L 'ASSURANCE-MALADIE cherche à sensibiliser médecins et pharmaciens au problème des génériques.
L'annonce à la une d'un grand journal du soir, dans son édition de samedi dernier, que la France accusait un retard très important dans le développement de ce type de produits, ressortit à cette stratégie. Il s'agit de montrer que la situation est préoccupante, et qu'il est inacceptable que notre pays occupe l'une des dernières places, comme le dit encore cet article, dans la hiérarchie des nations, pour le développement des génériques.
A l'appui de cette démonstration, deux études (1) précises qui montrent que notre pays a encore beaucoup d'efforts à faire pour rejoindre les autres.
La première, GENERICAM, insiste sur le fait que si le marché du générique a progressé entre 1999 et 2000, en passant en valeur de 2,4 % à 3,1 % de l'ensemble des médicaments remboursés, on est toujours loin du compte.
« Les taux annuels moyens montrent nettement la progression du marché des médicaments génériques », écrivent le experts de l'assurance-maladie. Cependant, malgré cette augmentation notable entre 1999 et 2000, « il convient de remarquer que les médicaments génériques ne sont très peu délivrés dans l'absolu : au mieux, ils comptent pour 3,5 % du marché (en décembre 2000, en montant présenté au remboursement) ».
En nombre d'unités, c'est-à-dire en volume, la statistique est meilleure, puisque, en 2000, 5,9 % des boîtes de médicaments vendues en officines et présentées au remboursement, étaient des génériques. En 2000, « en montant présenté au remboursement, commente encore la CNAM, les génériques ont compté pour près de 2,8 milliards de francs, alors que le médicament remboursable, dans son ensemble, se chiffre à plus de 89,2 milliards de francs ».
5 milliards d'économies sur deux ans : c'est possible
Or, l'on sait que le gouvernement dans le plan médicament qu'il a présenté au mois de juin (« le Quotidien » des 7 et 11 juin), compte beaucoup sur les génériques pour réussir à contenir la progression des dépenses de médicaments remboursés par la Sécurité sociale. « Les résultats sont insuffisants », commentait d'ailleurs à l'époque Elisabeth Guigou, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité.
Les résultats de l'étude de la CNAM montrent que le commentaire de la ministre n'était pas exagéré.
Pour GENERICAM, en tout état de cause, comme pour d'autres experts, la politique des génériques devrait au moins aboutir à faire économiser, sur deux ans, 5 milliards de francs. Lorsque l'on sait que le plan présenté par Elisabeh Guigou et Bernard Kouchner en juin tablait sur une économie totale de l'ensemble des mesures, et pas seulement celle concernant le générique, de 2,5 milliards environ, on s'aperçoit de l'importance des statistiques de la CNAM. Reste à savoir si cette économie de 5 milliards est réaliste. Pour les experts de l'assurance-maladie en tout cas, cette économie de 5 milliards sur deux ans pourrait être assez facilement obtenue si les médicaments référents étaient vendus au prix moyen des génériques, ou encore si les génériques étaient aux médicaments princeps. En 1999 comme en 2000, explique l'étude de la CNAM, « les groupes Dextropropoxyphène paracétamol Di-Antalvic 30 mg/400 mg, fénofibrate Lipanthyl 200 mg et Gliclazide diamicron 80 mg se détachent : ils auraient pu jouer chacun pour une économie de 80 millions de francs annuels si les médicaments de référence avaient été vendus au prix moyen de leurs génériques respectifs ». Ce qui fait encore dire à la CNAM que 22 groupes génériques (sur 219, soit 10 %) « créeraient 50 % de l'économie réalisable. Autrement dit, en concentrant les actions autour de ces groupes, il serait possible d'économiser 2,5 milliards » par an.
En fait, sans l'écrire aussi clairement, l'assurance-maladie préconise une intervention ciblée auprès des professionnels de santé, et notamment des médecins et des pharmaciens, concernant en priorité ces vingt-deux groupes génériques.
L'exemple de la Marne
En tout état de cause, l'action auprès des professionnels de santé est, aux yeux des responsables de la CNAM, déterminante pour une percée des génériques.
En effet, selon une deuxième étude rendue publique sur ce thème et qui fait le point sur la pénétration de ces médicaments dans les diverses régions, on note que, dans deux départements, la Meuse et la Marne, le taux de pénétration des génériques (c'est-à-dire la prescription ou la délivrance de génériques dans une classe thérapeutique où il existe précisément ce genre de spécialités) est supérieure à 40 %, alors qu'en Corse et à Paris, départements qui ferment la marche, il atteint respectivement 14,6 % % et 17,8 %.
L'assurance-maladie fait remarquer qu'en Meuse et dans la Marne des actions importantes d'information auprès des professionnels de santé, pharmaciens d'officine et prescripteurs ont été entreprises. C'est la Marne d'ailleurs qui, en accord avec les professionnels de santé, a expérimenté la prescription sous forme de DCI. Un exemple qui, semble-t-il, a inspiré les pouvoirs publics puisqu'Elisabeth Guigou, dans le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale, va introduire un article légalisant désormais, mais sans la rendre obligatoire, cette forme de prescription.
Mais, aussi intéressantes qu'elles soient, ces deux études ne permettent pas, et on le regrettera, de savoir si le droit de substitution accordé au pharmacien « marche », comme se plaisent à le dire les organisations d'officinaux. Cependant, note la CNAM, en ce qui concerne la substitution, « il est impossible en l'état de mesurer ce phénomène ». Les « données statistiques n'appréhendent que le résultat de la délivrance finale par le pharmacien, que cette délivrance provienne d'une prescription de génériques par le médecin ou d'une substitution par le pharmacien ».
(1) GENERICAM, les chiffres clés des médicaments génériques remboursés par le régime général en 1999 et en 2000.
Médicaments génériques : une analyse en termes de disparité.
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