« I L s'agissait de faire rentrer la chirurgie esthétique dans le rang. » Ce résumé d'un spécialiste de cette discipline correspond bien à l'esprit du texte défendu par Elisabeth Guigou dans le cadre du projet de loi de modernisation du système de santé qui devrait être présenté prochainement en conseil des ministres.
L'article 37 de ce projet est en effet consacré à la chirurgie esthétique et précise dans son premier alinéa, que « les structures pratiquant la chirurgie esthétique doivent satisfaire à des conditions techniques de fonctionnement ». C'est-à-dire qu'elles devront répondre, comme les autres établissements de soins, hôpitaux et cliniques en particulier, à des critères de qualité et de sécurité de leurs matériels et de leur équipement. Fini le temps, explique-t-on, où « sous prétexte que la plupart des interventions en chirurgie esthétique ne sont pas remboursées », elles se déroulaient dans des structures qui ne sont « absolument pas surveillées ».
Ces conditions techniques de fonctionnement, qui seront précisées plus tard par un décret pris en conseil d'Etat, « devront être élaborées en concertation avec la profession et être draconiennes », n'hésite d'ailleurs pas à affirmer le Dr Alain Fogli, président du Syndicat national de chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique. Il va demander à Bernard Kouchner que les professionnels concernés participent à l'élaboration de ces règles techniques qui seront déterminantes pour l'avenir de la profession.
Accréditation obligatoire
Dans le même esprit, le projet de loi précise également que ces structures devront faire l'objet d'une accréditation par l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) à l'image de tous les autres établissements de soins. A noter également que la création des structures de chirurgie esthétique sera également soumise à l'autorisation des DDASS, et qu'elle ne sera accordée que pour une durée limitée renouvelable.
Autre point important abordé par ce projet de loi : l'information des patients. Depuis l'arrêté du 17 octobre 1996 (paru au « Journal officiel » du 29 octobre 1996), le praticien est tenu, pour toute prestation esthétique dont le coût est égal ou supérieur à 2 000 F, de présenter un devis à son patient. Le projet de loi ne fixe pas de somme minimale mais précise que « la personne concernée et, s'il y a lieu, son représentant légal (notamment lorsqu'il s'agit d'un mineur, NDLR) doivent être tenus informés par le praticien responsable des conditions de l'intervention, des risques et des éventuelles conséquences et complications ; cette information doit être accompagnée d'un devis détaillé ».
Mais surtout, le texte précise « qu'un délai de quinze jours doit être respecté par le praticien entre la remise de ce devis et l'intervention éventuelle ». Une telle disposition était bien inscrite dans l'arrêté du 17 octobre 1996, mais le Conseil d'Etat l'avait annulée, sous le prétexte qu'elle était contraire à la liberté contractuelle qui doit présider aux relations entre un patient et son médecin.
Le gouvernement reprend donc l'idée, en l'inscrivant désormais dans la loi, si le Parlement l'entérine, ce qui ne devrait guère poser problème. Mais pour le Dr Fogli, cela ne fera que compliquer les relations entre le praticien et son patient. « Il faut leur laisser la liberté de discussion sans leur imposer un délai, quel qu'il soit. Il n'est pas rare que plusieurs mois s'écoulent entre la décision d'une intervention et l'intervention elle-même. Les médecins, dans leur très grande majorité, sont conscients de la responsabilité qui leur incombe en la matière. »
Enfin, on notera que dans un autre projet de loi, celui qui concerne la modernisation sociale, un amendement sera adopté par les députés et sera bientôt soumis aux sénateurs. Il prévoit que les médecins, qui ont obtenu leur diplôme avant l'application de l'internat qualifiant en 1982, et sont donc titulaires d'une compétence, notamment en chirurgie plastique et esthétique (mais aussi les diplômés en chirurgie thoracique ou en chirurgie pédiatrique), pourront solliciter, avant le 1er janvier 2002, leur inscription en tant que spécialistes, après avis d'une commission de qualification de l'Ordre.
« Une réforme indispensable pour laquelle nous avons beaucoup milité », se réjouit le Dr Fogli. D'autant plus indispensable qu'elle concerne souvent des médecins très expérimentés qui ne peuvent aller exercer dans les autres pays européens, puisque « la qualification de compétence, malgré tous nos efforts d'explication, n'est toujours pas acceptée, ni reconnue par nos voisins », ajoute le président du Syndicat national de chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique.
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