Accès aux origines pour les enfants issus d'un don de sperme, ouverture de l'assistance médicale à la procréation aux couples pacsés, ouverture du don croisé d’organes et possibilité de poursuivre, sur une base dérogatoire, des recherches sur les cellules embryonnaires, ... Le projet de révision des lois de bioéthique que le Conseil des ministres adoptera mercredi 29 septembre après son passage en Conseil d'Etat propose des évolutions, mais ne chamboulera pas le paysage législatif régissant les questions bioéthiques. A sa façon Roselyne Bachelot confirme cette prudence réformatrice en estimant que ce texte comporte « un certain nombre de dispositions innovantes, mais aucune ne vient percuter les principes cardinaux ». Il est l'aboutissement d'une longue et large concertation incluant un débat citoyen (Etats généraux de la bioéthique). L’innovation la plus importante tient sans doute à la possibilité pour les enfants issus d'un don de gamète (sperme ou ovocyte) - soit à peu près 1 300 naissances par an - d'avoir accès à leurs origines. Mais ce ne sera pas automatique: la levée de l'anonymat du donneur ne pourra en effet intervenir qu'avec l'accord de celui-ci.
Même prudence concernant l’accès à l’aide médicale à la procréation : ce droit d'accès sera ouvert désormais aux couples pacsés hétérosexuels, mais pas aux homosexuels ou aux célibataires. Le texte met d’ailleurs en exergue le caractère strictement médical des critères justifiant de recourir à la PMA. Le projet ne touche pas non plus à l'interdiction de la gestation pour autrui, le sujet si polémique des mères porteuses demeure donc hors la loi dans l’Hexagone. Pas question non plus d'autoriser le transfert d'embryon post-mortem. Les conditions de recours au diagnostic pré-implantatoire ou DPI (une quarantaine de naissances par an) restent inchangées. Aucune liste de maladies susceptibles de faire l’objet de ce diagnostic n’est définie. Retenons juste que ce diagnostic génétique est réservé aux couples ayant une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie particulièrement grave et reconnue comme incurable.
Dans un tout autre domaine, le projet de révision modifie le régime du don d’organes. Si les principes de base restent les mêmes (don anonyme et gratuit dans tous les cas), le projet de loi ouvre la porte au don croisé d'organes, une mesure qui devrait permettre de réaliser de 100 à 200 greffes de rein supplémentaires par an à partir de donneurs vivants. Jusqu’alors, la France était un des rares pays d’Europe à interdire cette pratique qui permettra à deux familles comprenant un donneur et un receveur non compatibles entre eux « d’échanger » l’organe à transplanter. Cela dans un contexte de pénurie persistante d'organes associée à des besoins croissants de greffes. A noter aussi que le prélèvement de sang de cordon à des fins de conservation autologue (pour son propre enfant) est interdit par le projet.
Autre point très attendu par la communauté scientifique, le sort réservé à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires. La loi de 2004 l'interdit, tout en l'autorisant à titre exceptionnel pour une période limitée à 5 ans, ce moratoire venant à échéance en février 2011. Le projet de révision supprime le moratoire, mais maintient le principe d'interdiction de la recherche et le régime d'autorisations dérogatoires.Dans ce contexte, il va bien entendu de soi que le clonage humain demeure complètement interdit.
Cette révision de la loi bioéthique reprend l’essentiel des préconisations des rapports remis sur le sujet: le rapport Philippe Bas du Conseil d’Etat et le rapport parlementaire Léonetti. Le projet de loi intervient avec un peu de retard, puisqu’il aurait du être discuté au début de l’été. Finalement, après son adoption lors du dernier Conseil des ministre de septembre, sa discussion au Parlement est prévue en novembre. Mais concernant le moratoire de cinq ans sur les recherches sur l’embryon qui arrive à échéance en février, une proposition de loi devrait prolonger les dispositions actuelles jusqu'à la promulgation de la loi de révision. Enfin, on relèvera que cette révision des lois bioéthiques sera la dernière à être quinquennale. A l’avenir, le législateur interviendra sans doute plus ponctuellement sur ces sujets.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature