LES JEUNES iraient plutôt «très bien». C'est ce qui ressort du baromètre Bien-être réalisé par IPSOS-Santé. Les résultats de cette enquête sont jugés «plutôt positifs» par Laïla Idtaleb, de l'institut de sondage. «Les adolescents sont parfois sous pression (42 %), mais ils déclarent avoir beaucoup d'amis, se sentir bien à l'école… ils parlent avec leurs parents et, surtout, ces chiffres sont stables depuis quatre ans.»
Une constante aussi : le décalage entre le discours des adolescents et le regard plus pessimiste que portent sur eux les adultes. «La notion de risques ne leur est pas étrangère, mais ils en minimisent certains néanmoins, comme la consommation ponctuelle d'alcool ou le grignotage.»
Ces résultats ont soutenu les débats de la 4e édition du Forum adolescences qui a réuni plusieurs centaines de lycéens et de spécialistes à Paris toute la journée de mercredi.
Demandeurs d'« éducation à la santé ».
C'est la fondation Wyeth pour la santé de l'enfant et de l'adolescent qui organise ces rencontres depuis quatre ans.
Cette année, à Caen, à Bordeaux, à Montpellier, à Lyon et à Paris, quinze classes de quinze lycées ont participé aux réflexions autour des «libertés» des jeunes, à travers le prisme de la santé, des solidarités et des autorités. Soit plus de cinq cents élèves, s'est réjoui le Pr Claude Griscelli, qui préside la fondation Wyeth.
Une seconde enquête, elle aussi commandée par la fondation Wyeth et réalisée auprès de huit cents ados, montre que la majorité d'entre eux (73 %) sont demandeurs d'une «éducation à la santé». Les adolescents mettent au premier rang de ce qui leur paraît important pour leur santé l'hygiène et la propreté, puis viennent le sommeil, le moral, les relations avec les amis, l'alimentation, la pratique sportive et les relations familiales.
Le risque qui est décrit comme le plus élevé est la prise de drogues et les rapports sexuels non protégés. Le Dr Dinah Vernant, qui est responsable de l'espace santé jeunes de l'Hôtel-Dieu, s'est adressé aux jeunes de la salle. «Vous êtes assommés par des messages de prévention et d'interdiction très angoissants (SRAS, vache folle, sida…) . Malheureusement, on vous fait peur sans pour autant vous donner les moyens concrets de vous protéger.C'est le rôle du médecin de vous rassurer. Aux infirmières et aux médecins scolaires de vous donner des éléments concrets de compréhension. Ils doivent pouvoir, par exemple, vous dire pourquoi et comment la prise de certaines substances est dangereuse pour le cerveau. Quand vous étiez enfants, vos parents n'attendaient pas que vous tombiez malades pour vous emmener chez le pédiatre, rien que pour s'assurer que vous poussiez bien! Et puis à l'adolescence, tout s'arrête. Plus personne ne s'occupe de vous au moment où tous les changements surviennent dans votre corps. Nous avons constaté, par exemple, que 60% des jeunes que nous voyons dans nos consultations manquent de fer. Il est important de voir son médecin avant même que ça aille mal.»
Halte à la «prévention à outrance»!, ont semblé rétorquer les jeunes du plateau. «Le témoignage d'une personne qui serait passée par la drogue ou l'alcoolisme et qui viendrait nous en parler sera plus efficace que les conseils d'un médecin», estime Igor, lycéen à Deauville. «L'identification au vécu, à l'expérience elle-même et non pas à l'évitement de cette expérience me paraît intéressante, souligne Caroline Thompson, psychanalyste et thérapeute familiale, car la prise de risque fait tout de même partie des grandes aventures de l'adolescence. Mais l'un (le témoignage d'un ancien toxicomane) n'empêche pas l'autre (la consultation médicale) .»
«Il n'y a pas de vérité scientifique, a pour sa part tranché le Pr Bruno Falissard, directeur de l'unité INSERM U699 santé mentale de l'adolescent, pour faire la distinction entre le pathologique et le normal. Le mot clé, c'est la souffrance. Et, ensuite, on use de petites astuces. Je donne aux jeunes des éléments de comparaison. Par exemple, je leur explique que fumer une cigarette de cannabis par jour revient à boire une bouteille de vin. Après, c'est à eux de prendre leurs responsabilités.»
Pas de message moralisateur.
Le ministère de la Santé était représenté par la responsable de son pôle jeunesse, Isabelle Altmayer-Barnier. «Nous avons entendu que vous ne voulez pas de messages condescendants ou moralisateurs. C'est dans cet esprit que nous avons souhaité présenter le plan Santé des jeunes il y a près d'un mois, qui s'appuie sur l'autonomie et la responsabilité.»
Les adolescents interrogés au cours de l'enquête ont déclaré considérer le médecin comme le meilleur interlocuteur pour cette éducation à la santé (à 69 %), devant les parents (41 %). À condition de ne pas être le médecin de famille, qui «nous connaît depuis que l'on est petit». La profession est pourtant «en voie de disparition», a lancé une médecin scolaire de la région parisienne. Le rôle des infirmières pourrait être amélioré, commente Laïla Idtaleb, «car elle s'intéresse à l'adolescent dans sa globalité». Ce dont se targue la fondation Wyeth, qui, au terme de ses cinq ans d'existence, durée pour laquelle elle avait été initialement conçue, décide de s'offrir une deuxième vie.
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