REFERENCE
GINA 2002
Le consensus GINA 2002 (1) élaboré par des pneumologues d'adultes est mal adapté à l'asthme de l'enfant, surtout celui de l'enfant préscolaire (ci-après : « classification... »). Selon le GINA, un asthme est dit persistant modéré (stade 2) s'il entraîne des symptômes diurnes (quotidiens) et nocturnes (plus de une fois par semaine) avec un VEMS inférieur à 80 % des valeurs prédites ! Chez un enfant, un tel asthme est préoccupant. Même commentaire pour l'asthme persistant sévère (grade 4) : symptômes diurnes continus, symptômes nocturnes fréquents et VEMS inférieur à 60 % des valeurs attendues.
La classification de l'école française
Evidemment, les enfants atteints de ce type d'asthme ne peuvent rester chez eux : ils doivent consulter aux urgences. C'est pourquoi la classification pédiatrique en trois stades de l'école française est réellement adaptée aux enfants asthmatiques (cf. ci-après : « Le consensus ») (2, 3).
Lutte précoce contre l'inflammation
Ces remarques (importantes) mises à part, le GINA 2002, disponible sur Internet, aborde l'asthme sous tous ses aspects : mécanismes, traitement, prévention. Le document insiste sur l'importance de la lutte précoce contre l'inflammation (pour éviter les lésions de remodelage des bronches) par les corticoïdes inhalés. Les posologies sont à adapter selon la molécule (GINA donne un tableau d'équivalence des corticoïdes entre eux) en les économisant (rechercher la posologie minimale utile pour maîtriser les symptômes et améliorer l'EFR). C'est dans cette stratégie d'épargne que se placent les bêta 2-stimulants de longue durée d'action et les antileucotriènes. Il faut aussi lutter contre la corticophobie : ce ne sont pas les corticoïdes inhalés (pour le traitement de fond) ou trois ou quatre séquences annuelles de corticoïdes oraux (pour la crise) qui risquent d'altérer la croissance... mais l'asthme non traité !
A signaler : un numéro spécial du JACI précise fort heureusement nos conduites pratiques (4,5).
Un plan écrit
Dernier point d'importance : tout asthmatique doit avoir un plan, écrit par son médecin, indiquant en détail les gestes à faire en cas de crise menaçante. Il faut anticiper la crise (traiter dès l'apparition des prodromes) : c'est l'un des objectifs de l'éducation dans les « Ecoles de l'asthme » (voir ci-après).
Equivalents d'asthme
Parmi les « équivalents de l'asthme » (éternuements, conjonctivite, oppression thoracique parfois décrite comme une douleur), le plus important est la toux. De 40 à 70 % des asthmatiques toussent régulièrement. Devant une toux isolée, il faut évoquer un asthme s'il existe des antécédents allergiques familiaux au premier degré (mère surtout, père, frères et surs) ou personnels. Attention ! Ces allergies doivent être bien documentées (rhume des foins, eczéma, asthme, allergies alimentaires vraies) par un bilan allergologique précis. A savoir : les urticaires sont plus souvent non allergiques qu'allergiques.
La toux « équivalent d'asthme » est sèche, nocturne et survient au petit matin (par opposition avec celle du RGO qui survient dans le primo-décubitus). Mais une toux grasse (expectoration) s'observe aussi au décours de la crise. C'est surtout une toux d'effort, à l'inhalation d'air froid. Que faire ? Une radio du thorax (éliminer en particulier un corps étranger), une EFR avec test de réversibilité aux bêta 2-stimulants, au besoin une recherche d'hyperréactivité bronchique non spécifique (test au carbachol) et, bien sûr, toujours une enquête allergologiste précise (interrogatoire et prick-tests). Si la toux est étiquetée comme « équivalent d'asthme », elle réclame le même traitement que ce dernier. Un test pratique, le test thérapeutique : ausculter et faire un peak-flow au cabinet avant et après deux à quatre bouffées d'un bêta 2-stimulant d'action rapide, tactique fort justement préconisée par Jacques Robert. Le diagnostic est plus que probable si l'auscultation pulmonaire se normalise et si le DEP augmente de 20 % ou plus.
Asthme du nourrisson
Pour un nourrisson, il y a mille et une raisons de siffler... enfin presque. La bronchiolite à VRS (premier épisode de gêne respiratoire sifflante en hiver avant l'âge de 12 mois) est le principal pourvoyeur des sifflements récidivants du nourrisson. Comment savoir si l'enfant continuera à siffler des années plus tard, c'est-à-dire comment repérer ceux qui deviendront asthmatiques parmi ces nourrissons siffleurs ? Voici les éléments de réponse à cette question :
1) les antécédents familiaux d'atopie au 1er degré ;
2) les antécédents personnels d'atopie (le risque d'asthme est multiplié par 3 à 5 si l'enfant a [ou a eu] de l'eczéma) ;
3) l'existence d'une sensibilisation à l'oeuf à l'âge de 1 an (marqueur du développement d'une allergie aux pneumallergènes usuels à 7 ans) ;
4) une sensibilisation précoce aux acariens et/ou aux pollens, et/ou aux animaux (prick-tests et/ou rasts positifs) ;
5) une allergie alimentaire (AA) précoce (40 % des enfants atteints d'AA à 1 an développent de l'asthme à l'âge de 2 ans) ;
6) une amélioration des symptômes évocateurs d'asthme sous bêta 2-stimulants de courte durée d'action. Les nourrissons ainsi détectés doivent bénéficier d'un traitement de fond (voir ci-après).
Asthme d'équilibration difficile
Le vocable « asthme difficile » est un néologisme franglais (« difficult asthme ») auquel il faudrait préférer le terme « asthme d'équilibration difficile » : il s'agit d'un petit groupe d'enfants (surtout d'adolescents) qui présentent des symptômes d'asthme au moins trois jours par semaine ou d'exacerbations mensuelles nécessitant une corticothérapie par voie générale malgré un traitement de fond important : corticoïdes inhalés (béclométhasone ou équivalent > ou = 800 mg/jour) et bêta 2-stimulants de longue durée d'action et/ou antileucotriènes et/ou théophylline retard.
Il faut identifier les facteurs d'aggravation :
1) exposition importante aux allergènes (acariens, moisissures et surtout blattes) ;
2) tabagisme passif et actif ;
3) consommation de drogues ;
4) foyers infectieux chroniques, sinusites ou dilatations des bronches ;
5) facteurs socio-économiques (défaut d'accès aux soins, mauvaise compréhension, troubles psychologiques) ;
6) reflux gastro-oesophagien. Il faut aussi écarter certains diagnostics différentiels, en particulier la dysfonction laryngée épisodique : toux, gêne respiratoire par accès d'adduction paradoxale des cordes vocales à l'inspiration, le plus souvent isolée chez l'enfant, mais associée à l'asthme dans un cas sur deux chez l'adulte.
Références :
1) Global Initiative for Asthma. Global strategy for asthma management and prevention NIH-NHLBI 2002. http://www.ginasthma.com
2) Warner J. O., Naspitz C. K. Third International Pediatric Consensus on the Management of Childhood Asthma. Int Pediatric Asthma Consensus Group. « Pediatr Pulmonol », 1998 ; 25 : 1-17.
3) Scheinmann P. Asthme de l'enfant. In « Pneumoguide pédiatrique ». Sous la direction de Jacques de Blic et Pierre Scheinmann. Phase 5 édit., Paris, 2000 : pp. 107-108.
4) National Asthma Education and Prevention Program. Expert Panel Report : Guidelines for the Diagnosis and Management of Asthma. Update on Selected Topics 2002. « J Allergy Clin Immunol », 2002 ; 110 (5, Suppl.) : s141-s219.
5) Brèves d'asthmologie 1. Supplément de « Médecine & Enfance », mars 2003 : 1-2.
Le consensus pédiatrique en trois stades*
Asthme épisodique peu fréquent (bénin) (70 % des cas) :
- crises < un épisode toutes les 4-6 semaines ;
- sifflements après un exercice physique important ;
- pas de symptômes intercritiques ;
- EFR normales ;
- surveillance sous contrôle de l'environnement et la prévention de l'asthme d'effort sont recommandés.
Asthme épisodique fréquent (modéré) (25 %) :
- crises > 1 épisode/4-6 semaines mais < 1 fois/semaine ;
- besoin de bêta 2-stimulants de secours < ou = 3 fois par semaine ;
- crises d'asthme après les exercices modérés bien prévenus par les de bêta 2-stimulants ;
- EFR normale (ou proche de la normale) entre les crises ;
- traitement de fond indispensable (corticoïdes inhalés).
Asthme persistant (sévère) (5 %) :
- crises fréquentes (en particulier nocturne) ;
- nécessité de prendre des bêta 2-mimétiques de courte durée d'action > 3 fois par semaine ;
- asthme à la suite d'exercices légers ;
- besoin de bêta 2-stimulants de secours > 3 fois par semaine ;
- fonction respiratoire altérée de façon permanente (syndrome obstructif intercritique) ;
- traitement de fond + contrôle de l'environnement + prévention de l'asthme d'effort + surveillance étroite.
* D'après Réf. 3 (Scheinmann P. Asthme de l'enfant. In « Pneumoguide pédiatrique ») modifié .
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature