Le cancer du rein est le troisième cancer urologique, après ceux de la prostate et de la vessie. L’arrivée en 2006 des anti-angiogéniques (AAG) a radicalement modifié la prise en charge et le pronostic de ces cancers, auparavant traités par immunothérapie avec un faible taux de réponse. La médiane de survie est aujourd’hui de plus de 3 ans. Les AAG sont indiqués dans les formes métastatiques, soit d’emblée (environ 20 % des cas), soit au cours de l’évolution (30 à 40 % des cancers opérés). Ils agissent en bloquent la fabrication des néovaisseaux nécessaires à la croissance tumorale, par inhibition de la voie du Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) ou de la voie mTOR. Aujourd’hui, sept molécules ont une autorisation de mise sur le marché dans cette indication : 4 inhibiteurs de tyrosine kinase (sunitinib, sorafénib, pazopanib et axitinib), un inhibiteur du VEGF (bévacizumab, moins utilisé actuellement) et deux inhibiteurs de mTOR (temsirolimus et évérolimus).
A l’exception du temsirolimus, administré par voie intraveineuse à l’hôpital, ces molécules sont toutes prises par voie orale en continu (sauf le sunitinib, donné 4 semaines sur 6). "Il s’agit donc d’un traitement continu pris à domicile et il faut apprendre à gérer une maladie chronique", souligne le Dr Gimel, qui rappelle que si le traitement à domicile représente un vrai progrès, il faut éviter que le patient soit isolé.
L’éducation thérapeutique fait partie intégrante de la prise en charge par l’oncologue ou urologue et les patients sont informés dans les détails des effets secondaires de ces médicaments et des moyens de les gérer. Mais le médecin traitant joue un rôle majeur dans le relais de l’information, le contrôle de l’observance et le dépistage précoce des effets indésirables, ce qui permet de mieux les prendre en charge et d’éviter des modifications du traitement AAG pouvant entraîner une perte de chance.
Les effets secondaires
Les principaux sont la fatigue, qui peut révéler une dénutrition, une dépression ou une anémie, également une hypothyroïdie qu’il faut penser à dépister, les troubles cutanéo-muqueux (rash, syndrome main-pied), et des mucites, à prévenir par l’application biquotidienne d’une crème hydratante et exfoliante sur les pieds et les mains et des bains de bouche tous les jours. Les troubles gastro-intestinaux sont également fréquents : diarrhée, reflux, gastrite, nausées. « Les patients quittent l’hôpital avec une ordonnance de médicaments pour chaque type d’effet, mais le médecin traitant est là pour leur rappeler la conduite à tenir », insiste le Dr Gimel.
La survenue d’une hypertension artérielle est très fréquente, elle est même considérée, au même titre que l’hypothyroïdie, comme un marqueur d’efficacité thérapeutique. Un bilan cardiologique (idéalement fait par un cardiologue formé à la gestion des AAG) est réalisé avant le début du traitement et un antihypertenseur parfois administré en préventif (une ordonnance est, si besoin, donnée au patient). La mesure de la pression artérielle doit être effectuée 2 à 3 fois par semaine.
Les effets secondaires hématologiques qui sont classiques imposent une surveillance biologique toutes les 4 à 6 semaines. Enfin une toux doit faire évoquer une pneumopathie interstitielle.
Le médecin traitant sera amené à prendre en charge les pathologies « habituelles » du patient et devra alors se méfier de la prescription de molécules pouvant modifier la concentration plasmatique des AAG. Certaines augmentent cette concentration par inhibition du CYP 3A4 (kétonazole, ritonavir, itraconazole, érythromycine, clarithromycine, et le jus de pamplemousse), d’autres la diminuent par induction du CYP3A4 (rifampicine, dexaméthasone, phénytoïne, carbamazépine, phénobarbital, hypericum perforatum (millepertuis)).
« La surveillance d’un traitement anti-angiogénique en ville se fonde donc sur une étroite collaboration entre le médecin traitant et le spécialiste, facilitée par la tenue du carnet de suivi. Le spécialiste doit bien sûr être contacté rapidement en cas d’effet secondaire de grade 3 », conclut le Dr Gimel.
D’après un entretien avec le Dr Pierre Gimel, Médipôle, Cabestany
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