REFERENCE
Larve de mouche noire et velue
L'agent pathogène est une larve de mouche noire et velue dont les deux espèces les plus connues sont Hypoderma bovis et Hypoderma lineatus. Ces mouches prolifèrent l'été dans les prairies ensoleillées lorsque la température est supérieure à 18 °C.
L'insecte a une vie très éphémère, de 2 à 3 jours. Après accouplement, les ufs sont pondus sur les poils des bovins. De l'uf sort une petite larve qui migre le long du poil et pénètre activement dans la peau où elle va se développer pendant environ dix mois, jusqu'au printemps suivant. Certains auteurs pensent que la pénétration de la larve peut être digestive. Ces larves évoluent en trois stades pour aboutir aux « varons blancs », qui survivent dans un petit furoncle cutané perforé d'un pertuis respiratoire.
A maturation, elles mesurent 3 cm et tombent à terre où elles subissent une quatrième mue pour donner l'insecte adulte au bout de quatre semaines environ, vers le mois de juin. Dans les infestations massives, on peut retrouver jusqu'à 300 varons par bovin.
Mortelle chez le cheval
Cette parasitose prédomine chez les jeunes bovins car il y a une probable prémunition qui s'installe. D'évolution bénigne chez les bovidés, il n'en est pas de même chez le cheval chez lequel la migration erratique vers le cerveau peut être mortelle.
Tête et la partie supérieure du corps
Chez l'homme, la contamination peut se faire directement par dépôt des oeufs par les mouches sur les cheveux ou les poils ou par contact animal-homme, ou éventuellement par ingestion de lait contaminé. La larve pénètre activement dans la peau mais l'adaptation hôte-parasite est mauvaise et la larve va le plus souvent mourir en impasse parasitaire. L'évolution donne une larve immature. Les zones de prédilection de ces larves sont la tête et la partie supérieure du corps. Ces larves ont une richesse importante en enzymes qui leur permet une migration aisée et qui est responsable du fort pouvoir immunogène, entraînant à terme une résistance à l'hypodermose.
Le plan « varon » en France
Très fréquente en France (plus de 40 % du cheptel bovin contaminé) jusqu'à l'application du plan « varon » en 1988, la vigilance demeure avec le programme national de lutte qui permet une prévalence d'infestation inférieure à 5 % sur l'ensemble du territoire.
De septembre à avril
Chez l'homme, la contamination étant estivale, les manifestations cliniques apparaissent entre septembre et avril. Il s'agit le plus souvent d'une maladie de l'enfant mâle vivant en milieu rural. Sur le plan clinique, un syndrome immuno-allergique avec fébricule, urticaire, asthénie, nausées peut se rencontrer lors de la phase de migration larvaire.
Signes cutanés et couleurs
Les signes cutanés sont :
- des oedèmes fugaces et migrateurs indolores préférentiellement au niveau de la tête ou de la partie supérieure du thorax, parfois précédés d'un érythème et laissant derrière eux une zone ecchymotique ;
- un furoncle non inflammatoire apparaissant de manière inconstante 3 mois environ après les dèmes. Il succède à une papule qui s'ouvre, laissant apparaître un pseudo-bourbillon au sein duquel émerge l'extrémité postérieure de la larve blanchâtre vivante.
Les manifestations douloureuses précèdent souvent les signes cutanés à type de myalgies et d'arthralgies.
Complications rares mais sévères
Les complications sont rares mais sévères du fait du neuro-tropisme préférentiel de ces larves.
Complications neuro-méningées :
- la méningite à éosinophiles est la plus fréquente. Elle se présente sous forme d'un syndrome méningé fébrile (39-40 °C) contemporain des signes cutanés. L'évolution est fugace, s'améliorant en 48 heures, mais il peut exister des récurrences avec un intervalle libre de 7 à 10 jours pendant plusieurs semaines. L'examen cytologique du LCR montre une pléiocytose (> 1 000 éléments/mm3) avec plus de 50 % d'éosinophiles. Une hyperéosinophilie sanguine est retrouvée supérieure à 500/mm3 ;
- d'autres complications neurologiques centrales ont été décrites : hypertension intracrânienne secondaire à l'obstruction du trou de Monroe par une larve, déficits moteurs transitoires, convulsions, ataxie cérébelleuse. Plusieurs travaux anatomopathologiques ont mis en évidence des larves dans le système nerveux central.
L'évolution est quasiment toujours favorable sans séquelles.
Complications - l'ophtalmomyiase externe, conséquence du dépôt d'ufs dans les culs de sac conjonctivaux responsables de lésions palpébrales, se traduit par une photophobie et un larmoiement. On découvre les larves sur la conjonctive. Leur extraction est facile à la curette ;
- l'ophtalmomyiase intra-oculaire est beaucoup plus préoccupante, le pronostic visuel étant en jeu. Elle peut être antérieure (60 %) et le plus souvent monoculaire. Le tableau clinique est celui d'une uvéite antérieure avec baisse de l'acuité visuelle. L'examen oculaire peut retrouver un hypopion et des synéchies irido-cristalliniennes. L'extraction de la larve est impérative mais n'est pas toujours suffisante pour préserver la fonction.
L'ophtalmomyiase postérieure entraîne une panuvéite sévère avec décollement de la rétine mimant parfois un pseudo-gliome, le diagnostic étiologique n'étant alors parfois fait qu'après énucléation. Le pronostic fonctionnel est toujours sombre.
Les autres complications viscérales sont exceptionnelles.
Diagnostic
Le diagnostic de certitude ne peut être posé que par l'examen parasitologique de la larve. Cependant, l'âge du malade, son sexe, l'anamnèse et l'origine géographique, la date d'apparition des signes, la présence d'une hyper-éosinophilie sanguine doivent orienter le praticien. Le diagnostic sérologique parfois précieux utilise l'immunoprécipitation, l'ELISA n'est utilisé qu'en médecine vétérinaire.
Traitement
- Le traitement de l'hypodermose cutanée non compliquée est purement symptomatique (antihistaminique et antalgique). Il n'y a pas d'effet prouvé des antiparasitaires bien que l'ivermectine soit très efficace chez l'animal.
- Les formes ophtalmologiques relèvent d'une chirurgie délicate d'exérèse de la larve ou de photocoagulation au laser.
- La prophylaxie est vétérinaire.
Y penser
Le médecin doit savoir penser à cette anthropozoonose touchant surtout l'enfant vivant en zone rurale. C'est une affection peu fréquente et bénigne sauf dans sa localisation oculaire.
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