Le plan de riposte de la Csmf, qui n’a pu obtenir la hausse du C sans conditions, comporte une menace de grève des gardes et astreintes, mais seulement à compter du 3 avril, un soutien aux médecins libéraux qui appliquent unilatéralement des majorations d’honoraires et le gel des relations avec les caisses.
APRÈS L’ÉCHEC de la septième séance de négociation tarifaire, la Csmf a déterré la hache de guerre afin de «ne pas laisser bafouer (son) honneur». Pour autant, elle ne désespère pas de fumer bientôt le calumet de la paix. «Nous ne faisons pas la guerre pour la guerre, mais pour l’accord», souligne le leader de la confédération.
Michel Chassang a exposé le plan de riposte de son organisation jusqu’à l’assemblée générale de la Csmf des 25 et 26 mars, qui remettra en jeu son mandat de président et prendra, le cas échéant, «d’autres initiatives» pouvant aller jusqu’à la «dénonciation de la convention». En attendant, la Conf’ dépose un préavis de «grève des gardes et astreintes non payées à partir du 3avril».
Cette grève illimitée concernera donc les gardes des médecins généralistes les samedis entre 8 et 20 heures (seule tranche horaire encore non couverte par le dispositif de rémunération de la permanence des soins), ainsi que les gardes et astreintes non payées des spécialistes dans les services d’urgence des cliniques privées, en semaine et les week-ends. «Nous accepterons les réquisitions préfectorales moyennant finances», précise le Dr Chassang. Pour le reste, la Csmf demande que «l’hôpital assume le relais puisque ses praticiens sont payés pour ça». En outre, la Csmf incite les praticiens libéraux à «ne plus travailler à l’oeil» dans les instances liées à leurs missions transversales (CME des établissements, comités de lutte contre les infections nosocomiales…).
« Pompe à sous ».
Par ailleurs, la Csmf va «faciliter le parcours de soins» qu’elle «soutient pleinement», même si l’assurance-maladie l’ «a détourné de l’esprit originel (et) transformé en pompe à sous» du fait de la diminution des remboursements de 2 à 2,5 euros en dehors du parcours depuis le 1er janvier 2006. La première centrale syndicale de médecins libéraux dénonce les «dossiers impayés et bloqués» dans les caisses, ainsi que les «erreurs de remboursement», parfois au détriment des médecins eux-mêmes lorsqu’ils pratiquent le tiers payant pour les patients en CMU, dont «50% n’ont pas choisi de médecin traitant». «Désormais, tout doute sera profitable aux patients: nous cocherons la case MTU (cas d’urgence) et reviendrons sur cette mesure quand les caisses auront remis de l’ordre dans leurs affaires», a déclaré le Dr Chassang.
La confédération a réitéré son mot d’ordre de «gel de toutes les relations avec les caisses» (commissions conventionnelles, rendez-vous avec les délégués de l’assurance-maladie et les médecins-conseils). La Csmf se garde de lancer des consignes de dépassements tarifaires qui la placeraient dans l’illégalité ; mais elle réaffirme qu’elle «comprend les médecins qui prennent les majorations prévues par la convention» (soit 1 euro supplémentaire sur les consultations spécialisées coordonnées et majoration de 3 euros pour les consultations généralistes destinées aux enfants de 2 à 6 ans).
Ces mesures de pression visent à avancer l’entrée en vigueur d’une augmentation du C à 21 euros (avant la date du 1er septembre proposée par les caisses), mais surtout à supprimer la clause qui conditionne cette revalorisation à la réalisation de nouveaux objectifs de maîtrise médicalisée pour 2006. La clause est à l’origine du « clash » survenu entre le directeur de l’assurance-maladie et les trois syndicats médicaux signataires de la convention, dans la nuit du 10 au 11 février. Pour la Csmf, il s’agit d’un «contrat de dupes». «La maîtrise comptable est partie par la porte [en 2002, ndlr] , on ne va pas la laisser rentrer par la fenêtre! Sinon, le rationnement des soins n’est pas loin», a expliqué le Dr Chassang.
Il dénonce «l’entêtement» de l’assurance-maladie, et «en premier du gouvernement», qui prennent les médecins «pour des gogos» dès lors qu’ils tentent de reporter la hausse de la consultation généraliste «à la saint-glinglin». «Nous ne reviendrons pas à la table des négociations, a prévenu le président de la Csmf, tant qu’on restera figé sur le principe d’opposabilité (des résultats de la maîtrise). »
Le SML se défend de pénaliser les patients
Le Syndicat des médecins libéraux (SML) souligne que son « opération grève du zèle », prévue à compter du 28 février, « n’a pas pour but de pénaliser les patients, ni de les prendre en otage ». Au lendemain de la suspension des négociations conventionnelles, le SML avait annoncé cette grève du zèle qui consiste pour les médecins « à travailler trente-cinq ou trente-neuf heures aux tarifs de l’assurance-maladie et à demander un complément d’honoraire au-delà de ces horaires ». Le SML assure que les dépassements des médecins libéraux « ne s’appliqueront que sur un horaire limité – les patients ayant été informés au préalable –, seront modérés, ne seront pas demandés aux patients couverts par la CMU et peuvent être remboursables par les mutuelles et les assurances complémentaires en fonction de leur contrat ». La perspective de ces « compléments d’honoraires » et des nouvelles majorations tarifaires appliquées unilatéralement avec le soutien de la Csmf avait fait réagir trois organisations de patients et d’usagers (« le Quotidien » du 16 février). Le Ciss (Collectif interassociatif sur la santé), la Fnath (accidentés de la vie) et l’Unaf (associations familiales) avaient « dénoncé avec force la tendance, toujours plus importante de certains syndicats ou coordinations, à prendre en otage les usagers du système de soins afin de peser dans une négociation avec l’assurance-maladie ».
De son côté, la branche généraliste de la Fédération des médecins de France (FMF-G) dénonce « ces mots d’ordre venus de la stratosphère pathétique des syndicats signataires ». Elle précise qu’elle « ne s’associera pas à ses mots d’ordre déconnectés de la réalité de terrain et n’ira à la bagarre que pour obtenir les 23 euros qui reviennent de droit aux généralistes ».
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