L'alimentation est un acte trop sérieux pour qu'on se laisse distraire. C'est l'une des conclusions que l'on pourrait tirer des travaux de F. Bellisle présentés au congrès de diabétologie de l'IDF.
De nombreux facteurs environnementaux peuvent influencer les prises alimentaires. Certaines études ont suggéré que la présence de stimuli distrayants pendant le repas pouvait faciliter la prise d'aliments. Regarder la télévision est souvent associé avec une augmentation de poids et de l'adiposité, mais les mécanismes de cette association ne sont pas élucidés.
Dans l'étude réalisée par France Bellisle, à l'Hôtel-Dieu de Paris, les auteurs ont évalué l'importance du volume d'un repas en fonction d'éléments distrayants qui pouvaient les perturber. Ces derniers consistaient à regarder un programme de télévision ou à écouter des programmes de radio enregistrés.
Cinquante-huit femmes âgées de 30 ans ayant un IMC (indice de masse corporelle) normal, à 22 kg/m2, ont pris quatre repas identiques au laboratoire. Les mêmes menus étaient présentés à chaque occasion. Les sujets pouvaient manger à volonté, ils étaient seuls pour déjeuner.
Le premier et le dernier repas étaient présentés sans aucun facteur distrayant. Dans les deux autres, tirés au sort pour l'ordre, les sujets, pendant qu'ils mangeaient, regardaient la télévision ou écoutaient un programme radio enregistré.
Dans chaque programme (télé ou radio), il n'y avait aucun élément se rapportant à l'alimentation.
Des questionnaires psychométriques
Les sujets ont rempli des questionnaires psychométriques (le Three Factor Eating Questionnaire et le Dutch Eating Behaviour Questionnaire) à la fin de chaque série de repas.
La taille des repas était significativement plus importante de 11 % (p < 0,001) dans les groupes télé et radio, comparés aux groupes sans perturbateur.
Il n'y avait aucune différence de prise énergétique entre les personnes qui regardaient la télévision et les mêmes qui écoutaient le programme radio.
Il n'y avait pas non plus de différence entre les quantités consommées lors du premier et du dernier repas sans élément distrayant (cela pour montrer qu'il n'y avait pas de prise d'habitudes, face aux mêmes repas présentés, pouvant modifier l'interprétation des tests).
Dans cette expérience, le fait de regarder la télévision induit une stimulation de la prise alimentaire équivalente, mais pas plus importante qu'écouter la radio.
L'histoire ne dit pas si les résultats seraient reproductibles en fonction du programme : quelle serait l'influence d'un film à suspense (les personnes arrêtent-elles de manger ou deviennent-elles compulsives ?), de la finale du 1 500 m, ou l'écoute d'un concert de musique classique comparée à la retransmission d'un match de football ?
Contrairement à d'autres études, les effets stimulants de la distraction ne sont pas reliés aux caractéristiques personnelles tels les index de restrictions.
Etudier les diabétiques de type 2 en surpoids
Les auteurs concluent que la distraction durant un repas est associée à une augmentation de la prise alimentaire chez l'adulte sain de poids normal. Cette stimulation de la prise alimentaire induite par différents facteurs distrayants est comparable. Les différents effets stimulants d'éléments distrayants doivent être étudiés dans d'autres populations, particulièrement chez les diabétiques de type 2, avec un mauvais contrôle pondéral. Une étude est en cours en ce sens.
Dans l'attente des résultats, on ne peut donc contre-indiquer les Folies Bergère ou le Moulin Rouge aux obèses. La prudence conseillerait cependant de leur recommander de prendre la séance sans le repas.
Paris. Congrès de l'IDF (International Diabetes Federation).
Communication de F. Bellisle, A.-M. Dalix, G. Slama, (Hôtel-Dieu, Paris).
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