T ROP de jeunes sont en marge du système de protection maladie, souligne une enquête de l'Institut national d'études démographiques (INED)*, portant sur 290 hommes et 171 femmes, dont 172 étrangers, âgés de 16 à 24 ans, sans domicile ou en situation précaire fréquentant, en 1998, les services d'aide de Paris et de la petite couronne. Pour cette population, il n'est pas question de parler d'état de bien-être. Si certains ont la santé, ils le doivent à leur jeunesse.
Or, plus d'un garçon sur quatre dit n'avoir ni Aide médicale gratuite, ni même une carte de Sécurité sociale utilisable. Cette situation est d'autant plus fréquente que leurs conditions de vie sont difficiles, comme l'indique l'absence de revenu ou la précarité de leur hébergement.
Les affections respiratoires, dermatologiques et psychiques sont les plus souvent citées. Par rapport à leurs camarades vivant en ménage ordinaire, les jeunes hommes de la rue se plaignent plus fréquemment de ces trois types d'affection. A côté de la morbidité déclarée, certaines informations factuelles incitent à penser que leur état de santé est moins bon que celui des autres jeunes de la population générale. Le taux relativement élevé de personnes exonérées du ticket modérateur pour affection grave ou de longue durée, deux à trois fois plus important, suggère une plus grande fréquence des maladies graves.
Le pourcentage d'individus avec des dents manquantes non remplacées, bien supérieur, témoigne de besoins non couverts. Et les multiples tentatives de suicide illustrent la souffrance psychique de ces jeunes à l'abandon, parmi lesquels 15 % sont encore en cours d'études, ont le bac ou un brevet professionnel (10 %), voire ont suivi des études supérieures (2 %).
Si un tiers disent n'avoir jamais été hospitalisés, en revanche 17 % des hommes et 26 % des femmes se sont retrouvés au moins une fois à l'hôpital au cours de l'année précédant l'enquête. Chez les adolescents de la population générale, quel que soit le sexe, ce taux oscille autour de 10 %. Pour les hommes, près d'une hospitalisation sur trois est due à un traumatisme, 14 % à un problème digestif et 13 % à un trouble psychique, dont la toxicomanie.
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Pour les femmes, les motifs sont liés à l'appareil génito-urinaire (infections, MST, IVG) et à la grossesse, qui intervient dans une hospitalisation sur deux. Les femmes sont vulnérables face aux MST : 35 % seulement d'entre elles ont eu leur dernier rapport avec préservatif. La prise de médicaments chez les hommes, dans le cadre d'un traitement médical, est plus fréquente qu'au sein de la population générale : 26 %, au lieu de 10 %. Par ailleurs, l'usage répété d'une substance illicite, autre que le cannabis, est très supérieur à ce qu'on observe dans l'ensemble de la jeunesse.
Il faut noter que l'étude de l'INED a eu lieu avant la mise en place de la Couverture maladie universelle. Celle-ci, soulignent les enquêteurs, devrait faciliter le recours aux soins des personnes sans domicile fixe, à condition, toutefois, que les jeunes « l'intègrent dans leur comportement ».
* Réalisée conjointement avec le Centre de recherche, d'étude et de documentation en économie de la santé. Tél. 01.53.93.43.17.
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