L’étude monocentrique INHERIT a duré 12 mois. Contrôlée, en double aveugle, elle a inclus 133 adultes atteints de cardiomyopathie hypertrophique (CMH), randomisés 1/1 losartan 100 mg/j (n = 64) versus placebo (n = 69). Le critère de jugement principal était une diminution de l’hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) à l’IRM (ou au scanner, si le défibrillateur est implanté). L’IRM limitait le nombre de patients nécessaires pour détecter un changement de la masse du VG› 12 g/m2. Les critères de jugement secondaires évaluaient les évolutions suivantes : symptômes, fibrose du VG à l’IRM (rehaussement tardif au gadolinium) ou à l’écho, épaisseur de la paroi du VG, fonction diastolique, débit VG, tolérance à l’effort.
Étaient exclus : l’HTA non contrôlée, les valvulopathies, l’insuffisance rénale (car CI l’IRM au gadolinium), l’alcoolisation septale récente (‹6 mois), les traitements par IEC ou AA2.
À un an, l’étude ne montre aucune variation significative de la masse du VG (1 g/m2), de l’épaisseur de la paroi (1 mm), du gradient après manœuvre de Valsalva, de la fibrose (3 %), du pic de VO2. La tolérance du traitement par losartan est bonne. Il y peu d’effets secondaires (groupe losartan : 1 angiœdème, 1 hyperkaliémie ; groupe placebo : 2 morts subites).
Dans l’HTA où l’HVG est secondaire à une augmentation de la post-charge, les AA2 ou les IEC diminuent la fibrose et l’HVG (2,3,4).
Tester le losartan versus un placebo est éthique dans la CMH : l’HVG est ici due à une maladie génétique sans traitement actuel connu. Le rationnel de l’étude est solide. Des études précédentes (chez la souris transgénique [5], chez des patients porteurs d’une CMH [6]) suggéraient que l’angiotensine II a une action trophique et que les AA2 pourraient bloquer l’hypertrophie et la fibrose.
L’étude est sérieuse, la randomisation 1/1 respectée, le traitement bien conduit. On attendait des résultats positifs… ils sont négatifs. Même si la masse du VG semble faible (107 g/m2), l’épaisseur de la paroi maximale (23 mm, normale à 10 mm) valide l’HVG, 85 % des patients ont bien de la fibrose et l’analyse génétique (réalisée chez 80 % des patients) identifie une origine génétique dans 43 % des cas, ce qui est habituel.
L’étude a des limites : elle est monocentrique et les patients plutôt âgés (52 ans en moyenne).
Sa négativité interpelle. Est-ce la bonne posologie, la bonne population ? Le faible effet sur l’HVG s’observe-t-il chez les patients avec HTA contrôlée ? L’HVG de la CMH peut-elle régresser ? La sensibilité au losartan dépend-elle du gène responsable de la CMH ?
Axelsson, l’auteur principal, se réjouit de la bonne tolérance du losartan jusqu’alors non acquise dans les CMH : on peut désormais traiter par losartan les CMH en insuffisance cardiaque dans les formes tardives sans arrière-pensée de mauvaise tolérance. Elle note l’intérêt d’évaluer à un stade « préclinique » le losartan chez les patients génétiquement atteints sans expression clinique.
La fibrose détruit le myocarde, provoque des troubles du rythme et le décès. Elle régresse sous losartan chez la souris "CMH". Qu’en est-il chez l’homme ? L’âge des patients d’INHERIT sous-tend une longue évolution de l’HVG vers la fibrose. Traiter plus tôt pourrait-il ralentir la fibrose ? Une étude plus longue sur 4-5 ans serait sans doute intéressante.
Axelsson A et al. Lancet Diabetes Endrocrinol. 2014
(2) Solomon SD et al. Circulation 2009;119(4):530-7
(3) Penicka M et al. J. Mol. Diagn. 2009;11(1):35-41
(4) Devereux RB et al. Circulation 2004;110(11):1456-62
(5) Lim DS et al., Circulation 2001;103(6):789-91
(6) Shimada YJ et al. JACC Heart Fail. 2013;1(6):480-7
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