CINEMA
DE NOTRE ENVOYEE SPECIALE RENEE CARTON
L E travail du jury du 54e festival de Cannes a été « difficile ». C'est sa présidente qui l'a elle-même avoué, en expliquant ce qui apparaît évident : « Ce que j'aime, un autre membre du jury peut le détester, et ce qu'il admire peut m'emplir de colère ».
Alors sans doute un ou plusieurs jurés ont-ils détesté « la Pianiste », le dérangeant film de l'Autrichien Michael Haneke inspiré d'un roman d'Elfriede Jelinek. Mais comment ne pas admirer l'extraordinaire travail d'Isabelle Huppert, dans un rôle difficile que toute autre qu'elle aurait pu rendre odieux voire ridicule ? Le prix d'interprétation féminine s'imposait. L'actrice a remercié avec malice « Bach, Schubert et Mozart » tout en reconnaissant avoir dû tourner des « scènes dures ». Elle a souligné le caractère « novateur » du film, qui a sans doute valu à son réalisateur (remarqué à Cannes avec « Funny Games » et qui avait un peu déçu avec « Code inconnu ») le Grand prix du jury.
Lequel a continué à manifester son enthousiasme pour ce film, sans doute le plus excitant du festival avec « De l'eau tiède sous le pont rouge », de Shohei Imamura, en accordant le prix d'interprétation masculine à Benoît Magimel. A propos de ce dernier, on rappelle toujours qu'il fut le jeune héros de « la Vie est un long fleuve tranquille », en oubliant de parler de rôles plus récents et forts, ceux des « Voleurs », de « Selon Matthieu » ou du « Roi danse », par exemple.
De l'audace donc, mais celle-ci à ses limites. « La Chambre du fils », le dernier opus, émouvant mais sans surprise, de Nanni Moretti, était annoncé comme la palme d'or 2001. Il l'eut donc, et le réalisateur, qui avait décidé de venir aussi souvent que possible à Cannes jusqu'à obtention de la récompense suprême, s'en réjouit, surtout content quand on lui dit « que ce film est très dur et très doux ».
Les Américains, qui avaient réjoui les festivaliers avec le dessin animé « Shrek », ne sont pas absents du palmarès, puisque David Lynch (« Mullholand Drive ») et Joel Coen (« The man who wasn't there ») se partagent le prix de la mise en scène. Là non plus, l'audace n'est pas au rendez-vous. Pas plus que dans le prix du scénario à Danis Tanovic pour « No man'land », un premier film qui aurait mérité mieux. Quant à la consolation accordée aux deux films taiwanais (« Millenium Mambo », de Hou Hsiao-hsien, et « Et là-bas, quelle heure est-il ? », de Tsai Ming-liang), sous la forme d'un prix spécial pour la meilleure contribution technique, on se demande à quels remords cinéphiliques elle correspond.
On regrettera l'absence au palmarès de « Kandahar », de Mohsen Makhmalbaf, du merveilleux « Va savoir » de Jacques Rivette, de « la Chambre des officiers », de François Dupeyron ou de « De l'eau tiède sous un pont rouge » (Imamura a déjà obtenu deux fois la palme d'or, il est vrai). Mais Liv Ullmann nous l'a dit, le travail du jury est « difficile ». Et finalement, on est bien content de ne pas être à sa place.
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