COMME GILLES DE ROBIEN, ministre de l’Education nationale, l’avait fait quelques jours plus tôt, François Goulard a affirmé que le gouvernement excluait catégoriquement la mise en place d’une sélection à l’entrée aux études médicales qui favoriserait le «bachotage, les officines privées» et augmenterait les inégalités entre les candidats.
«Il faut faire en sorte que cette première année ne soit pas exclusivement une année de sélection. Elle doit pouvoir se transformer en année d’études scientifiques donnant accès à des études médicales ou non médicales», a indiqué le ministre délégué à l’Enseignement supérieur et à la Recherche lors du colloque sur les formations des métiers de la santé organisé à Marseille en début de semaine (« le Quotidien » du 22 février).
La sélection à l’entrée aux études médicales était pourtant réclamée depuis plusieurs années par la Conférence des doyens. L’Académie de médecine recommandait également, dans un récent rapport, qu’une partie des candidats aux études médicales soient retenus dès juillet d’après les notes et les mentions obtenues au bac, et que la majorité des places soient attribuées après un concours organisé en septembre (« le Quotidien » des 1er et 2 février). Fermement opposés à une remise en cause du libre accès à l’université, les étudiants en médecine se réjouissent de la décision du gouvernement. «Il n’est pas nécessaire de mettre en place des mesures coercitives, alors que de nombreuses propositions peuvent permettre de diminuer le nombre d’inscrits en première année dans les années à venir», explique Xavier Elharrar, secrétaire général de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (voir encadré).
« Aller au bout de la réforme ».
La Conférence des doyens redoute au contraire que le flux croissant d’étudiants en P1 ne soit pas endigué rapidement. «L’ambiance actuelle avec les discussions autour du contrat de première embauche (CPE) explique la difficulté du gouvernement à prendre le sujet à bras-le-corps, analyse le Pr Bernard Charpentier, président de la Conférence des doyens. Mais il faut aujourd’hui que l’on aille au bout de la réforme des études médicales. Les politiques doivent faire le tri de toutes les propositions qui ont été faites depuis plusieurs années avec les rapports Mattei et Debouzie, et nous dire jusqu’où ils peuvent aller.» Aux ministères de la Santé et de l’Education nationale, des proches du dossier assurent que la réforme permettra d’améliorer considérablement la situation du Pcem1 qui accueille cette année près de 43 000 étudiants pour un numerus clausus fixé à 7 000. Le gouvernement entend, en effet, ouvrir une première année de «médecine, santé et science», qui permettra aux reçus-collés de se réorienter plus facilement vers des filières scientifiques et d’éviter qu’ils ne perdent deux ans en cas d’échec à concours. «L’objectif est de décloisonner les sciences et la santé. Les enseignements en médecine pourraient, par exemple, être dispensés à l’université dans d’autres lieux que les facultés déjà surchargées», indique-t-on au ministère de la Santé. En résumé, la réforme du Pcem1 doit permettre d’améliorer les conditions de travail des étudiants, mettre en place une première année validante et faciliter la réorientation des recalés vers des filières scientifiques désaffectées par les étudiants. Un groupe de travail commun aux ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, dont la composition sera connue la semaine prochaine, doit rendre des propositions d’ici à deux mois. «Il s’agira d’étudier toutes les hypothèses susceptibles de rendre plus formatrice la première année et de mettre en place le LMD à diverses professions de santé: médecine, pharmacie, odontologie, sage-femme et, peut-être, kinésithérapeutes», explique-t-on dans l’entourage de François Goulard. Ces professions de santé vont progressivement intégrer le LMD, mais d’aucuns ambitionnent que le cursus européen s’applique dès la rentrée 2007 aux études de médecine.
Les hypothèses de réforme du Pcem1
Plusieurs pistes ont déjà été évoquées pour éviter le « gâchis humain » de la première année de médecine. La Conférence des doyens prône depuis des années une sélection à l’entrée aux études médicales sur dossier avec un entretien comme cela se pratique en Angleterre ou en Israël. Une idée que le gouvernement vient de rejeter fermement.Satisfaits du maintien du concours de Pcem1, spécificité de la formation médicale française, les étudiants souhaitent cependant un aménagement de la première année. Ils demandent la généralisation du tutorat des étudiants de P1 par des carabins de 2e et 3e année. Ils réclament également une meilleure information des lycéens avant leur orientation vers la filière médicale afin de diminuer le nombre d’étudiants inscrits en première année. L’Anemf s’est par ailleurs déclarée favorable à la mise en place d’un quota d’étudiants autorisés à redoubler ou à l’instauration d’une note couperet au-dessous de laquelle les candidats ne pourraient pas repasser le concours l’année suivante. Le président de l’université de Lyon-I, Domitien Debouzie, défend pour sa part l’idée d’un concours qui interviendrait dès la fin du premier semestre universitaire, permettant d’organiser la réorientation des étudiants plus tôt qu’aujourd’hui. Toutes ces hypothèses seront examinées, parmi d’autres, par le groupe de travail des ministères de la Santé et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature