SI LES TROUBLES induits chez l'enfant par une dépression du post-partum chez la mère sont désormais bien cernés - troubles sociaux, comportementaux, cognitifs et physiques -, qu'en est-il des éventuels troubles de l'humeur paternels en période postnatale ? Pour répondre à cette question, l'équipe du Dr Paul Ramchandani (Oxford) a analysé le devenir d'enfants suivis dans la région de l'Avon depuis 1991 (étude Alspac : Avon Longitudinal Study of Parents and Children). Dans les huit semaines suivant la naissance d'un enfant, les parents étaient contactés par téléphone afin de préciser l'existence de symptômes dépressifs autant chez la mère que chez le père à l'aide d'une échelle d'évaluation Epds (Edinburg Postnatal Depression Scale). Au total, sur la population analysée, les auteurs ont estimé que 13 351 mères et 12 884 pères souffraient de dépression postnatale. Près de 10 % des mères et 4 % des pères étaient atteints de dépression grave (score Epds supérieur à 12). Sur ce nombre, 8 431 pères et 11 833 mères ont pu être réévalués au moment des 21 mois de l'enfant. L'équipe du Dr Ramchandani a pu obtenir des données de développement pour 10 024 des enfants sélectionnés du fait de l'existence d'un syndrome dépressif chez l'un des parents. Pour cela, les membres de l'équipe ont interrogé les mères et soumis les enfants à des tests psychomoteurs adaptés aux enfants en âge préscolaire.
Troubles comportementaux.
Il ressort de ce travail que la dépression paternelle postnatale est significativement associée à une majoration des troubles comportementaux à l'âge de 3 ans et demi. Ces enfants souffrent plus souvent que les petits témoins de troubles émotionnels ou de la conduite et d'hyperactivité. Les garçons semblent plus souvent que les filles affectés par les troubles dépressifs de leur père : leur risque de troubles comportementaux est 5,26 fois plus élevé que pour les filles. Ces garçons auraient un risque nettement plus élevé que les filles de troubles des conduites et d'hyperactivité, mais ne seraient que très légèrement plus sensibles aux troubles des émotions (tristesse, inquiétude). L'étude britannique confirme l'effet de la dépression maternelle sur les troubles du comportement dans les trois domaines étudiés : émotions, conduites, hyperactivité. Dans ce cas, les enfants des deux sexes sont concernés de façon similaire. Le lien entre dépression paternelle postnatale et troubles du développement chez l'enfant persiste même après ajustement pour les signes de dépression tardifs chez le père et de dépression postnatale chez la mère.
L'interaction père-enfant.
Les auteurs avancent plusieurs hypothèses pour étayer leur travail. Comme entre mère et enfant, il pourrait exister un effet direct de la dépression paternelle sur l'interaction père-enfant. Un conflit parental en rapport ou non avec les symptômes paternels pourrait aussi influer sur le développement de l'enfant. Enfin, la piste génétique ne peut pas être écartée.
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