Il Y A NEUF ANS, l'équipe du Dr Huda Zoghbi, du Baylor College of Medicine à Houston (États-Unis), identifiait une mutation du gène MeCP2 (sur le chromosome X) comme étant la cause du syndrome de Rett.
Ce trouble grave et global du développement du système nerveux central (SNC) frappe uniquement les filles, le plus souvent de façon sporadique.
Après une période apparemment normale, jusqu'à l'âge de 6 à 18 mois, les filles perdent le langage acquis et l'utilisation volontaire des mains qui est remplacée par des stéréotypies manuelles.
La protéine MeCP2 (methyl-CpG-binding protein 2) était considérée jusqu'ici comme un facteur réprimant la transcription d'un petit nombre de gènes, dont l'identité restait à déterminer.
Puisque le syndrome de Rett est causé par une perte de fonction de la protéine MeCP2, on pensait qu'il résultait de la surexpression de certains gènes, dommageable pour le développement du SNC.
Plus récemment, des mutations du gène MeCP2 ont également été identifiées chez des enfants présentant divers troubles du neurodéveloppement, incluant un léger trouble d'apprentissage chez les filles, une encéphalopathie néonatale chez les garçons, et l'autisme et le retard mental chez les filles et les garçons.
De plus, à l'inverse, des duplications du gène MeCP2 (entraînant un excès de la protéine correspondante) ont également été rattachées à des troubles postnatals progressifs du neurodéveloppement, avec des manifestations similaires à celles du syndrome de Rett.
Une large gamme de gènes dans l'hypothalamus.
Pour mieux comprendre la fonction de MeCP2, et les mécanismes moléculaires sous-jacents à ces troubles neurologiques, l'équipe du Dr Huda Zoghbi a étudié deux modèles de souris : celles déficientes en MeCP2 et celles surexprimant MeCP2. Et les chercheurs ont examiné les profils d'expression génique dans l'hypothalamus de ces deux types de souris.
Dans les deux modèles, la dysfonction de MeCP2 provoque des changements d'expression, non pas de quelques gènes, mais de milliers de gènes ; en outre, de façon inattendue, la majorité des gènes (85 %) apparaissent être activés par MeCP2.
Après avoir sélectionné six gènes, les chercheurs ont confirmé que MeCP2 se lie bien à leurs promoteurs.
De plus, MeCP2 s'associe avec CREB1, un activateur transcriptionnel bien connu, au promoteur d'une cible activée, mais pas au promoteur d'une cible réprimée.
En conclusion, cette étude suggère que la protéine MeCP2 régule l'expression d'une large gamme de gènes dans l'hypothalamus et qu'elle peut fonctionner à la fois comme un activateur et un répresseur de la transcription.
«Le cerveau est très sensible à l'équilibre physiologique deMeCP2, explique dans un communiqué le Dr Zoghbi. Qu'il y ait perte ou production excessive de protéine MeCP2, les symptômes neurologiques se chevauchent. »
Le cerveau ou les neurones ne manifestent un problème qu'avec une palette limitée de symptômes : autisme, crises convulsives ou retard mental. Mais, comme en témoignent les études de MeCP2, ces symptômes peuvent avoir des causes distinctes et requérir des traitements très différents.
Tandis que le syndrome de Rett est dû principalement à la perte d'expression génique (plutôt qu'à une surexpression génique), le phénotype de duplication est dû à un gain de fonction MeCP2.
Chercher à contourner MeCP2.
Ainsi, le syndrome de Rett et la duplication MeCP2, malgré des symptômes similaires, devront être traités différemment, puisque les signatures moléculaires sont opposées.
En outre, comme l'ajoute dans un communiqué Maria Chahrour, première signataire de l'étude publiée dans « Science », «puisque MeCP2 régule des milliers de gènes, cela n'a aucun sens de développer des thérapies ciblant chacun d'eux individuellement. Il va falloir découvrir une stratégie thérapeutique qui puisse contourner MeCP2 et restaurer la fonction neurale normale dans le cerveau».
« Science », 30 mai 2008, Chahrour et coll., p. 1 224.
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