Les ministères de l'Intérieur et de l'Education nationale ont finalement cédé : la décentralisation dans l'Education nationale ne concernera ni les assistants sociaux, ni les conseillers d'orientation, ni les psychologues, ni... les médecins scolaires. Seuls les personnels d'accueil, de restauration, d'hébergement et d'entretien des établissements (les fameux « TOS ») vont passer sous la coupe des départements.
Les médecins scolaires, mobilisés depuis trois mois contre leur propre transfert (« le Quotidien » du 31 mars), poussent un ouf de soulagement. Ils n'auront pas suivi onze jours de grève en vain.
Pour les uns, c'est une victoire, pour les autres, la bataille est loin d'être gagnée. Aux yeux des médecins rassemblés au sein du SNMSU (Syndicat national des médecins scolaires et universitaires-UNSA Education), la question semble résolue. « Le gouvernement, note le syndicat dans un communiqué, revient sur une décision qui n'aurait jamais dû être prise (...) . Les médecins vont pouvoir reprendre normalement leurs activités, participer aux diverses réunions et commissions, transmettre les avis et certificats médicaux, les enquêtes et les statistiques. »
« Attention aux illusions », tempère cependant le Dr Pierrette Salvaing, du SMEDEN-FO (Syndicat des médecins de l'Education nationale Force ouvrière,) qui dit ne « pas partager du tout l'enthousiasme de ses collègues ». « Tant que le projet de loi est maintenu, le risque existe. »
Deux points soulèvent les craintes du SMEDEN-FO. Premièrement : l'annonce de la mise en place de groupes de travail pour la création de « services régionaux d'information et d'orientation », alors même que les conseillers d'orientation semblaient eux aussi épargnés par la décentralisation. « Pourquoi les vingt départements qui ont déjà demandé, à titre expérimental, de se charger de la santé scolaire ne proposeraient-ils pas de mettre en place ces services d'orientation ? On risque de voir revenir par la fenêtre ce que l'on a vu partir par a porte », estime le Dr Salvaing.
Par ailleurs, un article additionnel qui viendrait se glisser devant l'article 50 du projet de loi de décentralisation inquiète les médecins du SMEDEN-FO. Il énonce que « l'Education est un service public dont le fonctionnement est assuré par l'Etat, sous réserve des compétences attribuées aux collectivités territoriales pour les associer au développement de ce service ». Une « réserve » qui, bien sûr, titille le SMEDEN-FO.
Solidaires des TOS
Du reste, qu'ils soient totalement ou moyennement satisfaits de leur sort, les médecins scolaires n'imaginent pas pour autant abandonner le dossier de la décentralisation. « Nous défendons une certaine conception de l'équipe éducative, explique le Dr Marie-Lucie Gosselin, secrétaire générale du SNMSU ; or les TOS, qui représentent neuf dixièmes de cette équipe, vont être transférés aux départements. Pour eux, le dialogue doit continuer avec les pouvoirs publics. » Le Dr Marie-Blandine Basalo, du SNAMSPEN (Syndicat national autonome des médecins de santé publique de l'Education nationale), estime de son côté que « le gouvernement a cherché un moyen d'avoir la paix au moment du bac. Mais régler le sort de 10 000 personnes sur les 100 000 concernées par la décentralisation dans l'Education nationale, ce n'est rien du tout. »
Autre cheval de bataille du SMEDEN-FO : les retraites. « Nous avons fait nos calculs, explique le Dr Salvaing. Du fait qu'il y a beaucoup de femmes médecins scolaires, qu'elles ont en moyenne trois à quatre enfants et donc travaillent souvent à temps partiel et prennent des congés parentaux, du fait aussi que nous terminons nos études très tard et que nos salaires sont pourtant bien moins élevés que ceux de la plupart des médecins, nous obtenons une retraite équivalente au SMIC. »
La guerre n'est donc pas finie, du moins du côté des médecins FO. « On a gagné une première manche, souligne le Dr Basalo, et c'était absolument dans l'intérêt des élèves. Et puis, nous aurons au moins réussi à changer l'image archaïque de notre métier et à le faire valoir. La médecine scolaire est un outil français très performant, qui a failli être cassé. »
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