L A direction du « British Medical Journal » a délibérément accepté de publier une étude randomisée critiquable sur le plan de la puissance statistique pour ouvrir le débat.
Le fameux enregistrement systématique du rythme cardiaque ftal durant 20 minutes, réalisé à l'admission d'une femme en cours de travail, pourrait-il être remplacé par un doppler cardiaque au moment d'une contraction ? Telle est la question que soulèvent les résultats de l'étude, très critiquée, de l'hôpital de Tayside en Angleterre. On comprend pourquoi.
L'arrivée du monitoring du rythme cardiaque ftal, apparu dans les années 1970, a amélioré la détection de l'hypoxie ftale et a réduit la morbi-mortalité périnatale par rapport à l'auscultation intermittente avec le stéthoscope de Pinard ou un système d'écho-Doppler manuel. Cette supériorité est évidente dans le cas d'une grossesse à risque, mais le bénéfice n'est certainement pas aussi marqué pour toutes les grossesses alors que le monitoring à l'admission en salle de travail est maintenant systématique.
Aucune complication obstétricale
L'équipe du Dr Mires, à Tayside, s'est précisément intéressée au devenir d'enfants, nés de femmes ne présentant aucune complication obstétricale, selon le mode de surveillance du cur ftal choisi à l'entrée : monitoring de 20 minutes ou Doppler cardiaque pendant et immédiatement après une contraction.
L'objectif primaire de l'étude portait sur la comparaison de la fréquence des cas d'acidose métabolique (pH<7,2) par prélèvement du sang artériel du cordon. Les objectifs secondaires comprenaient des critères cliniques néonataux (score d'Apgar, transfert en soin intensif...) et chirurgicaux (césarienne, rupture chirurgicale des membranes...).
Puissance statistique insuffisante
Au total, 3 752 femmes enceintes ont été randomisées pour avoir soit l'une, soit l'autre méthode de surveillance. C'est là le principal défaut méthodologique de l'étude : ce nombre ne permet pas d'atteindre une puissance statistique suffisante, car la prévalence de l'acidose du cordon est faible (4 %). Les résultats obtenus sont néanmoins intéressants : la prévalence de l'acidose métabolique est identique dans les deux groupes. En revanche, les femmes monitorées à l'entrée sont significativement plus souvent placées sous surveillance ftale continue durant le travail, ont plus souvent une épidurale ou une césarienne.
Autre point intéressant :à l'admission, 21,5 % des rythmes cardiaques ftaux étaient considérés comme anormaux (bradycardie ou trouble de la variabilité) avec le monitoring cardiaque contre 3,6 % dans le groupe Doppler .
Il est certain que l'interprétation d'un enregistrement cardiaque ftal est opérateur dépendant et qu'il est difficile de prendre une décision devant une modification de la variabilité cardiaque, le Doppler présente ici l'avantage de supprimer ce second paramètre. « Devant une anomalie du monitoring, les équipes obstétricales ont tendance à intervenir pour des souffrances ftales qui n'en sont pas, expliquent les auteurs. Cela aboutit à une augmentation de 5,5 % de gestes obstétricaux (forceps, ventouse et 1,5 % de césariennes) avec des conséquences non négligeables chez les mères. » Une meilleure interprétation du monitoring cardiaque permettrait peut-être de résoudre le problème.
Gary Mires et coll., « Brit Med Journ», vol. 322, 16 juin 2001.
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