Livres
« J' ESPERE sincèrement qu'il n'existe pas de littérature du Nord. J'espère que non, parce que j'aimerais que la littérature soit une remise en question constante et joyeuse de toutes les frontières, de toutes les identités, de
toutes les idées de race, de tribu, de pays et de nation (surtout) ». Celui qui s'exprime ainsi est Björn Larsson, « le moins connu des écrivains suédois connus », comme il le souligne lui-même et parmi les plus voyageurs
des auteurs scandinaves : ses navigations entre les mers d'Irlande et au large de l'Ecosse lui ont inspiré « le Cercle celtique » alors qu'il s'est fait historien-romancier avec « Long John Silver », le récit politiquement non
correct de la vie du fameux pirate ; mais son dernier roman « Le mauvais il » (Grasset) est un ouvrage sur la France et l'extrême-droite !
Pas de littérature du Nord, donc, mais peut-être une écriture sous influence
climatique car il faut compter avec le froid, la neige et bien sûr la lumière.
Autre écrivain du Nord et pourtant sans frontières - installé aujourd[226]hui en
Malaisie, il vient de débuter, avec « Heq », premier volume du « Chant pour celui qui désire vivre » (10/18), une grande fresque ethnologique du
peuplement inuit du Groenland - Jorn Riel. Engagé à dix-neuf ans dans une
expédition à destination du nord-est du Groenland, il y est resté seize ans et en a ramené une vingtaine de livres qui sont autant de
« racontars arctiques ».
Les personnages féminins, on les trouve dans les livres de l'écrivain scandinave Herbjorg Wassmo, qui en vingt ans d'une écriture flamboyante est
devenue le porte-parole des habitants du Nordland, cette terre désolée située à la pointe nord de la Norvège (Gaïa).
Venu du froid également, Andreï Kourkov, un des chefs de file de la jeune littérature de langue russe dont le premier roman, « le Monde de Bickford », publié à compte d'auteur, a été sélectionné en 1993 pour le Booker Prize du meilleur roman russe ; « le Pingouin » et « le Caméléon », traduits en
français (Liana Levi), continuent de décrire le monde post-soviétique avec un humour corrosif.
Sera présent également Thomas Wharton, un jeune auteur de l'Ouest canadien qui, dans son premier roman « le Champ de glace » (Rivages), best-seller
outre-Atlantique, décrit cette période charnière où les glaciers des Rocheuses disparaissent pendant que les trappeurs et Indiens de la vallée - et avec eux les mythes et histoires du campement origine - cèdent la place au flot touristique provoqué par l'arrivée du chemin de fer.
Parmi les auteurs invités dont on peut retrouver des nouvelles inédites et
des interviews dans un recueil publié à l'occasion du festival - une anthologie présentée par Michel Le Bris, l'âme d'« Etonnants Voyageurs », intitulée « Mondes blancs » (Librio) - citons encore l'Américain Trevor Ferguson, l'écrivain
sibérien éleveur de rennes, Omruvié, le Lapon Ailo Gaup ou G. J. Arnaud, l'homme de la « Compagnie des Glaces ».
Du monde entier
Comme à l'accoutumée, les stars de l'écriture seront nombreuses à Saint-Malo. Citons par exemple l'auteur de science-fiction Philip Jose
Farmer, qui, à 80 ans passés, n'a rien trouvé de plus reposant que de s'attaquer à sa propre ville, Peoria, Illinois, dans « Rien ne brûle en enfer » (Série Noire). Izet Sarajlic, le grand poète de Sarajevo dont les
textes sont traduits en plus d'une douzaine de langues. James Welch, une grande voix indienne d'aujourd'hui, auteur notamment d'un essai historique sur Custer intitulé « C'est un beau jour pour mourir » (Albin Michel) qui
revisite la bataille de Little Big Horn du point de vue indien. Et bien sûr
Scott Momaday, une légende vivante, prix Pulitzer en 1969 pour « la Maison de l'Aube et qui a été le premier à imposer la plume d'un Indien dans la
littérature américaine. Nick Tosches - qui a exercé entre autres petits boulots celui de chasseur de serpents pour le compte d'un laboratoire
pharmaceutique - l'un des auteurs majeurs de romans noirs new-yorkais, grand
connaisseur du rock'n'roll et dont la traduction de la biographie de Dean Martin, « Dino », vient de paraître (Rivages). T.C. Boyle, ex-junkie du Lower East Side, auteur d'un premier livre aujourd'hui culte, « Water
Music », premier de plusieurs best-sellers qui ont fait de lui une star (Grasset) et où le cauchemar américain devient divertissement. Arturo
Perez-Reverte, qui n'en finit pas de nous entraîner à la poursuite de trésors fabuleux (Seuil) et qui est l'auteur espagnol contemporain le plus lu au monde. Kossi Efoui, Togolais qui, après seulement deux livres, « la Fabrique des cérémonies » et « la Polka » (Seuil), est considéré comme le grand écrivain africain de demain ; il vit en exil en France depuis neuf ans...
Expos tous azimuts
Des images du froid il y en aura bien sûr, avec par exemple une exposition de photographies de Guy Le Querrec et un texte de Jim Harrison « Sur la piste de Big Foot », ou comment pendant l'hiver 1990, cent ans après le massacre de Wounded Knee, les cavaliers lakotas sont repartis sur les traces de leurs ancêtres, une chevauchée héroïque par un froid polaire dans les neiges des montagnes du Dakota. Ou bien une exposition des illustrations
originales des « Contes d'Andersen » et de « L'O du Rhin » par Arthur Rackham et Edmond Dulac, des enchanteurs du début du XXè siècle. Claudine Doury exposera des photographies des Peuples de Sibérie, une occasion unique
de rencontrer des populations autochtones dans leur mode de vie actuel, mélange de traditions toujours vives et de désespérance quant à leur avenir.
Parmi les autres expositions, un hommage à Théodore Monod réalisé grâce à son compagnon de voyage José-Marie Bel, qui regroupe photographies,
aquarelles et herbiers. Une invitation à découvrir Paul-Emile Victor dessinateur, avec pour la première fois le storyboard et le carnet de son
livre « Apoutsiak », des sérigraphies, des dessins et des photos noir et blanc de l'expédition polaire de 1936-1937...
Renseignements : www.etonnants-voyageurs.com
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