En qualité de directeur général de la Santé, quelle attention portez-vous aux différentes pistes de recherche susceptibles de connaître des applications contre le bioterrorisme ?
Pr LUCIEN ABENHAIM
A la direction générale de la Santé, nous nous intéressons bien sûr beaucoup à tout ce qui présente une probabilité de résultat dans un délai raisonnable. Il ne s'agit donc pas de recherche à proprement parler, mais plutôt de développement.
Je suis en relation régulière, dans ce cadre, avec des chercheurs de l'Institut Pasteur et de l'INSERM, autour de grandes questions comme les vaccins, les antidotes ou les tests de détection pour la contamination du milieu.
La capacité de détection rapide dans l'eau des toxines botuliques ou dans l'air de certains agents biologiques ou chimiques est aussi un enjeu majeur.
Si on prend une échelle de temps, ce qui est le plus proche d'applications, c'est le développement de nouvelles formes de vaccins antivarioliques toujours fondés sur la vaccine mais développés non plus sur l'animal mais sur cultures cellulaires ; c'est aussi la production de toxines antibotuliques ou le développement d'un certain nombre de tests dans les milieux.
A une échéance un peu plus lointaine, plutôt dans le domaine de la recherche-développement, Pasteur a présenté une piste assez avancée pour le vaccin contre le charbon ; une piste de génie génétique contre la variole semble également prometteuse, qui permettrait d'élaborer le vaccin sans avoir à passer par la vaccine ; d'autres pistes sont explorées sur les anticorps botuliques ou sur la peste.
Bernard Kouchner l'a annoncé la semaine dernière, un groupe de recherche-développement consacré aux nouveaux vaccins et médicaments va d'ailleurs être créé à l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé).
Des domaines qui avaient cessé d'être prioritaires le redeviennent. C'est une nouvelle preuve qu'en matière de recherche on ne sait jamais ce qui sera utile et ce qui ne le sera pas. Il y a trois mois, le charbon n'intéressait que les vétérinaires et il était question de détruire les derniers stocks de virus de variole ! Aujourd'hui, la recherche doit être capable de se réorganiser par rapport aux nouvelles priorités.
Lorsqu'on entre dans la phase de développement et de production, il est possible de partager les travaux des laboratoires et des décisions de coordination peuvent et doivent être prises qui nécessitent, en effet, une coopération internationale. Pour la recherche, je continue cependant à penser que ce sont toujours les meilleurs qui produiront. Quand tel laboratoire est nettement en pointe dans un domaine, qu'il poursuit des pistes où il est capable d'arriver à des résultats relativement rapidement, c'est naturellement lui qu'il convient d'aider financièrement, plus qu'un autre. Le saupoudrage, en l'occurrence, n'est pas la bonne méthode. Il va nous falloir réfléchir rapidement aux besoins budgétaires appropriés.
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