Evolution vers la fibrose
La stéatohépatite se distingue de la stéatose par l'association de lésions inflammatoires du foie. Cette différence n'est pas sans conséquence, puisqu'elle explique l'évolution de la NASH vers la fibrose progressive jusqu'à la cirrhose dans 10 à 20 % des cas. La cirrhose peut ensuite se compliquer d'un carcinome hépatocellulaire. Trois pour cent environ des tableaux de stéatose correspondraient en fait à une NASH.
Un dépistage biologique ou échographique
La NASH est une affection généralement asymptomatique. L'examen retrouve parfois une hépatomégalie à bord mousse. Les signes surviennent essentiellement lorsque la maladie est déjà compliquée. Il s'agit alors des stigmates classiques de la cirrhose.
Le plus souvent, le diagnostic est évoqué à l'occasion d'un bilan sanguin systématique ou d'une échographie abdominale. La biologie montre inconstamment une cytolyse modérée prédominant sur les ALAT et/ou une cholestase anictérique. Plus tard, le bilan peut retrouver les anomalies habituelles liées à l'état de cirrhose. A l'échographie, le foie stéatosique apparaît hyperéchogène et « brillant ». La tomodensitométrie et l'IRM semblent moins sensibles que l'échographie pour mettre en évidence la surcharge graisseuse. Aucune de ces imageries n'est capable de dépister les lésions inflammatoires et, donc, de distinguer une NASH d'une stéatose. Devant un tel tableau radio-biologique, il est nécessaire d'éliminer d'autres étiologies que les stéatopathies. Il faut dépister un alcoolisme chronique ou une hépatite virale B ou C. Les stéatopathies restent des diagnostics d'élimination.
Le syndrome polymétabolique
« Tout syndrome polymétabolique doit motiver le dépistage d'une stéatopathie. Ce syndrome est significativement associé à la NASH », explique au « Quotidien » le Dr Jobard. Sa prise en charge fera d'ailleurs partie du traitement. Cliniquement, il associe une obésité tronculaire à une hypertension artérielle. Biologiquement, il se traduit par une hyperglycémie, une élévation du LDL cholestérol et une hypertriglycéridémie. Il coexiste parfois des anomalies du bilan martial : une hyperferritinémie et une élévation du coefficient de saturation de la transferrine. Elles traduisent le développement d'une hépatosidérose, une autre atteinte hépatique associée au syndrome dysmétabolique. Dans ce cas, le foie est victime d'une surcharge en fer qui nécessite un traitement par saignées.
Les indications de la ponction-biopsie hépatique
La biologie comme l'imagerie sont impuissantes à distinguer une NASH d'une stéatose. La biopsie est le seul examen à même de poser le diagnostic de certitude de stéatohépatite. Cependant, cet acte invasif ne peut être réalisé systématiquement dans une situation qui concernerait plus d'un cinquième de la population française. Plusieurs équipes ont mené des recherches pour définir des sous-populations à risque de NASH parmi les patients stéatosiques. Cependant, il n'existe pas encore à ce jour de recommandations officielles. En pratique, on cherchera l'affection plus volontiers chez les patients de plus de 50 ans, dont l'IMC est supérieur à 28 kg/m2 ou qui souffrent d'un diabète, d'une hypertriglycéridémie, d'une hypertension artérielle, d'un taux d'ALAT supérieur à deux fois la normale ou d'un rapport ASAT/ALAT inférieur à un. L'analyse histologique détermine le grade et le stade de l'hépatite. Le grade quantifie les phénomènes inflammatoires et nécrotiques. Le stade correspond au niveau d'extension de la fibrose. Ces qualifications devraient à l'avenir permettre d'ajuster le traitement et la surveillance à la gravité des lésions hépatiques.
Le traitement
Actuellement, aucun médicament ne possède l'AMM pour le traitement de la NASH. Cependant, plusieurs études sont en faveur d'un effet bénéfique des glitazones. Elles diminuent l'insulinorésistance, phénomène qui semble directement impliqué dans la genèse d'une NASH. Selon le Dr Jobard, « il existe suffisamment d'éléments pour prescrire les glitazones dans cette situation ». Ce traitement nécessite une surveillance car il peut être hépatotoxique. Certains médicaments sont dits hépatoprotecteurs : le citrate de bétaïne, la vitamine E et l'acide ursodésoxycholique. Ils ont été relégués au second plan par l'arrivée des glitazones. Le traitement médicamenteux doit s'accompagner de la pratique régulière d'une activité physique qui permet, elle aussi, de diminuer l'insulinorésistance. Parallèlement, il reste indispensable de prendre en charge le syndrome métabolique. En cas de surpoids, un régime normocalorique équilibré est indiqué favorisant les acides gras polyinsaturés et les produits sucrés à index glycémique faible. La réduction pondérale doit être progressive, limitée à 1 kg/mois. En effet, il semblerait qu'un amaigrissement rapide aggrave paradoxalement les lésions hépatiques. Les antihypertenseurs, les statines et les antidiabétiques oraux ont aussi leur place. Parmi les hypoglycémiants, la metformine est privilégiée car elle lutte contre l'insulinorésistance. Enfin, limiter la consommation d'alcool est toujours de mise. Lorsque la maladie a atteint le stade de cirrhose, la prise en charge est celle d'une cirrhose sans spécificité liée à son étiologie.
La surveillance
Ses modalités ne sont pas encore définies. « Des techniques non invasives d'appréciation de l'inflammation et de la fibrose hépatiques sont récemment apparues. Elles pourraient devenir des éléments de surveillance pertinents des stéatopathies », estime le Dr Jobard. Le Fibrotest est le résultat d'un calcul basé sur les taux sanguins d'haptoglobine, d'apolipoprotéine A1, d'alpha 2-macroglobuline, de bilirubine totale, de gammaglutamyltransférase et d'ALAT. Il varie de 0 à 1. Le risque de fibrose est inférieur à 10 % pour les résultats inférieurs à 0,1. Ce risque passe à plus de 90 % pour des résultats supérieurs à 0,6. Le fibroscan est une technique d'imagerie appréciant le degré de fibrose hépatique. Une colonne d'échographie émet une onde qui est d'autant plus absorbée que le foie est fibrosé. Il semble particulièrement intéressant dans ce contexte, mais reste coûteux et peu disponible. La place de ces examens dans la surveillance, la fréquence des bilans biologiques et les indications de ponction hépatique restent encore à préciser.
Des questions d'autant plus urgentes à résoudre que la fréquence de la NASH devrait augmenter prochainement vu la progression importante des chiffres de l'obésité, en France comme dans le monde. Elle pourrait, selon certains auteurs, devenir l'une des premières causes de cirrhose dans les pays industrialisés.
Bibliographie
P. Lahmek, S. Nahon. Stéatopathies hépatiques non alcooliques, EMC.
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