Posture, action, stress
Les contractions sont favorisées par la posture et l'action et majorées par le stress ; elles sont parfois contrôlées par un geste antagoniste (simple attouchement de la région participant à la dystonie) et disparaissent pendant le sommeil. La posture dystonique peut présenter un aspect répétitif au cours d'une activité définie et interfère dans ce cas avec le mouvement volontaire qui se trouve parasité ; l'arrêt du mouvement entraîne alors la disparition du phénomène dystonique.
Les dystonies focales intéressent un seul groupe musculaire, ce sont les formes les plus fréquentes de dystonie, liées à un dysfonctionnement de structures profondes du cerveau (système des ganglions de la base ou système extrapyramidal).
Principales formes
1) La dystonie cervicale
C'est la forme la plus fréquente des dystonies focales encore appelée torticolis spasmodique. Les contractions musculaires involontaires de la région cervicale portent la tête en rotation (torticolis), en inclinaison (latérocolis), en flexion (antécolis) ou en extension (rétrocolis). Plus fréquente chez la femme, cette dystonie débute vers 40 ans. Elle est souvent précédée de douleurs de la nuque. Le torticolis se manifeste de façon spasmodique (déviation de la tête survenant par à-coups successifs) ou tonique (la tête est imprimée d'un mouvement de rotation de façon progressive), une élévation de l'épaule est souvent observée de façon associée.
Au début, la posture peut être corrigée volontairement, mais avec une tendance ensuite à se reproduire. La dystonie peut être corrigée par un geste antagoniste, la main du côté de la rotation vient imprimer un attouchement sur la joue sans qu'il soit nécessaire d'imprimer fortement un appui ; parfois, le contact s'établit sur la joue du côté opposé. Son évolution est imprévisible (guérison spontanée possible), mais, le plus souvent, la dystonie se majore progressivement entraînant une gêne fonctionnelle et psychologique. La dystonie est augmentée par la station debout ou la marche et améliorée par le décubitus.
2) Le blépharospasme
Survenant le plus souvent chez une femme vers 60 ans, la dystonie se focalise de façon symétrique ou non aux muscles périorbitaires et de la paupière. Initialement, la gêne fonctionnelle est variable (douleurs, gênes oculaires, larmoiements), mais progressivement son retentissement sur la vision est important. Elle se caractérise par des clignements répétés des paupières avec l'apparition secondaire de contractions toniques empêchant pendant plusieurs secondes l'ouverture des yeux. Le patient lutte alors contre le spasme par attouchements de la paupière ou en tentant d'ouvrir de façon forcée les yeux. La dystonie est aggravée par la lecture, l'exposition à la lumière, le stress et les contrariétés, calmée par le repos et l'obscurité.
Si le blépharospasme est de topographie strictement unilatérale, un hémispasme facial débutant doit être évoqué, les manifestations cloniques et toniques sont alors observées uniquement au niveau d'une hémiface.
3) La crampe de l'écrivain
Apparaissant vers l'âge de 40 ans, c'est la plus fréquente des dystonies de fonction. Elle concerne spécifiquement l'écriture, survenant dès la saisie du stylo avec l'apparition d'une posture anormale après plusieurs mots ou phrases s'associant volontiers à des douleurs. L'écriture devient rapidement impossible. Si cette dystonie focale intéresse les muscles de la main, de nombreux muscles sont également concernés (avant-bras, bras, épaule) pour tenter de contrôler les contractions musculaires involontaires. La posture est interprétée comme une compensation volontaire afin de limiter l'intensité de la dystonie. Quelques patients bénéficient d'un geste antagoniste sous forme d'un simple contact de la main opposée sur la main dystonique.
La crampe de l'écrivain survient souvent dans un contexte d'utilisation fréquente de l'écriture. L'écriture au tableau noir, qui utilise principalement les muscles de l'épaule, est souvent moins affectée. On rapprochera également des crampes des écrivains, des dystonies survenant chez des musiciens (pianiste, accordéoniste, violoniste, guitariste) ou chez certains sportifs (golfeur). Le rôle de mouvements répétitifs dans la survenue de ces dystonies focales est souvent noté.
4) Les dystonies oromandibulaires
Rares, elles peuvent concerner les muscles de la langue, de l'ouverture ou de la fermeture de la bouche ou des mouvements de succion des lèvres. Elles entraînent une gêne pour l'alimentation et parfois la parole. La déglutition est parfois difficile car les étapes du contrôle du bol alimentaire peuvent être affectées.
5) Les dystonies laryngées
L'atteinte dystonique des muscles laryngés est responsable d'une dysphonie spasmodique qui s'intègrent également dans les dystonies de fonction puisqu'elles ne se manifestent que lors de la parole. Plus fréquente chez la femme, cette dystonie survient en moyenne dans la 4e ou 5e décennie et s'installe de façon insidieuse prenant souvent un caractère fluctuant au début de l'évolution. On en distingue deux formes :
– la dysphonie spasmodique en adduction des cordes vocales est la plus fréquente, responsable d'une voie étranglée et hachée, avec une gêne respiratoire en raison des spasmes respiratoires ;
– la dysphonie spasmodique en abduction est plus rare, avec une voix chuchotée, murmurée et de faible intensité, confinant parfois à une disparition de la voix.
Dans les deux types, la dysphonie peut être améliorée par le chant, le rire ou la voix criée ; un tremblement vocal peut être également associé.
Causes des dystonies focales
Les dystonies focales sont le plus souvent d'origine idiopathique et isolée. Un caractère familial est souvent sous-estimé (25 % des cas), avec une expression hétérogène au sein d'une même famille (dystonie focale de localisation variable).
Des dystonies focales secondaires ne doivent pas être méconnues. On distinguera :
– les dystonies aiguës médicamenteuses survenant après quelques heures ou quelques jours de traitement par neuroleptiques, se manifestant par un blépharospasme, une dystonie oromandibulaire ou cervicale parfois associés ; les dystonies tardives après prise de neuroleptiques surviennent après plusieurs mois de traitement sous forme de mouvements oromandibulaires associés parfois à un blépharospasme et une dystonie cervicale ; les dystonies induites par la L-dopa observées dans le cours évolutif de la maladie de Parkinson ;
– les dystonies focales consécutives à des lésions vasculaires se traduisent par une dystonie segmentaire ou une hémidystonie ou par une forme focale (blépharospasme, dysphonie, crampe de l'écrivain, torticolis).
Dans le cadre des pathologies dégénératives, une dystonie focale peut se rencontrer comme une manifestation inaugurale d'une maladie de Parkinson sous forme d'une crampe de l'écrivain ou d'une dystonie du pied (sujet jeune), d'un blépharospasme et d'un torticolis dans d'autres syndromes parkinsoniens plus rares.
Prise en charge thérapeutique
Le traitement des dystonies focales repose principalement sur les injections de toxine botulique. Ce traitement strictement symptomatique permet d'obtenir « un blocage » au niveau de la jonction neuromusculaire. Son action est exclusivement locale et peut être retardée après quelques jours ; le bénéfice reste transitoire et justifie de renouveler les injections après quelques mois. Celles-ci se font par voie sous-cutanée ou intramusculaire et justifient un repérage minutieux des sites musculaires injectés. Les effets secondaires transitoires sont possibles, liés à une diffusion de la toxine vers des muscles adjacents non dystoniques (diplopie dans le blépharospasme, troubles de déglutition dans le torticolis spasmodique).
Dans les dystonies de fonction, la difficulté sera d'obtenir un repérage minutieux des muscles à l'origine de la dystonie et d'établir la distinction avec des contractions musculaires volontaires qui tentent de la limiter. Lors de l'écriture avec la main opposée, la position dystonique peut être observée sur la main controlatérale qui est au repos ; ce phénomène de dystonie en miroir doit être recherché systématiquement pour préciser quels sont les muscles à l'origine de la dystonie, facilitant ainsi le repérage pour les injections de toxine. L'effet des médications peros reste dans l'ensemble décevant ; elles ne sont plus proposées en première intention. Une kinésithérapie peut être associée aux injections par toxine botulique pour les dystonies cervicales et certaines dystonies de fonction pour tenter de s'opposer aux positions vicieuses déclenchées par la dystonie.
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