Bien entendu, on ne se dressera pas contre la politique nataliste de l’État, ni contre les avantages qu’il accorde à des couples qui ont besoin de son aide. Il reste que la liberté de divorcer est de même nature que la liberté des homosexuels d’avoir un vrai mariage, et que la recomposition d’une famille est du même ordre que l’adoption.
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