Les peptides natriurétiques (BNP et NTproBNP) sont des marqueurs biologiques utiles au diagnostic de l'insuffisance cardiaque. Plusieurs études ont démontré qu'ils étaient aussi des marqueurs du pronostic de cette pathologie. Plusieurs études évaluent si une adaptation du traitement de l'insuffisance cardiaque en fonction des valeurs obtenues lors de leur dosage régulier permet d'améliorer le pronostic de l'insuffisance cardiaque. L'étude TIME CHF n'est pas en faveur de cette stratégie thérapeutique.
LORSQU'IL y a une augmentation des pressions ventriculaires gauches, le ventricule synthétise et sécrète des peptides natriurétiques dont deux sont communément dosables dans le plasma : le BNP et le NTproBNP. Plusieurs études ont montré que le dosage de ces peptides constitue une aide au diagnostic d'insuffisance cardiaque dans les situations d'urgence où le diagnostic n'est pas d'emblée évident. Dans le guide ALD de la HAS de mars 2007 concernant l'insuffisance cardiaque symptomatique chronique, la seule place reconnue au dosage des peptides natriurétiques est celle du doute diagnostique. Toutefois, dans des travaux de recherche, il a été montré que les taux de peptides natriurétiques, dosés lors d'une hospitalisation pour insuffisance cardiaque ou lors de la sortie du milieu hospitalier, constituent des marqueurs puissants du pronostic. Plusieurs spécialistes de l'insuffisance cardiaque ont envisagé que le dosage régulier des peptides natriurétiques pourrait être un moyen utile d'adapter le traitement de l'insuffisance cardiaque, conduisant à majorer les posologies lorsque les peptides natriurétiques restent élevés afin d'améliorer le pronostic. Deux études sont en faveur de cette hypothèse : l'étude française STARS BNP ayant inclus 220 patients et l'étude BATTLESCARRED ayant inclus 308 patients. L'étude TIME CHF semble remettre en cause cette stratégie.
L'étude TIME CHF.
Trial of Intensified Versus Standard Medical Therapy in Elderly Patients, conduite en simple aveugle chez 499 insuffisants cardiaques symptomatiques et ayant une élévation du NTproBNP, avait trois objectifs principaux. Celui qui a été rapporté lors de ce congrès était l'évaluation des effets d'un traitement intensifié afin d'abaisser le NTproBNP, par rapport à une approche plus standardisée. L'objectif dans le groupe évalué était d'obtenir un NTproBNP inférieur à 400 pg/ml chez les patients de moins de 75 ans et un de moins de 800 pg/ml chez ceux ayant 75 ans et plus. Les deux autres objectifs étaient, d'une part, d'évaluer les modalités de prise en charge de l'insuffisance cardiaque des sujets âgés de plus de 75 ans comparativement à celle des patients plus jeunes (de 60 à 74 ans) et, d'autre part, de comparer les modalités de prise en charge et le pronostic de l'insuffisance cardiaque selon que la fraction d'éjection est inférieure ou égale à 45 % ou supérieure à 45 %. Le résultat présenté montre qu'avec un suivi moyen de 18 mois, il n'y a pas eu de différence pronostique entre les deux groupes de patients comparés (risque relatif pour le critère primaire : 0,92 ; p = 0,46).
Limites.
Cette étude semble donc remettre en cause une stratégie de surveillance régulière des peptides natriurétiques pour guider la thérapeutique de l'insuffisance cardiaque. Elle apporte des renseignements importants pour la pratique mais ne permet pas de conclusion absolue. Les taux de NTproBNP ont diminué de façon quasi similaire dans les groupes comparés, que le traitement ait été adapté à la connaissance du NTproBNP ou non. Cet élément constitue une limite importante de la stratégie évaluée puisque les taux de NTproBNP peuvent donc spontanément varier indépendamment de l'ampleur du traitement administré. Le taux d'hospitalisation pour insuffisance cardiaque a été significativement moindre dans le groupe de patients dont le traitement a été ajusté sur la connaissance du NTproBNP, indiquant donc un bénéfice possible de cette stratégie. Enfin, le pronostic des patients ayant moins de 75 ans a été significativement meilleur lorsque leur traitement était ajusté à la valeur du NTproBNP, ce qui n'a pas été le cas, avec même une altération symptomatique chez les patients de 75 ans au moins. La stratégie reposant sur la surveillance régulière des taux de peptides natriurétiques pourrait ainsi avoir un effet clinique en fonction de l'âge des patients.
Implications.
La surveillance des peptides natriurétiques en ambulatoire et l'ajustement du traitement en fonction de leurs valeurs ne modifient pas le pronostic global de l'insuffisance cardiaque. Les données de la science sont actuellement trop peu nombreuses et concordantes pour que le traitement de l'insuffisance cardiaque soit guidé par le dosage régulier des peptides natriurétiques.
D'après la communication de Hans-Peter Brunner-La Rocca. Trial of Intensified (BNP-guided) Versus Standard (symptom-guided) Medical Therapy in Elderly Patients with Congestive Heart Failure TIME-CHF.
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