Une dermatose qui peut rester unique ou récidiver

Le point sur l'herpès cutanéo-muqueux

Publié le 05/02/2004
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HSV1 et HSV2

Dermatose cutanéo-muqueuse provoquée par les virus de l'Herpès simplex de type I (HSV1) ou II (HSV2). Ces virus à ADN appartiennent au groupe Herpes viridae de même que le virus Epstein-Barr, varicelle zona et le cytomégalovirus.

Epidémiologie

Très contagieux et de transmission interhumaine par contact direct, le virus touche la quasi-totalité de la population. L'infection passe inaperçue dans 90 % des cas et laisse une immunité (sérologie positive).

Pathogénie

Lors d'un premier contact (primo-infection), le virus pénètre dans l'épiderme puis le derme et commence sa réplication. Il migre ensuite vers les corps cellulaires des ganglions spinaux sensitifs où il va subsister. Lors d'une récidive à la suite d'une irritation, le virus effectue une migration inverse pour retourner vers le site cutanéo-muqueux initial. Les deux types viraux peuvent être indifféremment à l'origine de lésions buccales ou génitales.

Clinique

Après une incubation de six à huit jours, la primo-infection peut réaliser un tableau clinique différent selon la localisation. A la suite de prodromes à type de picotements, de brûlures, de prurit apparaît l'éruption caractéristique, faite de petites vésicules groupées en bouquet, sur une base inflammatoire. En huit à quinze jours, les vésicules se dessèchent, les croûtes tombent spontanément sans laisser de cicatrice (exceptionnelle).
- L'atteinte orofaciale peut être bruyante, réalisant une gingivo-stomatite aiguë érosive de la muqueuse buccale (lèvres, joues, langue) s'étendant à la peau avec œdème variable et présence d'un ganglion lymphatique satellite. L'haleine est fétide, l'état général altéré. La présence d'hémorragies muqueuses avec érosion hyperalgique et croûtes rend l'alimentation souvent impossible.
- L'atteinte génitale sévère de la primo-infection réalise un tableau similaire avec vulvovaginite œdémateuse aiguë hémorragique, souvent nécrotique, hyperalgique ou une balanite aiguë érosive, avec présence d'adénopathies inguinales bilatérales douloureuses. Il existe une rétention urinaire réflexe en raison du caractère douloureux des mictions avec fièvre et céphalées. L'atteinte du col utérin s'observe dans 80 % des cas. La guérison spontanée est obtenue en trois semaines.

Ailleurs

L'herpès peut siéger sur n'importe quelle partie du tégument. Sur le cuir chevelu, les pommettes, le tronc, elle évoque un eczéma aigu ; sur le doigt, un panaris ; sur les paupières, l'œdème est prépondérant. Limité au col, l'herpès passe inaperçu et constitue une cause de transmission occulte génitale.
L'atteinte anale sévère s'accompagne de douleurs, d'écoulements et d'un ténesme. L'atteinte lombaire ou fessière est souvent symétrique, bilatérale, lors des résurgences. L'encéphalite à HSV1 est l'encéphalite la plus fréquente chez l'adulte, la fièvre s'accompagne alors d'un tableau local neurologique. La kératite herpétique avec érosion et ulcération cornéenne récidivante est à l'origine de séquelles cicatricielles graves.

Evolution

Une première poussée d'herpès peut guérir de façon définitive. Sinon, l'apparition de récidives donne l'herpès récurrent dont le rythme est très variable (hebdomadaire, mensuel, irrégulier), et surtout toujours sur le même territoire à l'occasion de facteurs déclenchants : fièvre (bouton de fièvre), exposition solaire brutale (sports d'hiver), infections répétées, ORL, menstruations, stress, irritation locale, immunodépression.
L'infection de type I ne protège pas contre le type II et inversement. Une forme particulière d'herpès récurrent est représentée par un tableau d'érythème polymorphe récidivant donnant une atteinte dermatologique stéréotypée.
Sinon, les récidives habituelles sont surtout à HSV2 et donnent un tableau moins brutal et spectaculaire que la primo-infection forte initiale. Quelques vésicules s'observent sur les sites habituels : lèvres, joues, front, verge, vulve, mais si ces vésicules sont peu nombreuses et disparaissent en une semaine, elles peuvent être hyperalgiques (autour du méat urinaire) et perturber la vie d'un couple.

Formes particulières

Il existe un risque obstétrical dû à l'infection génitale maternelle en raison d'une possible transmission in utero, mais surtout d'une transmission néonatale au moment du passage dans la filière génitale, la récidive génitale d'HSV2 chez la mère étant asymptomatique dans 70 % des cas. Entre le 5e et le 17e jour apparaît cette poussée herpétique grave chez le prématuré, les lésions cutanées ou muqueuses s'accompagnent de méningo-encéphalite, d'atteintes viscérales sévères (foie, ganglions, poumons, tube digestif). Autrefois fatale, cette forme est désormais transformée dans son évolution par l'aciclovir mais les séquelles neurologiques sont toujours possibles.

Kaposi Juliusberg

Le sujets atopiques, au contact de certains virus (HSV, Pox), peuvent développer des infections disséminées spectaculaires, nécrotiques, s'étendant sur tout le corps. Se trouve réalisé un tableau de pustulose varioliforme, un semis de vésicules en nappes, devenant nécrotiques, hémorragiques avec hyperthermie et atteinte de l'état général. Autrefois, cette complication était létale, elle bénéficie désormais de l'aciclovir.
Chez l'immunodéprimé, le tableau peut être identique, avec en plus, destruction tissulaire et surinfection bactérienne.

Diagnostic

Il est souvent évident, il faut toujours penser à un herpès en présence de vésicules. Sinon, la biopsie en cas de doute permet le diagnostic. La recherche du virus par culture est facile (kit), mais la fragilité de ce virus impose des précautions de prélèvement et de transport. Le sérodiagnostic n'a d'intérêt que dans la primo-infection.

Traitement

Il répond désormais à un schéma simple.
Traitement curatif d'un premier épisode :
- valaciclovir (Zelitrex) 2 cp/j pendant dix jours ;
- récurrence : 2 cp/j pendant cinq jours ;
- en cas de forme sévère bruyante, on peut faire appel à la voie parentérale avec aciclovir (Zovirax) 5 mg/kg toutes les 8 heures pendant cinq à dix jours.

Préventif

Prévention des récurrences chez les sujets immunocompétents, faisant plus de six récurrences par an : 1 cp/j pendant une période prolongée de plusieurs mois selon les cas.
Il faut éviter qu'un atopique ou un nouveau-né ne soit en contact avec un sujet porteur d'un herpès. L'herpès génital peut être prévenu par des rapports protégés pendant
cinq jours en cas de récurrence herpétique. Contre l'herpès solaire, les applications d'écran total peuvent suffire. Au cours de la grossesse, les prélèvements répétés et fastidieux des dernières semaines n'ont plus de raison d'être. Il suffit de prescrire le valaciclovir en fin de grossesse pour avoir une excellente protection.

L'alternative

Compte tenu de l'efficacité du valaciclovir, les autres produits habituellement utilisés comme la vidarabine (Vira-MP) en gel dermique, en pommade ophtalmique, sont moins souvent utilisés, de même que l'idoxirudine (Gel VTOS, Iduviran collyre, Cuterpès pommade, Cébévir collyre, Virofta collyre). En somme, le valaciclovir a révolutionné l'évolutivité de l'herpès.

> Pr Daniel LAMBERT

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7472