QUE VOUS HABITIEZ dans la capitale ou que vous y soyez de passage, vous regarderez sans aucun doute où vous posez les pieds après avoir lu le « Guide du Paris des faits divers, du Moyen Age à nos jours » (1).
Réalisé par Serge Garde - qui a obtenu le grand prix de littérature policière en 1998 pour son roman « Sans homicide fixe » - avec Valérie Mauro et Rémi Gardebled, l'ouvrage se présente comme une balade, d'arrondissement en arrondissement, dans plus de huit cents lieux, rues, avenues, places ou impasses qui ont été le théâtre de faits plus ou moins sanglants. Que l'on flâne au hasard des pages ou que l'on suive la piste d'un prédateur célèbre, on découvre ainsi un Paris des larcins, des crimes, des événements surprenants et des catastrophes pas toujours naturelles.
Il s'agit d'une vraie découverte car la ville gomme les traces de ses traumatismes ; si, au Moyen [229]ge, on rasait la maison du criminel, comme pour mieux exorciser le crime, les restructurations urbaines ont amplifié le phénomène. On cherchera ainsi en vain la rue des Marmousets - effacée par la construction de l'Hôtel-Dieu -, où l'on venait de loin pour acheter de délicieux pâtés confectionnés par un maître pâtissier, avec la chair des clients trucidés par le voisin, barbier de son état !
Une balade hors du commun et un Paris inédit - capitale du sang, des larmes et parfois du sourire, en plus de mille faits très divers.
« le Livre noir des serial killers » (2) est composé de sept biographies de tueurs en série, depuis Peter Kürten, exécuté en juillet 1931, jusqu'à Gary Ridgway qui a été condamné à la réclusion à perpétuité en décembre 2003.
Ils sont buveur de sang comme Peter Kürten, « le vampire de Düsseldorf » ; meurtrier et violeur de femmes âgées et de jeunes filles à l'image d'Albert De Salvo, « l'Etrangleur de Boston » ; meurtrier d'enfants et de prostituées tel Arthur Shawcross, « le monstre de Rochester » ; acharné à créer des esclaves sexuels en injectant de l'acide dans le crâne de ses victimes encore vivantes, avant de les étrangler, de les violer et de les démembrer comme Jeffrey Dahmer ; nécrophile et cannibale comme le géant Admund Emil Kemper, « l'ogre de Santa Cruz » ; assassin de prostituées comme Gary Ridgway (qui, avec 48 victimes officiellement reconnues, est à ce jour le serial killer le plus prolifique de l'histoire du crime américain) ; ou routards du crime, nécrophiles, adeptes de la crucifixion à la façon des amants Ottis Toole et Henry Lee Lucas. Mais tous démontrent le même appétit de destruction, la même volonté de puissance et de contrôle de la victime, ainsi que l'absence du moindre remords. Des fantasmes noirs auxquels se mêlent les mots de la souffrance.
Mais entrons sans plus tarder dans le vif du sujet et la fiction, avec « le "best of" des maîtres du polar » (3), une anthologie qui réunit vingt-six histoires de mystère et de suspense par les maîtres d'aujourd'hui et ceux qui les ont inspirés.
Lawrence Block a en effet demandé à treize auteurs de premier plan - dont lui-même, qui a reçu le titre de « Grandmaster » des Mystery Writers of America - de choisir, d'une part, leur histoire préférée parmi leurs propres œuvres et, d'autre part, parmi les œuvres d'autres auteurs importants, l'histoire qui les a le plus aidés à forger leur propre univers. Il en a résulté les « couples » suivants : Mary Higgins Clark-Edgar Allan Poe ; Doug Allyn-William Bankier ; Joe Gores-John Russell ; Reginald Hill-Robert Louis Stevenson ; Edward D. Hoch-Stanley Ellin ; Clark Howard-Jack Ritchie ; Evan Hunter-Robert Turner ; Stuart Kaminsky-l'auteur, anonyme de « la Mort du colonel Thoreau » ; Sharyn McCrumb-Saki ; Joyce Carol Oates-Edgar Allan Poe ; Ian Rankin-Mat Coward ; Carolyn Wheat-Susan Glaspell ; Lawrence Block-Fredric Brown.
Puisqu'il est question des maîtres de la littérature policière, signalons la parution, dans de nouvelles traductions, de deux romans de Patricia Cornwell, qui donnent plus de 25 % de texte inédit dans « Postmortem » (4) - le premier roman de Patricia Cornwell mettant en scène le célèbre médecin-légiste Kay Scarpetta, qui incarne à la fois le professionnalisme glacé des salles d'autopsie et l'émotion à fleur de peau d'une femme qui est le dernier témoin de la féroce démesure des bourreaux - et plus de 20 % dans « Mémoires mortes » (5).
Ces traductions sont signées Andrea H. Japp, qui porte la double casquette scientifique et littéraire : née à Paris, elle a obtenu une maîtrise de génétique à l'université de Paris-VII ; elle est titulaire d'un diplôme de bactériologie de l'Institut Pasteur et d'un doctorat en biochimie ; elle a également obtenu un Ph.D. en toxicologie au MIT (Massachussets). Puis elle est entrée en littérature avec le prix Cognac, remporté en 1991 pour « la Bostonienne » et elle a publié depuis une quinzaine de romans.
L'abécédaire.
BELLET Harry : « l'Affaire Dreyer ». C'est un premier roman et son auteur, journaliste au « Monde » spécialisé dans l'art contemporain, n'est pas un familier des scènes de crime. Mais on aime ce livre parce que non seulement il met en scène un anti-héros : un assureur-détective, baroudeur désabusé et romantique, mais aussi parce qu'il nous entraîne, après le meurtre d'un marchand de tableaux voleur, escroc et arnaqueur des plus grands et plus riches collectionneurs, dans les coulisses de ce monde très fermé de l'art qui cristallise des appétits de pouvoir dont l'enjeu ne se limite pas à l'amour de l'art. On l'aime aussi surtout, peut-être, parce que le récit est librement inspiré d'un fait divers authentique ; une piste à suivre... (NiL éditions, 266 p., 18 euros).
GRANOTIER Sylvie : « Cette fille est dangereuse ». Comédienne, traductrice, auteur de scénarios, écrivaine, Sylvie Granotier est de ces touche-à-tout de talent que l'on envie. Après les romans « Double je » et « Le passé n'oublie jamais », elle a choisi la nouvelle et propose ici dix histoires de filles fatales, chacune à leur manière.
Il y a la cinglée qui tue en regardant ailleurs, la femme idéale dont la perfection pousse au meurtre, celle qui résiste et celle qui s'accroche jusqu'à la catastrophe, la mère indigne et la mère criminelle, la fille qui vous veut du bien et qui vous fait du mal, celle qui vous invite au rêve et vous plonge en plein cauchemar... Moralité des histoires : de l'ordinaire à la folie, il n'y a qu'un pas ! (Albin Michel, 231 p., 16 euros).
GRIPPANDO James : « A l'abri de tout soupçon ». Il a été avocat pendant douze ans et maintenant qu'il se consacre à l'écriture - il a été révélé au public en 1995, avec son best-seller « le Pardon » -, il met en scène un avocat, Jack Swyteck.
Un héros qui a tout pour lui, l'argent, le renom, une belle femme et qui n'a pas grand mal à prouver l'innocence de son ex-petite amie accusée d'escroquerie à l'assurance. Tout aurait dû se terminer pour le mieux si l'on n'avait retrouvé sa cliente les veines ouvertes dans la baignoire de Jack.
Entre arnaques, meurtres et infidélités conjugales, un polar efficace et psychologique dans lequel un avocat devenu accusé doit prouver son innocence (Belfond, 368 p., 20,60 euros).
PEARL Matthew : « le Cercle de Dante ». Voulez-vous goûter une enquête à la fois littéraire et criminelle ? Alors, ce roman est pour vous, qui nous ramène dans le Boston de l'année 1865, où un tueur en série inflige à ses victimes des supplices inspirés de « l'Enfer » de Dante. Devant l'impuissance de la police, quatre poètes qui ont entrepris de traduire « la Divine Comédie » se transforment en détectives. A leur suite, nous pénétrons dans les coulisses feutrées de Harvard, mais aussi dans les bas-fonds sordides du port de la ville.
Diplômé lui-même de Harvard et de Yale et couronné par la Dante Society of America pour ses travaux de recherche sur le poète florentin avant d'écrire ce premier roman, Matthew Pearl décrit ici, au-delà de l'intrigue policière, le choc culturel entre la vieille Europe humaniste et l'Amérique puritaine ; et il amène le lecteur à constater que les fantasmagories de Dante sont plus réalistes qu'il n'y paraît : les terrifiants supplices qui jalonnent le livre ont d'étranges échos dans les souvenirs des rescapés de la guerre de Sécession (Robert Laffont, 404 p., 21,50 euros).
RICK Francis : « la Discipline du diable ». Entré en écriture il y a près de cinquante ans et dans la Série Noire il y a quarante ans, Francis Ryck poursuit son parcours d'auteur novateur, en marge du simple polar.
Il nous plonge ici dans le huis-clos d'une cavale : dans le wagon spécial d'un train de nuit qui transfère des détenus d'une prison à une autre. Parmi ceux-ci, il y a Jean, qui purge une longue peine pour braquage et meurtre. Une détention qui doit prendre fin dans quelques heures, puisque sa femme a organisé son évasion. Mais rien ne se passe comme prévu car le facteur humain se joue des meilleurs plans.
Sans artifices ni complaisance, l'auteur explore la mécanique malade de l'enfermement, lorsqu'elle se heurte au fantôme de la liberté (L'Archipel, 185 p., 14,95 euros).
WILSON Robert : « Meurtres à Séville ». Une enquête à double tranchant. En pleine dépression nerveuse après la rupture d'avec sa femme, l'inspecteur principal Falcon va sombrer encore plus en découvrant que les meurtres qu'il a à résoudre - des personnes ligotées, les paupières découpées, devant une télévision allumée, le visage déformé par l'horreur - sont liés à son père. Celui-ci a atteint la célébrité en peignant, trente ans auparavant, alors qu'il était à Tanger, quatre splendides tableaux de nus, qui ne ressemblent en rien à ce qu'il a peint par la suite. Il découvre aussi que son père était un fasciste de la pire espèce. Et comprend alors qu'il ne fera sortir le serial killer de sa tanière qu'en exhumant les secrets sanglants de son passé (Robert Laffont, 504 p., 23 euros).
La cuisine du crime
Livre de choix pour tout fin gourmet amateur de polars, « Meurtres à table » est un manuel de cuisine puisqu'il rassemble 101 recettes de bon aloi, mais aussi un livre à déguster car il contient 34 nouvelles policières.
Réalisé par Andrea C. Busch, membre de la section allemande « Sisters in Crime », il conjugue ainsi jalousie meurtrière, appétit étrange pour le meurtre avec le plaisir de manger et la connaissance de la bonne chair.
Les auteurs des récits sont du monde entier et les recettes groupées sous des rubriques aux titres expressifs : Liquides fatals, Hors-d'œuvres funestes, Potages sataniques, Pasta Mortale, Plats diaboliques, Doux péchés, Mortelles tartelettes et autres Menus meurtriers et Buffets barbares.
Des illustrations cocasses en noir et blanc de Bengt Fosshag sont à l'unisson des textes. Un super cadeau empoisonné !
>>>Éditions Gerstenberg/La Joie de Lire, 365 p., 24,90 euros.
Arsène et la comtesse
Depuis sa création au début du siècle dernier, Arsène Lupin ne cesse de séduire et d'intriguer ; c'est pour répondre aux questions que se posaient les lecteurs sur l'origine et les débuts du gentleman-cambrioleur que Maurice Leblanc a décidé d'écrire « la Comtesse de Cagliostro », publié ici avec de nombreuses photos du film que vient de réaliser Jean-Paul Salomé avec, notamment, Romain Duris et Kristin Scott Thomas.
On voit ainsi comment, tout jeune, Arsène Lupin sauve la vie de l'aventurière qui deviendra en même temps que sa maîtresse passionnée une dangereuse rivale dans la course à un trésor caché dans un lieu tenu secret depuis la Révolution française. La comtesse se disait fille, ou petite-fille, ou arrière-petite-fille, du célèbre Joseph Balsamo, qui prétendait au XVIIIe siècle avoir trouvé l'élixir de longue vie ; c'est Arsène Lupin qui n'a pas pris une ride !
>>>>Éditions de Fallois, 294 p., 15 euros.
Sherlock Holmes encore
Holmesiens, à vos lunettes ! Voici, pour la première fois réunis en un volume en français sous le titre « Etudes en noir », les 12 textes « manquants » du Canon qui mettent en scène le célèbre héros d'Arthur Conan Doyle.
On savait, depuis « le Problème du pont de Thor » -, l'un des soixante récits qui forment ce que l'on appelle depuis longtemps le Canon - qu'une mystérieuse malle en fer blanc appartenant au Dr Watson et enfouie sous les voûtes de la banque Cox & Co, à Charing Cross, contenait des papiers, des notes, des dossiers inédits concernant les divers problèmes qu'eut à résoudre le grand détective. En voici le contenu, constitué de nouvelles, de poésie, de théâtre, de souvenirs,de curiosités littéraires, autant de textes qui permettent de mieux connaître le héros, sa vie, son œuvre.
>>>Éditions de l'Archipel, 283 p., 18,95 euros.
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