LA CONSULTATION internationale sur l'incontinence est constituée par vingt-trois comités qui se partagent différents aspects de l'incontinence urinaire. Chaque comité est composé de sept ou huit experts multidisciplinaires du sujet, qui, après avoir travaillé pendant dix-huit mois, présentent leurs recommandations fondées sur les preuves, sur l'Evidence-Based Medicine, concernant leur sujet : enfant, femme, vieillard, malade neurologique…
Le Pr Saad Khoury, secrétaire de la consultation, évoque un sujet qui lui tient particulièrement à coeur, celui des fistules vésico-vaginales obstétricales (FVV). Une séance spéciale sur ce sujet, mal connu des médecins et du public, se tiendra lors de la consultation, sous l'égide de l'OMS, en présence du Dr Paul Van Look, directeur du département Making Pregnancy Safer à l'OMS. Une quinzaine de grandes associations internationales impliquées dans la FVV, sous la direction du Pr Dirk De Ridder, vont y participer.
100 000 nouveaux cas par an.
La FVV représente un fléau dans les pays en développement, et en Afrique, tout particulièrement, où l'on compte 100 000 nouveaux cas par an et environ 2 millions de femmes affectées. Des chiffres élevés, mais, selon toute vraisemblance, sous-estimés, en raison du caractère souvent caché de l'affection par des femmes qui vivent cela comme une honte. Ce sont des femmes jeunes, qui perdent continuellement les urines et parfois aussi les selles.
Les fistules sont secondaires à des accouchements dystociques qui n'ont pu être traités à temps. Il s'agit d'accouchements bloqués, où il arrive que la femme pousse pendant plusieurs jours sans succès. L'enfant ne descend pas, sa tête écrase vessie et rectum contre les structures osseuses. Les tissus se nécrosent et les fistules se mettent en place. Si la femme n'est pas dirigée vers un centre, où une césarienne est pratiquée dans les temps, l'issue est la mort de l'enfant et souvent celle de la mère. Chaque année, dans le monde, un demi-million de femmes décèdent des différentes complications de la grossesse.
Les séquelles de cette situation terrible sont dramatiques : sexuelles, infectieuses, infertilité… De plus, ces femmes dégagent continuellement de mauvaises odeurs. Elles sont, de ce fait, répudiées par leur mari et mises en dehors du village comme les lépreux. Elles ne peuvent travailler que dans les champs, et vivent dans un état de pauvreté et d'indigence.
Un traitement chirurgical.
Dans les cas simples, un traitement chirurgical peut donner de bons résultats. Mais, parfois, le sphincter est abîmé, et une incontinence peut demeurer, même après la chirurgie. Les cas compliqués, plus difficiles à traiter, nécessitent un milieu spécialisé.
La prévention est la vraie réponse à ce fléau. C'est ce qu'essaye de faire l'OMS avec son programme « Making Pregancy Safer », aidée par des organisations charitables de bénévoles. Cette prévention est fondée principalement sur plusieurs axes cardinaux :
– information des jeunes filles et des femmes (99 % des cas de fistules surviennent chez des femmes illettrées) ;
– assurer un accès aux soins obstétricaux ;
– retarder l'âge de la première grossesse (chez les adolescentes, le bassin n'est pas encore complètement développé pour permettre une grossesse) ;
– abolir les pratiques telle l'excision qui laissent parfois des cicatrices scléreuses qui rétrécissent le vagin.
«On voit que le chantier est vaste et fait partie de la lutte générale contre la pauvreté et l'illettrisme dans ces pays, ce qui n'est pas chose facile. La réponse est essentiellement politique. En attendant, notre devoir de médecin est de faire le maximum avec les maigres moyens disponibles et d'attirer l'attention sur ce fléau.»
C'est l'objectif de la réunion de Paris afin que, dans ce domaine, les différents acteurs mettent en commun leur expérience, ainsi que leurs moyens, et qu'ils définissent une stratégie commune. «Il vaut mieux allumer une maigre et unique chandelle plutôt que de maudire l'obscurité. »
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