REFERENCE
AMBICIDES
Des amoebicides diffusibles et de contact
Quelle que soit l'expression de l'amibiase, infection ou maladie, l'objectif thérapeutique demeure double : guérir l'amibiase invasive dans ses formes intestinales et extradigestives et éradiquer le portage intestinal d' Entamoeba histolytica(Eh). Deux classes d'amoebicides sont disponibles (Cf. tableau). Les ambicides diffusibles, actifs sur les amibes hématophages (Eh histolytica) en raison de leur pénétration tissulaire, sont peu efficaces sur les formes endoluminales d' Eh (kyste et forme végétative minuta non hématophage). Les ambicides de contact, uniquement actifs sur ces amibes endoluminales, sont réservés au traitement de l'amibiase infection.
Les amoebicides diffusibles ne concernent plus aujourd'hui que les dérivés 5 nitro-imidazolés. La 2 déhydroémétine, malgré une excellente activité tissulaire et endoluminale, n'est plus qu'exceptionnellement utilisée en raison de sa toxicité myocardique et neurologique. Elle est réservée aux allergies ou aux rares échecs thérapeutiques avec les imidazolés et pour certains, en association avec les imidazolés, en cas de colite maligne du fait de sa rapidité d'action. Le métronidazole (Flagyl) reste la molécule de référence en raison de son faible coût et de sa remarquable efficacité (90 %). Le tinidazole (Fasigyne), l'ornidazole (Tibéral) et le secnidazole (Flagentyl) ont la même efficacité pour une durée d'utilisation plus brève, voire en traitement « minute » pour certains (tinidazole, secnidazole).
Excellente biodisponibilité par voie orale
L'excellente biodisponibilité par voie orale fait réserver la voie intraveineuse (métronidazole, ornidazole) aux cas d'intolérance alimentaire ou de forme grave. La tolérance est bonne, même si des effets secondaires mineurs sont fréquemment observés (nausées, épigastralgies, goût métallique, vertiges, céphalées, effet antabuse). Des effets secondaires neurologiques sont également possibles (ataxie, confusion, insomnie, paresthésies), certains imposant l'arrêt du médicament (psychose, convulsions). Leur utilisation est possible et indiquée en cas de grossesse, d'autant qu'il n'existe guère d'alternative.
Les seuls amoebicides de contact disponibles en France sont le tiliquinol-tilbroquinol (Intétrix) et, en cas d'échec, le diloxanide (Diloxanide Furoate), délivré en autorisation temporaire d'utilisation (ATU) nominative. La paramomycine (Humagel, Humatin) réservée aux infections à virus de l'immunodéficience humaine (ATU) et la difétarsone (Bemarsal) ne sont plus disponibles.
AMIBIASE INTESTINALE
Amibiase intestinale : un traitement plutôt simple
L'amibiase colique aiguë non compliquée et l'amibiase chronique avec présence d' Eh histolytica relèvent des imidazolés, associés à un amoebicide de contact afin de déparasiter le côlon. Les signes cliniques disparaissent en deux à trois jours, la cicatrisation des lésions recto-sigmoïdiennes demandant quant à elle entre dix et vingt jours.
Contrôles parasitologiques
L'éradication du parasite, qui n'est obtenue que dans 85 à 90 % des cas, ne peut être affirmée que par la négativité de trois contrôles parasitologiques effectués quinze jours après la fin du traitement.
Amibiase colique maligne
L'amibiase colique maligne doit être prise en charge comme une colite aiguë grave et nécessite, en plus des imidazolés administrés par voie parentérale, une antibiothérapie à large spectre, une réanimation hydro-électrolytique et une alimentation parentérale. L'absence d'amélioration rapide doit conduire à la réalisation d'une colectomie subtotale sans rétablissement de la continuité, même si l'intérêt de la chirurgie dans cette indication est discuté. La survenue d'une péritonite, qui correspond souvent à une translocation colique sans perforation véritable, peut rester accessible au seul traitement médical.
Amoebome
L'amoebome, quand le diagnostic en est affirmé, doit être traité par les dérivés imidazolés pendant une durée plus longue (vingt jours). Le recours à la chirurgie s'impose en l'absence d'amélioration objective après un mois.
L'amibiase infection isolée est traitée par les seuls amobicides de contact.
AMIBIASE HEPATIQUE
Amibiase hépatique : l'évacuation de la collection n'est pas systématique
Le traitement impose toujours et rapidement la prescription d'imidazolés et si nécessaire (10 % des cas), l'évacuation de la collection hépatique. Les indications de ponction évacuatrice concernent les abcès menaçant de se rompre dans le péricarde, la plèvre ou le péritoine, les abcès très algides, les abcès résistants au traitement médical bien conduit, et, pour certains auteurs, les abcès de diamètre > 10 cm. Le drainage percutané doit être préféré à la ponction simple, surtout lorsqu'il s'agit d'un abcès compliqué. Il permet généralement d'éviter le recours à la chirurgie, réservée à ses échecs et aux ruptures d'abcès.
Evolution sous traitement
L'évolution sous traitement est en règle rapidement favorable. La douleur et la fièvre régressent en quelques jours, celle-ci pouvant disparaître en moins de 24 heures. La leucocytose et le taux de C Réactive Protéine se normalisent en moins de deux semaines, la vitesse de sédimentation diminuant plus lentement. Le titre des anticorps commence à décroître à partir du troisième mois et se négative en moyenne en un à deux ans (IFI, ELISA). Les aspects échographiques se modifient par contre très lentement, ce qui constitue une source d'inquiétude souvent non justifiée et ne doit pas inciter à une surveillance échographique systématique en cas d'évolution favorable. La taille de la cavité diminue ainsi progressivement, parfois après une augmentation transitoire. Son contenu devient plus échogène et ses limites moins nettes. La restitution ad integrum n'est obtenue que dans 50 à 75 % des cas au sixième mois. Une image hypoéchogène sans paroi identifiable peut être observée plus de deux ans après le traitement. Dans 10 % des cas, enfin, une image hyperéchogène séquellaire va persister. Des rechutes, parfois tardives, sont décrites dans moins de 10 % des cas et doivent faire rechercher une amibiase infection dans l'entourage ou la persistance d'amibes dans le côlon. La létalité globale de l'AH, avec un traitement correct et suffisamment précoce, n'excède pas 1 %, contre 10 à 20 % en cas de traitement tardif.
AUTRES LOCALISATIONS
Des principes similaires
Les grands principes de traitement de l'amibiase pleuro-pulmonaire et de l'amibiase péricardique sont identiques à ceux de l'amibiase hépatique : ambicide diffusible et évacuation des collections par ponctions-lavages ou drainage. Le recours à la chirurgie s'impose dans les formes compliquées.
Amibiase cérébrale
L'amibiase cérébrale est également traitée par ambicides diffusibles, dont l'efficacité est appréciée par contrôle tomodensitométrique. La chirurgie plastique est parfois indiquée au décours d'une amibiase cutanée.
PROPHYLAXIE LIEE AU PERIL FECAL
En l'absence de chimioprophylaxie efficace, la prophylaxie de l'amibiase repose en zone d'endémie sur des mesures simples d'hygiène collective et individuelle dont la mise en oeuvre est intimement liée au développement socio-économique des régions concernées. On attend toujours l'avènement d'une vaccination pour espérer lutter efficacement contre cette vaste endémie parasitaire.
La prévention des amibiases extradigestives repose sur le traitement de toute amibiase colique. L'impossibilité de distinguer en routine Eh et Entamoeba dispar doit conduire à dépister et traiter tous les états d'amibiase infection.
Traitements amœbicides disponibles en France | ||||||
Médicament | Voie d’administration |
Posologie | Durée | Contre-indications | Effets secondaires (rares) |
|
Adulte | Enfant | |||||
Amoebicides diffusibles | ||||||
Métronidazole (Flagyl) |
PO/I.V. | 1,5-2 g/j | 30-40 mg/kg/j | 5-10 j | Hypersensibilité Grossesse au 1er trimestre (1) Allaitement (1) |
Digestifs Antabuse Dysgueusie (Neurologiques) (Leucopénie) |
Tinidazole (Fasigyne) |
PO | 2 g/j | 30 mg/kg/j | 3-5 j | id. | id. |
Ornidazole (Tibéral) |
PO/I.V. | 2 g/j | 30 mg/kg/j | 3-5 j | id. | id. |
Secnidazole (Flagentyl) |
PO | 2 g/j | 30 mg/kg/j | 1-3 j | id. | id. |
2-déhydroémétine (2) | SC ou I.M. | 1 mg/kg/j | 1 mg/kg/j | 3 j | Neuropathie Cardiopathie |
Polynévrite Myocardite |
Amoebicides de contact | ||||||
Tiliquinol-tilbroquinol (Intétrix) |
PO | 1,2 g/j | Absence d’AMM | 10 j | Grossesse Allaitement |
Hépatite (Allergie cutanée) (Neuropathie périphérique) |
Diloxanide (Diloxanide Furoate) (3) |
PO | 1,5 g/j | 20 mg/kg/j (poids > 25 kg) |
10 j | Hypersensibilité | Digestifs Allergie cutanée |
PO : per os ; I.V. : intraveineux réservé aux cas d’intolérance digestive et aux formes graves ; SC : sous-cutanée ; I.M. : intramusculaire. AMM : autorisation de mise sur le marché. (1) Contre-indication relative par défaut d’alternative. (2) Uniquement disponible à l’étranger en importation. (3) Uniquement disponible en ATU.
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