PRATIQUE
Chercher une fièvre
Une douleur de hanche chez un patient porteur d'une prothèse doit conduire à un examen, à la recherche d'une fièvre, à savoir si la douleur est récente ou si elle se perpétue depuis l'intervention et bien sûr quel est le recul postopératoire. Des douleurs qui perdurent depuis quelque temps sont possibles au cours d'une évolution normale. Elles sont presque constantes durant les deux premiers mois, puis s'estompent. Une douleur persistant au-delà du 6e mois traduit une anomalie.
Des douleurs peuvent se voir dans certains cas, comme l'allongement relatif lié au raccourcissement préopératoire, une voie d'abord par trochantérotomie souvent un peu plus douloureuse dans les suites ou dans certaines positions, lorsque le patient se couche du coté opéré. Généralement, ces douleurs s'estompent, puis disparaissent avec le temps.
Infection et algodystrophie
L'infection est rare : moins de 1 % dans la plupart des statistiques actuelles. On l'évoquera devant des douleurs, des signes généraux d'accélération de la vitesse de sédimentation et d'augmentation de la CRP (C Reactive Protein). En cas de suspicion d'infection, il faut d'urgence réadresser le patient au chirurgien. On évitera cependant d'affoler le patient ou sa famille puisque, dans la plupart des cas, ces infections précoces guériront après un simple lavage chirurgical.
Plus inquiétantes sont les douleurs persistantes sévères. Parfois le diagnostic d'algodystrophie postopératoire de hanche peut être évoqué. Une scintigraphie confirme l'hyperfixation osseuse régionale qui signe cette affection. Le traitement par la calcitonine sous différentes formes peut être justifié.
Descellement, réactions à corps étranger, ostéolyses
Une douleur survenant lors de certains mouvements, typiquement mécanique, cédant au repos, évoque un défaut de fixation de la prothèse. Cette douleur est souvent survenue après une séance de rééducation un peu énergique. On évoque une mobilité anormale des composants prothétiques. Des radiographies bien centrées et comparées aux clichés postopératoires permettent d'authentifier le déplacement des pièces et de mesurer ces déplacements. Là encore, le chirurgien doit en être informé.
Certains patients ont eu une évolution parfaite sans douleur et ont repris toutes leurs activités, puis un jour ils recommencent à souffrir. Ce type d'évolution pose un problème diagnostique. Parmi les différentes hypothèses, il peut s'agir soit d'une mobilisation des pièces prothétiques, soit d'une réaction à corps étrangers. Les réactions à corps étrangers sont l'une des pierres d'achoppement des prothèses articulaires de la hanche. Elles sont habituellement liées à des réactions macrophagiques aux débris d'usure. Ces débris peuvent être générés par le frottement des pièces prothétiques : le plus souvent lorsque ces pièces sont en métal (chrome, cobalt) frottant sur un plastique, le polyéthylène de haute densité. Le polyéthylène produit des débris d'usure en quantité importante. Cette production est proportionnelle à l'activité du sujet : les jeunes, les sportifs, les actifs en produiront plus et auront donc des réactions plus précoces que les personnes âgées, peu actives ou souffrant de polypathologies qui les confinent à une activité restreinte.
Ces débris peuvent aussi survenir dans d'autres circonstances comme un frottement de la tige fémorale sur le ciment, c'est alors la nature des pièces, alliage de titane cimenté, et surtout leur rugosité qui créent l'abondance et la réactivité des débris. On évite ces phénomènes en utilisant des pièces cimentées très lisses et alors non sensibles à cette détérioration.
On voit apparaître parfois des douleurs d'autres origines. Lorsque les matériaux en présence sont un couple zircone polyéthylène, il a été décrit des ostéolyses sans que l'on en comprenne très bien la raison. Il en est de même lorsque le noyau en polyéthylène est fixé dans une coque en métal : métal back, l'absence de stabilité possible dans certains modèles a pu expliquer des phénomènes de pompage de fluide avec création de débris d'usure particulièrement accélérée. Les radiographies peuvent montrer des destructions osseuses importantes de type géodique ou des descellements.
Douleur brutale de prothèse
A côté de la luxation de prothèse, complication surtout observée dans les premiers mois et qui survient dans un contexte particulier lors d'un mouvement extrême dont le patient a conscience un peu tard, la cause d'une douleur brutale peut être une rupture de pièce. Apparaissant dans un contexte équivalent, ces ruptures de pièces de prothèses (tiges en métal, têtes en céramiques, cotyles en polyéthylène) sont beaucoup plus rares. Toutes ces douleurs brutales doivent conduire à la consultation du chirurgien. L'infection retardée liée à une greffe bactérienne au décours d'une infection d'une dent de sagesse, d'une pyélonéphrite, d'une angiocholite, ont pu être observées. Leur survenue est cependant assez exceptionnelle.
Les causes médicales
Enfin restent les causes médicales de douleurs : après la pose d'une prothèse, le patient continue à souffrir et les douleurs lui rappellent ses douleurs préopératoires. On doit évoquer une erreur de diagnostic : le patient présentait effectivement des signes radiologiques d'arthrose mais souffrait en fait d'une hernie discale, d'une hernie crurale ou d'une autre pathologie que l'on avait attribuée à tort à la hanche.
Un suivi justifié
Ces complications potentielles justifient un suivi de toute prothèse totale de la hanche : tous les ans pendant les premières années, puis tous les deux à trois ans comme nous le faisons habituellement. A cette occasion, rappelons aussi que parfois on observe l'apparition de géodes sans douleur. Quelle qu'en soit la raison (réaction macrophagique ou autre), ces géodes doivent conduire à une réintervention rapide pour éviter que, les destructions osseuses augmentant, la réintervention n'en devienne beaucoup trop difficile. C'est aussi un argument pour surveiller toute prothèse même si elle va bien.
Rappelons cependant qu'une prothèse totale de hanche doit assurer un résultat indolore pour de très nombreuses années : les couples en céramique d'alumine permettent d'éviter les problèmes liés à l'usure, et on peut espérer que 90 % des prothèses seront toujours en place et indolores vingt ans plus tard. Et ce quel que soit le niveau d'activité et l'âge du patient.
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