LE FOIE GRAS de canard ou d'oie aurait des propriétés amyloïdogéniques. Une étude américaine indique, en effet, que les fibrilles de protéines amyloïdes A (AA) contenues dans ces foies accélèrent le développement d'une amyloïdose chez les souris génétiquement prédisposées à la maladie.
Les amyloïdoses associées à la protéine amyloïde A sont observées chez des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ou d'autres maladies inflammatoires chroniques. Elles résultent d'une élévation importante du niveau d'apolipoprotéine SAA (pour Serum Amyloïde A) produite par les hépatocytes, sous le contrôle des interleukines 1 et 6 (IL1 et IL6) et du facteur TNF. L'apolipoprotéine est clivée en peptides amyloïdes qui se déposent principalement dans les reins, le foie et la rate.
Administration intraveineuse de fibrilles AA.
Il existe un modèle expérimental murin de la maladie humaine. Ces souris mutantes développent la maladie à partir de l'âge de 5 mois. Les premiers dépôts sont observés au niveau de la rate des animaux, puis ils s'étendent rapidement au foie, aux reins, au coeur, au tractus digestif et à la langue. Les animaux meurent généralement à l'âge de 8 ou 9 mois. En outre, il a été montré que l'administration par voie intraveineuse de fibrilles AA d'origine exogène accélère la maladie des souris mutantes. En effet, l'injection de 100 µg de fibrilles AA chez des animaux âgés de 8 semaines entraîne leur décès en à peine plus de deux mois.
Des dépôts de fibrilles AA étant retrouvés dans des aliments d'origine animal, Solomon et coll. ont voulu tester l'hypothèse selon laquelle l'ingestion de ces aliments pouvait accélérer le développement de l'amyloïdose chez les souris mutantes. Parmi les aliments susceptibles de contenir des fibrilles, les chercheurs ont choisi de s'intéresser au cas du foie gras.
L'analyse histochimique de plusieurs foies gras crus obtenus dans le commerce, aux Etats-Unis et en France, a confirmé la présence de fibrilles AA. Ces fibrilles ont été isolées et administrées (100 µg) par voie intraveineuse à des souris mutantes. Les animaux ont été sacrifiés et autopsiés huit semaines plus tard. La présence de dépôts amyloïdes a été détectée chez toutes les souris analysées, dans un ou plusieurs de leurs tissus. Les organes les plus atteints sont le foie, la rate, ainsi que, dans un moindre degré, les reins et le pancréas. Aucun dépôt n'a été noté chez les animaux mutants témoins qui avaient reçu une injection placebo.
Par voie orale, 100 g par jour pendant cinq jours.
µ Des résultats pratiquement identiques ont été obtenus lorsque les souris mutantes ont reçu les fibrilles AA issues du fois gras par voie orale, à raison de 100 µg par jour pendant cinq jours. Si le foie gras est cuit pendant 20 minutes à 95 degrés, le pouvoir amyloïdogénique de ses fibrilles AA diminue, mais il reste significatif. Apparemment, seul un puissant traitement chimique dénaturant permet d'annuler totalement l'effet délétère de fibrilles du foie gras.
Pour les auteurs de cette étude, il n'est pas impossible que la consommation de foie gras, ou celle d'autres aliments riches en fibrilles AA (comme la viande de mouton), puisse augmenter le risque d'amyloïdose chez les sujets prédisposés ou chez les patients souffrant déjà d'une maladie inflammatoire chronique. En outre, Solomon et coll. suggèrent que les personnes prédisposées à d'autres pathologies associées aux dépôts de protéines amyloïdes, comme la maladie d'Alzheimer ou le diabète de type 2, devraient, elles aussi, éviter de consommer des aliments riches en fibrilles AA.
A. Solomon, « Proc Natl Acad Sci USA », du 26 juin 2007, vol. 104, pp. 10998-11001.
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