PRATIQUE
L'éducation des patients atteints de lupus systémique passe par l'explication de leur maladie en insistant sur le rôle de certains facteurs environnementaux qui peuvent participer ou favoriser des poussées de la maladie.
- Proscrire les bains de soleil et éviter les lieux où la réverbération est forte comme le bord de mer, la haute montagne.
- Eviter les sorties l'été en période du midi où le rayonnement UV est maximal.
- Se méfier de certaines protections comme le parasol qui ne bloque pas tous les UV et n'évite pas la réverbération, ou les tee-shirts blancs qui n'apportent qu'une faible photoprotection.
- Préférer les vêtements tissés serrés : coton, jean.
- Protéger le visage par un chapeau à bord large ou par une casquette à visière et préférer les manches longues et le pantalon plutôt que le short.
- Utiliser les crèmes de protection solaire d'indice maximal (> 60) qui protègent des UVB et des UVA. Pour être efficaces, ces crèmes doivent être appliquées toutes les deux heures et après chaque baignade.
- Ces conseils s'appliquent toute l'année, l'hiver la crème protectrice doit être utilisée sur les zones exposées (visage, mains).
- Le stérilet est déconseillé en cas de traitement corticoïde au long cours du fait de l'augmentation du risque infectieux.
- La pilule estroprogestative est contre-indiquée car elle favorise les poussées lupiques.
- Une contraception par progestatifs purs ou microprogestatifs peut être proposée.
- Le traitement hormonal substitutif est déconseillé chez la femme ménopausée si le lupus a une évolutivité récente ; il peut être discuté en cas de lupus ancien en rémission, notamment en cas d'ostéoporose en l'absence d'anticorps antiphospholipides.
- DHEA : elle semble avoir un intérêt dans la maladie lupique, notamment sur la minéralisation osseuse, mais des études complémentaires sont nécessaires pour confirmer ces premiers résultats.
- Eviter les médicaments photosensibilisants : topiques et par voie orale.
- Les antipaludéens de synthèse (Plaquenil et Nivaquine), qui font partie intégrante du traitement du lupus, assurent une bonne photoprotection.
Les médicaments antiépileptiques (sauf barbituriques), les bêtabloquants, certains antibiotiques, la sulfasalazine et la D-pénicillamine constituent les principaux médicaments inducteurs de lupus. Si leur arrêt doit être discuté en cas de lupus nouvellement diagnostiqué, ces médicaments ne sont pas contre-indiqués en cas de lupus connus s'ils s'avèrent nécessaires.
Le tabac multiplie par 4 à 6 le risque de lupus ; il est associé à une augmentation du risque d'ostéoporose chez la femme ; il interfère avec le métabolisme des antipaludéens de synthèse dont il peut diminuer l'efficacité.
En dehors des traitements par immunosuppresseurs comme le cyclophosphamide, la fertilité des femmes lupiques est comparable à celle de la population générale. Il n'y a pas de contre-indication à envisager une grossesse chez une femme lupique qui le souhaite si le lupus est en rémission depuis au moins six mois. On déconseille la grossesse lupique dans différentes situations qui tiennent du bon sens clinique :
- poussée récente ou actuelle ;
- corticodépendance > 1/2 mg/kg d'équivalent de prednisone ;
- traitement immunosuppresseur (à l'exception de l'azathioprine) ;
- clairance de la créatinine < 40 ml/mn ;
- protéinurie > 1 g/24 h (discussion au cas par cas) ;
- HTA sévère ;
- hypertension artérielle pulmonaire symptomatique ;
- valvulopathie mal tolérée ;
- antécédents thrombotiques majeurs ;
- infarctus cérébral de moins de 6 mois.
NB : la prise d'hydroxychloroquine ne contre-indique pas la grossesse ; il est même fortement conseillé de maintenir ce traitement durant toute la grossesse.
Lorsqu'un lupus systémique est équilibré par le traitement, le médecin généraliste doit avoir trois préoccupations pour garantir une bonne qualité de vie : dépister et prévenir les infections, prévenir l'athérosclérose accélérée, lutter contre la déminéralisation osseuse.
- Le lupus lui-même, les traitements corticoïdes et immunosuppresseurs augmentent le risque d'infection.
- Un taux de lymphocytes inférieur à 500 éléments/mm3, un taux de neutrophile inférieur à 1 000/mm3 majorent le risque infectieux : si un traitement immunosuppresseur est prescrit, en réduire les doses.
- En cas de traitement par cyclophosphamide, il est conseillé d'assurer une prophylaxie des infections opportunistes par le triméthoprime-sulfaméthoxazole.
- La vaccination antigrippale et la vaccination antipneumococcique sont conseillées en cas de traitement corticoïde au long cours ou de traitement immunosuppresseur.
- Tout épisode fébrile inexpliqué nécessite de réaliser une radiographie de thorax, un ECBU, des hémocultures, voire une échocardiographie du fait du risque majoré d'endocardite infectieuse.
- Il existe au cours du lupus systémique un processus d'athérosclérose accélérée qui ne dépend pas que des facteurs de risque cardio-vasculaires habituels.
- Les corticoïdes au long cours favorisent le développement des lésions d'athérosclérose surtout par le biais des modifications lipidiques et glucidiques qu'ils induisent.
- Contrôler le cholestérol total et les triglycérides une fois par an, demander les fractions HDL et LDL cholestérol si le cholestérol total est supérieur à 2,30 g.
- Contrôler les pouls vasculaires, rechercher un souffle vasculaire, rechercher des signes fonctionnels d'insuffisance coronarienne ou d'artériopathie oblitérante des membres inférieurs fait partie intégrante de l'examen clinique régulier de tout patient lupique.
- Corriger les facteurs de risque vasculaires existants : hyperlipidémie, diabète, hypertension artérielle, tabac, surpoids.
- L'aspirine à dose antiagrégante plaquettaire est vivement conseillée en prévention primaire des accidents thrombotiques s'il existe des anticorps antiphospholipides ; beaucoup d'auteurs proposent cette thérapeutique même en leur absence.
- Conseiller un régime riche en folates en cas d'hyperhomocystéinémie (céréales enrichies en folates).
- Les corticoïdes entraînent une déminéralisation osseuse par un mécanisme multifactoriel associant une diminution de l'absorption digestive du calcium, l'augmentation de son excrétion urinaire, un hypogonadisme, une hypersensibilité à la PTH, mais surtout par l'excès d'apoptose des ostéoblastes.
- On observe dans les six premiers mois d'une corticothérapie par voie générale une diminution de la densité minérale osseuse de l'ordre de 3 à 8 %. Ensuite, le rythme se ralentit, la perte osseuse se poursuit à un rythme d'environ 3 % par an.
- Maintenir une activité physique quotidienne de 30 à 60 minutes par jour en favorisant les sports en charge.
- Favoriser une alimentation riche en calcium (laitage, eau, Contrex, Talians et Hépar), maintenir un régime pauvre en sels même pour de faibles posologies de corticoïdes (limite à la fuite urinaire du calcium).
- Signaler le risque de mauvaise tolérance digestive du calcium afin de modifier la prescription au besoin en trouvant une forme galénique mieux tolérée.
- Proposer un bisphosphonate chez les sujets à risque s'il est envisagé une corticothérapie à des doses supérieures ou égales à 7,5 mg/jour pendant au moins trois mois.
- Eviter la prise simultanée de calcium et de bisphosphonates (interférence dans l'absorption, laisser plus de 2 heures d'intervalle).
- Limiter les facteurs de risque d'ostéoporose associés : suppression de l'intoxication tabagique, alcoolique.
- Le traitement hormonal substitutif est déconseillé chez la femme lupique sauf lupus ancien et en rémission depuis plusieurs années (discussion au cas par cas en fonction du rapport bénéfice/risque).
- Associer un traitement par biphosphonates* en cas de facteurs de risque d'ostéoporose associés, ou si antécédents de fracture ou de tassement survenus après un traumatisme minime ou spontanée, ou si ostéopénie densitométrique.
- En cas d'hypertension artérielle, utiliser de préférence l'hydrochlorothiazide 25 mg/j qui réduit la fuite urinaire du calcium liée aux corticoïdes (contrôler la calcémie car les thiazides peuvent révéler une hyperparathyroïdie normocalcémique).
- Tout mettre en uvre pour faire de l'épargne cortisonique : réduire les doses et les durées d'attaque, rechercher la dose minimale efficace, envisager rapidement des traitements de seconde ligne.
- Densitométrie initiale, puis tous les 18 mois chez le sujet à risque.
Lorsque le lupus est contrôlé et mis en rémission, il convient de réaliser tous les 6 mois quelques examens simples pour dépister toute rechute infraclinique et s'assurer de la bonne tolérance des médicaments.
Surveillance biologique d'un lupus systémique (à faire tous les 6 mois lorsque le lupus est en rémission) :
- NFS, VS, CRP ;
- Urée, créatinine ;
- Glycémie ;
- Bandelette urinaire ;
- CH50 ;
- Anti-DNA natifs (Farr ou ELISA) ;
- si néphropathie connue :
protéinurie des 24 heures ;
compte d'Addis ;
protidémie, albuminémie ;
ionogramme ;
- bilan lipidique une fois par an.
D'après « Détecter les maladies systémiques auto-immunes » par Eric Hachulla et Pierre-Yves Hatron, collection « Consulter-Prescrire ». Un coédition « le Quotidien » - Masson.
* Tous n'ont pas l'AMM dans l'ostéoporose avérée.
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