L'AFER, QUI A DÉCIDÉ de ne pas proposer ce produit, résume en quelques mots la face cachée du Perp : « Faut-il souscrire un Perp simplement à cause de la déduction fiscale ? Réfléchissons : si vous avez besoin de votre argent avant la retraite, si vous voulez choisir entre un capital et une rente viagère, si vous voulez transmettre votre épargne à vos enfants, la réponse est non. Souscrivez plutôt une assurance vie. »
N'oubliez pas que le Perp est un « produit retraite : il recueille vos économies, sans limite de montant, via des versements réguliers ou non. Pour vous, l'objectif est d'obtenir, au moment de la retraite, un revenu régulier jusqu'à la fin de vos jours. Un revenu d'ailleurs généralement surévalué par la plupart des promoteurs ; en effet, son évaluation repose sur les tables de mortalité actuelles. Or, dans dix ou vingt ans, l'espérance de vie aura augmenté. En outre, il ignore une inflation qui pourrait réapparaître bientôt. On peut opter pour une rente réversible : si vous décédez, la rente continuera à être versée à un bénéficiaire désigné, le conjoint par exemple, à 100 % ou moins, selon votre choix. Mais, bien entendu, cette option n'est pas gratuite et ampute la rente.
La limite du Perp est donc là : c'est un produit dit « tunnel » car il n'y a pas de sortie possible avant la retraite, et il vous oblige à abandonner tout espoir de transmettre cette partie de votre épargne à votre descendance.
L'économie d'impôts n'est pas énorme.
Reste l'argument phare du Perp : la réduction d'impôts. En effet, les versements sur le Perp sont en effet déductibles du revenu imposable, et ne seront imposés qu'à leur sortie, quand vous serez retraité. Plus vous gagnez en tant qu'actif, plus le Perp semble fait pour vous. Exemple : vous déclarez 50 000 euros et votre taux d'imposition est de 42,62 %. En versant 2 000 euros, vous économisez 852 euros. Votre effort d'épargne réel est alors de 1 148 euros.
Mais cet avantage fiscal doit être relativisé, puisqu'une fois que vous serez à la retraite, la rente sera imposée comme une pension de retraite, c'est-à-dire pour 72 % de son montant en tenant compte des abattements.
Votre banque évoquera très certainement une baisse de votre taux marginal d'imposition quand serez à la retraite. Faites le calcul : il ne baisse pas autant que vous l'espérez en raison des revenus retirés du patrimoine et surtout de la diminution du nombre de parts du foyer fiscal (perte notamment des enfants à charge).
De plus, les sommes déductibles sont plafonnées à 10 % des revenus d'activité professionnelle (après abattement de 10 %) dégagés en année N-1, avec un maximum de 8 fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (Pass) de l'année précédente. Soit un plafond de 23 770 euros pour les versements effectués en 2004.
Pour les contribuables sans revenus professionnels, notamment les conjoints sans emploi, il existe même un plancher : 10 % du Pass, soit 2 971 euros pour les versements effectués en 2004.
Mais surtout, attention : cette enveloppe est commune avec d'autres formules. Les sommes versées par le salarié dans un plan prévu par l'article 83, sur la Préfon ou sur un contrat Madelin viennent ainsi minorer le disponible fiscal. Il en va de même pour les cotisations de l'employeur sur un plan article 83 ou de son abondement au Perco (Plan d'épargne retraite collective).
Bref, assurez-vous du montant réel d'économies réalisées tant aujourd'hui (risque d'empiètement avec votre contrat Madelin par exemple quant au disponible fiscal) qu'à l'heure de la retraite (simulation de vos revenus et de votre tranche d'imposition à cette date).
Perp ou assurance vie ?
A bien y regarder, le Perp est donc bien moins alléchant que ne le laissait supposer la dernière publicité de votre banque. A tel point même que l'on se demande s'il ne vaut pas mieux, selon les bons conseils de l'Afer, lui préférer d'autres produits de placement, comme l'assurance vie.
Un contrat d'assurance vie permet de se constituer un capital pour la retraite en se conservant la possibilité de transmettre un jour, à des tiers, la part du capital non utilisée. Avec un bon contrat, vous pouvez récupérer votre capital à n'importe quel moment, le plus souvent avec une fiscalité faible après huit ans. D'après les simulations faites par le journal « Investir », à conditions égales, l'épargnant qui choisit d'opérer des retraits partiels chaque année sur son contrat d'assurance vie peut obtenir des revenus identiques à ceux retirés d'un Perp pendant vingt à quarante ans tout en conservant la disponibilité du capital.
Vous pouvez également convertir le capital de votre assurance vie en rente viagère. Cette dernière sera fiscalisée sur 40 % de son montant si vous la déclenchez entre 60 et 69 ans, et seulement sur 30 % à compter de 70 ans, contre 72 % dans le cadre du Perp. Mais malgré cette fiscalisation plus faible à la sortie, si on se réfère aux simulations d'« Investir », toujours à conditions égales, les rentes retirées d'un Perp sont supérieures à celles versées à partir d'un contrat d'assurance vie. Cela est dû à l'avantage fiscal à l'entrée sur un Perp. On peut en effet considérer que les sommes investies sont supérieures à celles versées sur un contrat d'assurance vie à condition bien entendu d'y verser l'argent économisé en impôts. Ainsi, un versement de 1 000 euros sur un Perp correspond (si on tient compte de l'avantage fiscal) à un versement de 1 237 euros sur un contrat d'assurance vie si son taux marginal est de 28,26 % et de 1 743 euros si le taux marginal est de 42,62 %
Aussi, sauf à être très lourdement imposé sur le revenu ou incapable de s'occuper de son épargne pour ses vieux jours, avantage à l'assurance vie avec retraits partiels au gré des besoins.
Perp ou PEA, voire PEP ?
Qu'en est-il des autres placements ? Le Plan d'épargne en actions (PEA) qui offre la possibilité de sortir en rente viagère non imposable après huit ans de détention (sauf prélèvements sociaux), doit être utilisé avec prudence si l'on souhaite transformer son capital en rentes car les fonds prudents (fonds profilés ou monétaires) réduisant le risque à l'approche de la retraite, sont peu nombreux.
Il n'en va pas de même pour le Plan d'épargne populaire (PEP). Si l'on ne peut plus en souscrire depuis septembre 2003, on peut continuer à alimenter les anciens plans jusqu'à 92 000 euros de versements. Ils peuvent aussi être transférés chez un autre assureur, notamment en passant d'un PEP bancaire à un PEP assurance pour profiter des abattements successoraux de l'assurance vie.
Son principal atout : la possibilité de transformer, après huit ans, le capital en rente viagère défiscalisée, toujours en dehors des prélèvements sociaux sur une fraction de son montant. Le PEP constitue donc un vrai produit « populaire » par rapport au Perp, que vous devez conserver obligatoirement si vous en détenez un.
Perp ou contrat Madelin ?
Créés en 1994, les contrats Madelin sont des produits d'assurance vie avec une sortie obligatoire en rente viagère. Laquelle est fiscalisée au régime des pensions, après abattement de 10 et 20 %.
En dépit d'une obligation de versement, modulable toutefois dans un rapport de 1 à 10, le contrat Madelin dispose de quatre avantages sur le Perp :
- son fonds en euros sera plus rentable à court ou moyen terme (investissements dans les actifs généraux des compagnies, composés d'anciennes obligations rapportant plus que les taux obligataires actuels bas qui vont garnir le fonds en euros du Perp). Seule une remontée brutale des taux d'intérêt pourrait inverser la tendance ;
- la gestion financière n'y est pas encadrée (pas de grille de répartition des fonds à respecter à l'approche de la retraite comme sur un Perp) ;
- les bons contrats Madelin fixent le taux de rente à la souscription, et non à la liquidation de la retraite comme sur un Perp. De quoi se garantir de meilleurs revenus, compte tenu de la hausse de l'espérance de vie ;
- le plafond de déductibilité fiscal est supérieur à celui du Perp. Il reprend le plafond général, auquel peut s'ajouter 15 % de la fraction du bénéfice (BNC) compris entre une et huit fois le plafond de la Sécurité sociale. Si le conjoint ne travaille pas, il est intéressant de jouer la complémentarité avec le Perp (contrat Madelin pour le médecin libéral et Perp pour son conjoint), qui donne une possibilité complémentaire de déduire du revenu imposable du foyer fiscal 2 971 euros au maximum en 2004.
Avantage donc au contrat Madelin.
Perp ou Perco ?
Le Perco (Plan d'épargne retraite collectif) est issu de la loi Fillon. Il s'agit d'une épargne salariale à horizon retraite exclusif, mis en place dans les entreprises de façon facultative. Les salariés l'alimentent en y versant, au choix, leur participation, leur intéressement, leur épargne personnelle ou les avoirs en provenance d'un autre plan d'épargne salariale. L'employeur peut compléter les versements du salarié (y compris la participation) par un abondement, plafonné au triple du versement du salarié et à 4 600 euros par an.
Côté souplesse, le Perco gagne haut la main. Parmi les cas de déblocage anticipé du capital avant la retraite, figurent l'acquisition de la résidence principale ou la situation de surendettement. Si elle est prévue dans le Plan, la sortie en capital est aussi possible au terme, sans imposition des intérêts, hors prélèvements sociaux.
Côté fiscalité, en revanche, le résultat est plus mitigé. Certes, si vous sortez en rente, elle sera moins imposée que celle du Perp, puisque sa fiscalité est dégressive selon votre âge lors de son entrée en service. En revanche, vos versements ne sont pas déductibles de l'impôt sur le revenu.
Perp ou plan « article 83 »
Un plan de retraite « article 83 » est un contrat d'assurance vie collectif avec sortie obligatoire en rente viagère. La cotisation peut être partagée entre l'entreprise et le salarié. Elle est alors déduite de son salaire brut et n'est donc pas imposable.
Une fois à la retraite, l'ex-salarié demandera la conversion de ce capital en rente viagère, réversible ou non. L'épargne accumulée est définitivement acquise au salarié, quelle que soit son évolution de carrière et même s'il quitte l'entreprise. Voilà donc un produit de retraite très intéressant pour le salarié, notamment si la prise en charge patronale de la cotisation est totale. Les produits financiers dégagés sont capitalisés sur le plan article 83 en franchise de toute taxe.
Et puis, en cas de décès avant la mise en service de la rente, l'épargne revalorisée est transmise au(x) bénéficiaire(s) désigné(s) par le salarié ou à défaut à ses héritiers, selon la fiscalité de l'assurance vie. La rente, elle, est imposable comme une pension de retraite et soumise à charges sociales, à l'instar du Perp.
Certes, l'accès à un plan article 83 dépend du bon vouloir de l'employeur. Mais la loi Fillon va peut-être enclencher une nouvelle dynamique, puisqu'un plan article 83 peut désormais être éligible au Perp. On parle alors de Pere (Plan d'épargne retraite entreprise). Le salarié a la possibilité d'épargner librement et de déduire sa cotisation de son disponible fiscal. Dans ce cas, le Pere sera soumis aux règles de sécurisation progressive de l'épargne.
Avantage au plan article 83 notamment pour le conjoint collaborateur.
Le Perp vous intéresse malgré tout ? Montrez-vous sélectif et sachez qu'en cas de mauvais choix, vous avez trente jours pour récupérer votre argent, frais compris, en envoyant à l'assureur une lettre de renonciation.
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