L’ATTITUDE de chacun des candidats après le crime odieux commis contre l’école juive de Toulouse ne pouvait être complètement extraite du contexte électoral. Nicolas Sarkozy a prononcé deux discours, touchants et remarquables, qui servaient forcément sa cause. De la réaction des autres candidats, y compris celle de Marine Le Pen, qui, toutes affaires cessantes, a voulu condamner un crime affreux pour ne pas prêter le flanc à la moindre accusation, dépendait leur statut politique. Car la France tout entière, y compris celle qui nourrit des sentiments d’intolérance, a éprouvé assez de chagrin pour de dresser unie contre un assassinat d’enfants. « Nos » enfants, comme l’a si bien dit le chef de l’État : personne n’aurait compris, lundi, qu’il ne consacrât pas tout son temps à une tragédie qui endeuille tout le pays. On peut le soutenir ou le haïr, il demeure, pour quelques semaines encore, le président et joue son rôle de président dans un contexte de chagrin et de consternation.
Bayrou s’exprime, Juppé riposte.
La plupart de ses rivaux ont parfaitement compris que l’école juive de Toulouse n’était pas le lieu des récriminations, des sous-entendus ou des critiques obliques. La plupart, mais pas tous : François Bayrou a cru bon de se distinguer en établissant un lien entre les divisions entretenues par le pouvoir, selon lui, et les assassinats. On veut bien qu’il occupe le haut du pavé en matière de vertu, mais pas nécessairement à l’occasion d’un drame dont M. Sarkozy n’est pas responsable, qu’il s’agisse de militaires froidement abattus ou d’enfants juifs éliminés par un bourreau sans âme. Les propos de M. Bayrou lui ont valu une verte riposte d’Alain Juppé, qui a parlé de récupération, ce que d’autres n’oseraient pas dire, à propos d’un homme qui fait de l’éthique son arme politique mais que l’ambition aveugle risque souvent de le faire sombrer. Tirer en toute occasion sur M. Sarkozy ne fera pas une bonne campagne, et tous ont beau nous dire que l’antisarkozysme seul ne saurait conduire à la victoire, c’est quand même l’antisarkozysme qu’ils utilisent, plutôt que la lecture ennuyeuse de leurs programmes.
CRITIQUER SARKOZY PENDANT UN DEUIL NATIONAL, C’EST ROMPRE LA COMMUNION DU PAYS
De son côté, Dominique Voynet (EELV) reproche au président sortant d’avoir tenu aux élèves d’une autre école, avec lesquels il a partagé la minute de silence décrétée mardi dans tous les établissements, des propos où il les a prévenus que les crimes auraient pu être commis dans l’enceinte de leur école. Il s’agit sûrement d’une forte déclaration, dure à entendre pour des enfants, mais on n’éliminera pas l’antisémitisme si on n’habitue pas les gens, et surtout les mineurs, à raisonner par analogie. On n’est ni juif, ni noir, ni musulman par choix personnel. On naît ainsi et n’importe qui risque de porter le fardeau de l’intolérance dès sa naissance sans jamais pouvoir, ou vouloir, s’en débarrasser.
Pourtant, lundi, il y a eu un moment de grâce douloureuse et de communion nationale autour d’un deuil. Nos dirigeants ont su mesurer le poids d’un drame soudain, brutal, imprévisible. Et on aurait souhaité que le chagrin public pacifiât la campagne. S’il n’a pas fallu vingt-quatre heures pour que réapparaissent les vieux réflexes politiciens, on imagine ce qui va se passer dès cette semaine. On dira que M. Sarkozy pouvait mieux faire. Il mettra au défi ses adversaires de montrer de quoi ils sont capables en pareille circonstance. Quand il aura perdu, quand l’un ou l’autre l’aura remplacé, le jeu de quilles reprendra dans l’autre sens. C’est indigne.
C’est seulement si l’assassin masqué récidive une fois ou plusieurs fois, ou s’il fait des émules, qu’il influencera la campagne. Les enquêtes d’opinion à venir mesureront cette influence. Pour le moment, on ne perçoit aucune évolution sensible des intentions de vote. François Hollande, qui, lors du drame, a adopté une position exemplaire, a compris qu’il est inutile d’en rajouter. En effet, ce n’est pas à cause de M. Sarkozy si Eva Joly occupe le bas du plamarès. Ce n’est pas la faute de M. Sarkozy si Jean-Luc Mélenchon arrache des suffrages à M. Hollande. Ce n’est pas M. Sarkozy qui maintient François Bayrou à l’étiage de 13 %, ou moins, alors qu’il continue à nous dire qu’il est le seul à pouvoir battre M. Hollande au second tour sans sembler se souvenir qu’il y a un premier tour, apparemment infranchissable pour le candidat du MoDem.
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