Le Pr Israël Nisand « appelle solennellement tous les échographistes de France à arrêter, à compter du 1er janvier 2002, l'échographie morphologique »*. Pour le gynécologue-obstétricien, elle est « devenue impraticable ».
C'est l'arrêt de la Cour de cassation du 28 novembre qui conduit le praticien strasbourgeois à se mettre en travers du chemin de la justice.
La Haute Juridiction a accordé à un enfant trisomique une réparation « intégrale » du préjudice causé par son handicap, parce qu'il n'avait pas été signalé par le médecin qui avait connaissance, lors de la grossesse de la mère, de certains « signes alarmants » (« le Quotidien » du 30 novembre).
« Notre spécialité est condamnée, désormais, à court terme,par l'incurie de magistrats dont l'attitude n'est plus imputable à une sous-estimation des problèmes que pose l'obligation de résultats en échographie foetale, commente le spécialiste . Il s'agit d'un choix délibéré, mais politiquement correct, où l'on recherche dans l'assurance d'une profession réputée solvable les moyens que notre société refuse de donner à ses handicapés. » Aussi lance-t-il un appel, non à la grève, mais « à la prise de conscience par la profession de l'impossibilité de travailler quand elle est rendue responsable de la pathologie de ses patients. Que feraient les cancérologues s'ils étaient tenus pour responsables de la survenue de cancers ? Ils arrêteraient en attendant des jours meilleurs. Ne pas agir maintenant serait une erreur collective de notre part, prévient le praticien. Aucun de nous n'a la possibilité d'agir isolément. La cohésion est la clé d'une telle démarche », insiste-t-il auprès du « Quotidien ». Elle prendra fin si « le gouvernement ajoute, sous la pression des femmes (qui sont notre dernier espoir), dans la loi de la France que "nul n'est fondé de se plaindre du fait de sa naissance" ».
Oui à l'indemnisation
d'une erreur médicale
Cela étant, le Pr Israël Nisand dit « oui » à l'indemnisation « des parents à la suite d'une erreur médicale ». C'est « même très bien,ce qui n'a pas été malheureusement le cas dans l'affaire Perruche », souligne-t-il. « Que la société les aide, par tous les moyens disponibles, à assumer le poids de cet enfant gravement handicapé, oui toujours.» Et « si le but des magistrats et de la société est d'indemniser, faisons-le et faisons-le bien, sans changer le corps humain en produit à valeur marchande, remboursable quand, par malchance, il est défectueux. Chaque fois que notre société fait un pas dans les sens de la réification de l'être humain, elle devrait trouver sur son chemin des médecins pour dire non », conclut le gynécologue-obstétricien.
Le Pr Israël Nisand est l'auteur d'un rapport sur les difficultés rencontrées par les femmes conduites à avorter. Le document a été remis à Martine Aubry au printemps 1999. Il avait provoqué alors l'ire du Planning familial et de l'Association nationale des centres d'interruption de grossesse et de contraception, parce que l'auteur estimait qu'on s'exposait « à une médecine eugénique » avec un « allongement systématique du délai légal d'IVG » de 10 à 12 semaines de gestation.
Par la suite, le Pr Nisand précisera (« le Quotidien » du 12 septembre 2000) : « Je suis favorable à l'accompagnement des interruptions hors délai, compte tenu du problème de santé publique posé par les femmes allant à l'étranger. » Et ce dans le cadre de « l'interruption médicale de grossesse. La loi (en vigueur à l'époque, NDLR) l'autorise, quel que soit l'état d'avancement de la gestation, pour des motifs maternels ou en cas de malformations ftales ».
* Cet appel est notamment diffusé sur le site Medito (www.medito.com).
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