Myologistes français
La myofasciite à macrophages (MFM) est une affection d'identification récente, décrite en 1998 par un groupe de myologistes français, conduit par le Pr Romain Gherardi du CHU Henri-Mondor (Créteil). Depuis le premier cas rapporté par le Dr Michelle Coquet en 1993, ce sont plus de 500 nouveaux cas qui ont été diagnostiqués. Dans la mesure où, jusqu'à présent, la seule procédure admise pour en faire le diagnostic est la biopsie musculaire, il est vraisemblable que la prévalence de cette affection soit encore très sous-estimée. La MFM est au départ une lésion histologique inhabituelle consistant en un infiltrat inflammatoire musculaire, focal, formé de grands macrophages basophiles et cohésifs, et de lymphocytes, principalement T.
Hydroxyde d'aluminium
En microscopie électronique, on observe au sein des macrophages de la lésion de MFM, des inclusions osmiophiles spiculées correspondant à des nanocristaux d'hydroxyde d'aluminium. Cette accumulation focale d'hydroxyde d'aluminium est secondaire à l'injection intramusculaire de vaccins utilisant ce composé comme adjuvant, dont elle atteste la persistance prolongée dans l'organisme (délai médian vaccination-biopsie : 53 mois). Les vaccins concernés sont les vaccins anti-hépatite B et anti-hépatite A et certains vaccins antitétaniques.
Les manifestations cliniques associées à la MFM sont également très stéréotypées.
Arthromyalgies, fatigue
Les patients sont majoritairement des adultes (âge médian : 48 ans) qui présentent des arthromyalgies diffuses et une fatigue chronique, apparues le plus souvent dans les deux ans suivant une vaccination aluminique (délai médian : sept mois). L'étude cas-témoins menée en 2003 par des épidémiologistes de l'INSERM (U170) a montré que l'association entre la lésion « MFM » et le symptôme « fatigue » était statistiquement significative, avec des scores de fatigue plus élevés chez les patients que chez les témoins. La symptomatologie observée répond d'ailleurs aux critères internationaux de syndrome de fatigue chronique chez la majorité des patients. Les patients se plaignent habituellement de difficultés cognitives, qui ont été jusqu'à présent négligées car attribuées à la douleur, la fatigue ou la dépression. Ces troubles s'avèrent en fait très invalidants et non régressifs, ce qui a conduit le Pr Authier à les étudier spécifiquement, en collaboration avec l'équipe de neuropsychologie interventionnelle du Pr Bachoud-Levi (CHU Henri-Mondor).
Atteinte cognitive
Ces chercheurs ont, dans un premier temps, démontré la spécificité de l'atteinte cognitive de la MFM en comparant des patients avec MFM et des patients avec polyarthrite rhumatoïde (PR), appariés pour l'âge, le niveau socio-éducatif, et les niveaux de douleur, fatigue et dépression. Les patients MFM avaient une atteinte de la mémoire de travail et de la mémoire visuelle significativement plus sévère que les patients PR. De plus, ils présentaient des signes de déconnexion interhémisphérique, qu'on n'observait pas chez les patients PR. Dans un deuxième temps, l'évaluation d'une cohorte de 25 patients MFM consécutifs non sélectionnés a montré que tous les patients avaient au moins un test atteignant le seuil pathologique et tous, sauf un au moins un test atteignant le seuil de démence. L'atteinte cognitive touchait principalement les fonctions exécutives et mnésiques et pouvait s'associer à une déconnexion calleuse. Ces troubles n'étaient corrélés ni au niveau de fatigue ni au niveau de dépression. L'IRM cérébrale conventionnelle n'avait pas montré d'anomalie particulière. Cette étude a donc mis en évidence l'existence d'une détérioration intellectuelle de type sous-cortico-frontale avec atteinte de la substance blanche profonde, associée à la MFM. Ce profil d'atteinte cognitive peut s'observer en cas d'atteinte inflammatoire ou toxique du système nerveux central, comme dans les intoxications chroniques par l'aluminium (expositions professionnelles, hémodialyse) ou au cours de la sclérose en plaques ou de l'infection par le virus de l'hépatite C ou le VIH. Cette atteinte cognitive est donc un élément à part entière du syndrome clinique associé à la MFM. Les recherches actuelles portent sur l'identification de biomarqueurs spécifiques et sur la caractérisation des mécanismes physiopathologiques. En raison des effets neurotoxiques connus de l'aluminium, la principale hypothèse de travail des chercheurs est celle d'un passage intracérébral de l'aluminium à partir du site d'injection intramusculaire.
D'après la communication du Pr François-Jérôme Authier (centre de référence des maladies neuromusculaires, CHU Henri Mondor, Créteil) lors de la 8e Journée annuelle extraordinaire de la Société française de neurologie (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris).
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