Avant de considérer ce résultat comme alarmant, et de craindre une contamination humaine par la consommation de viande provenant d'animaux infectés, différents paramètres de pondération doivent être considérés. D'abord, l'efficacité avec laquelle le prion s'accumule peut varier entre les différentes espèces animales et selon la souche de prion. Ce qui est vrai chez la souris de laboratoire peut être faux chez l'homme. Ensuite, la transmission par voie orale est inefficace quand on la compare à celle par voie intramusculaire, ce qui a été l'une des méthodes de l'étude (chez les hamsters, l'exposition orale est 10 puissance 5 fois moins efficace qu'en intramusculaire).
De nombreux paramètres de pondération
Enfin, il ne faut pas oublier les notions de barrière d'espèce. Dans de nombreux cas, on s'est aperçu que, pour être efficace d'une espèce à l'autre, la transmission de prion doit se faire avec des souches comportant un haut degré d'homologie dans les séquences d'acides aminés.
Dans le cas du prion cause du nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob (nvMCJ), on s'est aperçu que les souris qui expriment les prions bovins ont une plus grande susceptibilité pour le nvMCJ provenant de cerveau humain que les souris qui expriment des prions humains ou chimériques humains-murins.
La nouvelle étude, publiée par Patrick J. Bosque et coll. (San Francisco, University of California), démontre globalement que le muscle squelettique de souris est intrinsèquement capable de propager le prion. Des titres substantiels de ces pathogènes peuvent s'y accumuler.
Les résultats ont été obtenus d'abord en inoculant des souris sauvages par deux variétés de prions pathogènes PrPsc murins (une souche dite Me7 et la souche de laboratoire dite de « Rocky Mountains »). Ce qui a montré que les muscles squelettiques accumulent des taux différents de prion, les plus élevés se trouvant dans les muscles des pattes arrières.
On a voulu savoir si les prions étaient produits localement ou bien subissaient simplement un phénomène d'accumulation.
Aussi,les scientifiques ont-ils mis au point une souris transgénique pouvant exprimer la protéine prion PrP normale du hamster ou celle de la souris.
L'inoculation de ces souris par voie intramusculaire a résulté en une formation de hauts titrages de prions dans le muscle. A l'inverse, l'inoculation par des prions ciblant l'hépatocyte a produit des titrages bas au niveau musculaire.
« Notre travail démontre qu'il existe des facteurs supplémentaires à la seule présence du prion exprimé, qui interviennent pour déterminer le tropisme des prions vers certains tissus ».
Cette étude rapporte pour la première fois un résultat de la sorte. Les travaux antérieurs font plutôt état de titrages bas de prions dans les tissus musculaires. « Il est possible que nos résultats révèlent une faille des travaux habituels », font remarquer les auteurs. Les prélèvements ne sont peut être pas faits au niveau des muscles les plus atteints.
Bovins, moutons, daims, élans
Mais il est aussi possible que, comme on l'a vu plus haut, d'autres paramètres interviennent et notamment une « protéine X » qui déterminerait le tropisme du prion.
Quoi qu'il en soit, il est important, devant l'ensemble de ces résultats contrastés et pour être mieux fixés sur un risque chez l'homme, de déterminer ce qui se passe de manière habituelle dans les situations réelles de pathogénicité. « On doit établir si le prion s'accumule dans les muscles squelettiques des bovins présentant une encéphalopathie spongiforme, dans celui des moutons ayant une tremblante, ou bien aussi chez les daims et les élans que l'on sait présenter des maladie analogues. »
« Proc Natl Acad Sci USA », 19 mars 2002, vol. 99, n° 6, pp. 3812-3817.
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