EN CRÈTE, les habitudes alimentaires changent. Le régime tend à s'occidentaliser. Mais dans les régions rurales, l'alimentation reste proche du prototype du régime méditerranéen. Dans ces régions, l'atopie est présente chez les enfants à un niveau intermédiaire. Les atteintes allergiques respiratoires (sifflements bronchiques, rhinites) sont rares.
Fruits, légumes, pain, oléagineux, huile d'olive.
Les enfants crétois consomment des fruits et des légumes produits localement en grandes quantités. La plupart d'entre eux sont nourris par le traditionnel « régime méditerranéen », qui se caractérise par une prise accrue des aliments d'origine végétale, du pain, des céréales et des fruits oléagineux (noix, amandes, pistaches...). Tous sont des sources d'antioxydants.
La principale source de corps gras ajoutés est l'huile d'olive, elle aussi pourvoyeuse d'antioxydants (oleuropéine, hydroxytyrosol et autres polyphénols).
L'enquête a été menée chez 690 enfants âgés de 7 à 18 ans en région rurale. Les parents ont rempli deux questionnaires. L'un comportait 58 items permettant de décrire le régime de leurs enfants, en particulier pour voir dans quelle mesure ils mangent conformément au régime méditerranéen. Un autre pour évaluer les symptômes respiratoires et allergiques.
Les enfants ont eu un prick-test avec 10 allergènes aéroportés courants.
Les résultats montrent que 80 % des enfants mangent des fruits frais et 68 % des légumes au moins deux fois par jour. La plupart adhèrent de manière modérée à élevée au régime méditerranéen.
On constate qu'il n'y a pas de lien significatif entre la fréquence de l'atopie et la consommation de raisins, d'oranges, de pommes et de tomates fraîches (la tomate est l'un des principaux produits locaux de Crète).
Mais on trouve une association négative entre tous ces fruits et légumes et la fréquence des rhinites allergiques et des sifflements bronchiques. Cet effet protecteur contre les équivalents d'asthme se traduit ainsi : chez les enfants ayant une adhésion élevée au régime méditerranéen, la rhinite allergique est significativement plus rare (odds ratio de 0,34). La protection est plus modeste pour les sifflements bronchiques et l'atopie.
Manger des fruits oléagineux réduit le risque des sifflements et des allergies (OR de 0,46).
La consommation de margarine, en revanche, augmente le risque à la fois des sifflements (OR de 2,19) et de la rhinite allergique (OR de 2,10).
Ces résultats concordent avec ceux des études épidémiologiques antérieures sur l'effet protecteur des agrumes, des pommes et des tomates contre la rhinite allergique et l'asthme.
Cependant, un effet protecteur du raisin n'avait pas été rapporté jusqu'ici.
Les auteurs attribuent au contenu antioxydant de la diète méditerranéenne son effet protecteur contre l'allergie.
La peau du raisin noir.
On sait que les extraits de la peau du raisin noir contiennent une combinaison de polyphénols à la fois bioflavonoïdes (quercétine, catéchines, flavonols et proanthocyanidines) et non bioflavonoïdes (dérivés des acides cinnamique et benzoïque).
Les proanthocyanidines sont antioxydantes, avec une activité anti-inflammatoire, qui provient de la lutte contre les radicaux libres, la peroxydation des lipides et de l'inhibition de la formation des cytokines inflammatoires.
«Il est possible que l'effet bénéfique des raisins contre l'allergie soit dû à l'action antioxydantes de leur contenu phénolique, qui a été démontré (inhibition de la NO-synthase par le resvératrol) .»
La margarine, pour sa part, est riche en acides gras oméga 6, tels que l'acide linoléique, dont le métabolisme conduit à la formation d'acide arachidonique, puis de prostaglandine E (pro-inflammatoire).
Les bronches en développement pendant l'enfance seraient particulièrement vulnérables au stress oxydatif, postulent les auteurs. Un statut insuffisant en antioxydants au cours de périodes critiques peut produire des dommages des voies aériennes et une réduction de la compliance bronchique. Ce qui donne une explication de l'effet protecteur par les fruits et des légumes que l'on a observé.
Leda Chatzi et coll. « Thorax », édition en ligne avancée.
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