ANNIE PODEUR vient faire des annonces, croient savoir les organisateurs (1) des assises 2008 de l'hôpital local (aujourd'hui et demain à Renazé, dans la Mayenne). Lesquelles ? Mystère. L'attente, en tout cas, est grande, car les professionnels sont inquiets. Ils espèrent que la directrice de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS), au ministère de la Santé, saura les rassurer. «Après des années de menace de fermeture arbitraire et de méconnaissance de nos établissements –l'Élysée a demandé à rencontrer l'AGHL (1) il y a un an pour comprendre ce qu'est un hôpital local, preuve qu'on est mal connu–, les tutelles avaient fini par comprendre le rôle et les spécificités des hôpitaux locaux», expose le Dr Bruno Bouvier, généraliste exerçant en hôpital local dans l'Allier.
Un récent décret rend l'exercice médical à l'hôpital local plus attrayant (voir encadré). La loi Hôpital, patients, santé et territoires (loi HPST), que prépare Roselyne Bachelot ne remet pas tout en cause, mais elle crée de nouvelles incertitudes. «Aujourd'hui, nous attendons d'Annie Podeur une explication de texte», précise donc le Dr Bouvier.
Le projet de loi est clair sur un point : le label hôpital local devrait disparaître. Pour le reste… Beaucoup de questions sans réponse, résume le Dr Pascal Gendry, généraliste dans la Mayenne et président de l'AGHL : «Comment sera défini le territoire de santé, à partir du CHU ou des soins de proximité? Quelle garantie est apportée au premier niveau de prise en charge que l'on assure? Si l'hôpital local passe demain sous la coupe du CHU, celui-ci aura peut-être d'autres priorités –faire tourner son plateau technique, réduire son déficit. Il faut bien voir que si le directeur du CHU décide pour nous, cela découragera plus d'un généraliste exerçant en hôpital local. Il faut au contraire conforter notre rôle. La loi devrait par exemple inciter la constitution de pôles de santé et de maisons pluridisciplinaires adossés aux hôpitaux locaux. Or elle ne le dit pas.»
Du « clé en main ».
Un regret partagé par le Dr Bouvier, qui, en tant que maître de stage, est au fait des attentes des étudiants en médecine. Le généraliste affirme : «Les jeunes veulent du “clé en main”. Mettre les pieds au chaud dans une structure qui tourne, avec une équipe comme à l'hôpital général ou au CHU qu'ils connaissent bien, ça les intéresse. La maison de santé adossée à l'hôpital local, c'est une façon d'attirer et d'ancrer les jeunes en zone rurale. Il faut que la loi encourage ces initiatives de terrain. Il faut aussi que la réglementation autorise l'hôpital local à devenir terrain de stage. À la faculté, les étudiants en médecine n'entendent jamais parler de ces structures. C'est dommage.»
Les habitants, en revanche, connaissent bien leur hôpital local. Surtout les personnes âgées, qui constituent le gros de la patientèle. À Belle-Île-en-Mer, par exemple, «l'hôpital local évite bien des transferts coûteux vers d'autres établissements», observe le directeur de la petite structure, Jean-Yves Blandel. Qui s'interroge : «L'assurance-maladie fait des économies avec les hôpitaux locaux, pourquoi n'incite-t-elle pas financièrement les médecins à y exercer?» À cette question s'en ajoute une autre, plus personnelle : «L'hôpital local va-t-il conserver une relative autonomie au sein des communautés de territoire? se demande Jean-Yves Blandel. La coopération, oui, mais il faut conserver une direction de proximité. Si les médecins de Belle-Île-en-Mer ont demain pour interlocuteur quelqu'un à Vannes, cela ne marchera plus et ils arrêteront.»
Dans le rapport de force qui se profile entre patrons d'hôpital pour s'emparer de la direction des CHT (communautés hospitalières de territoire), les directeurs d'hôpital local craignent d'être les grands perdants. «Il n'y aura de communautés réussies, que les communautés souhaitées et bien vécues», prévient Philippe Gauze, secrétaire national de l'ANHL (Association nationale des hôpitaux locaux).
(1) Les Assises de l'hôpital local sont organisées par l'AGHL (Association nationale des médecins généralistes exerçant à l'hôpital local) et l'hôpital local du Sud-Ouest mayennais.
Les astreintes revalorisées
Si les généralistes regrettent que le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires ne conforte pas davantage le rôle pivot des hôpitaux locaux dans le système de santé, au moins reconnaissent-ils plusieurs avancées apportées par un décret paru le 13 décembre 2007. Ce texte revalorise leur rémunération en soins de suite. Il pose le principe du financement, pour les 3 500 généralistes qui exercent en hôpital local, de la formation médicale continue dans le cadre de leur activité hospitalière. Surtout, il reconnaît financièrement «la continuité médicale des soins auprès des patients hospitalisés». Autrement dit les astreintes, qui, auparavant, n'étaient pas payées.
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