DANS UN CONTEXTE de mobilisation mondiale contre l'épidémie de grippe aviaire H5N1, un plan pandémie grippale est en cours de finalisation en France.
Un groupe de travail réunissant des membres de la DGS, de l'InVS et des Centres nationaux de référence a été mis en place le 27 janvier 2004. Les experts vont fonder leur approche sur l'analyse argumentée des différents scénarios possibles de l'épizootie. Ce plan, qui prend en compte les plans grippe et sras déjà disponibles, sera complété par des mesures d' « opérationalisation », permettant la mise en place de réponses graduées en fonction des événements.
Il permettra de définir les réponses à donner par les différents acteurs de santé : définition des populations à risque, mise en place des structures d'hospitalisation locale et régionale selon l'intensité de l'épidémie (création de lits, de service, voire d'hôpitaux, « grippe »). Des mesures plus générales seront aussi envisagées en cas d'afflux massif de malades : restriction des voyages, voire mise en place d'une « police sanitaire ».
Transmission interhumaine.
Pour le Dr Sylvie van der Werf, coresponsable du Centre national de référence de la grippe (France-Nord) et directrice de l'unité de génétique, « dans le contexte actuel de diffusion du virus H5N1 en Asie du Sud-Est - et en particulier dans des pays et des régions dont l'infrastructure sanitaire reste très limitée - la transmission interhumaine devient inéluctable à plus ou moins long terme ». Dans ces pays, en effet, il n'existe pas de pic épidémique de circulation des virus de grippe habituellement retrouvés dans l'hémisphère Nord. On assiste plutôt à des pics ponctuels de faible intensité associés à une circulation réduite et continuelle des différents virus, situation qui favorise les échanges de gènes entre les différents virus.
C'est dans ce contexte, que les entreprises du médicament annoncent qu'elles ont livré depuis le 16 janvier, en réponse à un appel de l'OMS, plus de 220 000 doses de vaccin « contre la grippe de l'hémisphère Nord ».
« Une telle vaccination ne diminuera pas les signes cliniques de personnes atteintes par la grippe aviaire », précise le Dr van der Werf.
La possibilité de combattre l'infection par des médicaments antiviraux est aussi envisagée par les autorités sanitaires nationales et internationales. Les Laboratoires Roche ont annoncé le 29 janvier 2004 que l'oseltamivir (Tamiflu), un inhibiteur de la neuraminidase, pourrait être efficace dans cette pathologie. L'OMS conseille, dans le cadre du Plan grippe, de tenir ce type de médicament à la disposition des personnes travaillant dans les fermes et les abattoirs. La France dispose actuellement d'un stock de plus de 110 000 traitements mobilisables immédiatement pour faire face à une telle demande. Néanmoins, si l'épidémie prend de l'ampleur, il est difficile d'imaginer que ces médicaments pourraient être mis à la disposition des personnes à risque en raison des capacités de production restreintes.
C'est dans ce contexte que l'OMS rapporte, le 1er février, un premier cas possible de transmission interhumaine au Vietnam. Il s'agit de deux sœurs, faisant partie d'une famille où quatre personnes ont été atteintes, et qui ont été hospitalisées à Hanoi au milieu du mois de janvier. Néanmoins, l'OMS reste prudente en l'absence de prélèvements virologiques qui pourraient confirmer définitivement ce type de transmission. Mais cette contamination familiale, si elle est confirmée, laisse à penser que le pire des scénarios pandémiques peut être envisagé. En effet, toutes les conditions requises seraient réunies, pour la première fois depuis 1968, pour la propagation mondiale d'une pandémie.
« Des travaux de manipulation virale afin de rendre le virus non pathogène et de mettre au point un vaccin monovalent efficace sont en cours dans différents laboratoires cordonnées par l'OMS », ajoute le Dr van der Werf. C'est cette approche qui avait été développée en 1997 avec les premiers virus H5N1 apparus à Hong Kong et qui a permis la mise au point d'un vaccin aviaire. Néanmoins, en raison de l'existence de mutations nouvelles sur le virus, l'ensemble de la procédure - qui prend au moins deux à trois mois - doit être à nouveau validée.
Le 2 février, alors qu'aucune mesure de restriction des voyages n'avait été recommandée par l'OMS, un premier cas humain suspect (peu probable mais pas impossible) a été rapporté en Allemagne. Une femme qui revenait de Thaïlande a été hospitalisée à l'unité de médecine tropicale de Hambourg en raison de l'apparition de symptômes de grippe. Le Dr Kurth, responsable de la Santé publique en Allemagne a déclaré qu'« il n'existe aucun moyen d'empêcher l'infiltration de la grippe aviaire dans le pays ».
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