LE Dr DIDIER VIGNON, président du Fonds d'assurance formation de la profession médicale (FAF-PM), a beau refaire ses calculs : le compte n'est vraiment pas bon.
Le 28 novembre dernier, il a reçu un avis de mise en recouvrement adressé par le ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie : « Suite aux redressements fiscaux qui vous ont été notifiés [...] , vous êtes redevables à la caisse de la recette Saint-Georges (dans le 9e arrondissement de Paris) de la somme de 2 623 598 euros », soit plus de 17 millions de francs.
Le trésor public réclame en fait au FAF-PM le versement de l'excédent de trésorerie non dépensé pour la formation des médecins libéraux au terme de l'exercice clos en 1999 (ci-dessous).
Réuni en session extraordinaire en décembre, le conseil de gestion du FAF-PM a tranché. Par 15 voix contre 5, les représentants des quatre syndicats représentatifs (Csmf, MG-France, SML et FMF) ont décidé de répondre favorablement à la mise en recouvrement: « Le FAF a choisi la légalité, indique le Dr Didier Vignon. Nous avons obtenu un étalonnement de la dette auprès des contrôleurs des impôts. Fin décembre, nous avons versé 1,3 million d'euros ; le restant devra l'être à la mi-septembre 2004. » Le FAF-PM paie mais engage une procédure de redressement contradictoire.
Un article inapproprié.Le président du FAF-PM conteste la notification du trésor public et plus particulièrement l'article L. 961-8 du code du travail. Lequel stipule qu'au 31 décembre un FAF ayant dans ses caisses plus d'argent qu'il n'en a dépensé en charges doit le consacrer à des formations pour des demandeurs d'emploi pendant les six mois suivants. S'il contrevient à cette règle, il doit reverser l'excédent au fisc. « Cette disposition est complètement absurde dans notre cas. La profession médicale ne connaît actuellement pas de demandeurs d'emploi », s'insurge Didier Vignon. Selon lui, « c'est l'argent des médecins que l'Etat récupère ». Une somme colossale qui aurait permis de financer plus de six mille journées de FMC : le coût moyen d'une journée de formation est estimé à 400 euros.
Les soucis financiers du FAF-PM ne se limitent pas au trésor public. Depuis 1996, la Cnam réclame au fonds le reliquat de la dotation versée au titre de la contribution conventionnelle dont le FAF-PM assurait la gestion jusqu'en 1995. Le 17 avril dernier, le directeur de la Cnam, Daniel Lenoir, exigeait le versement « dans les plus brefs délais » de ce reliquat estimé à 2 554 548 euros, près de 16,8 milliards (« le Quotidien » du 5 mars 2003). « La décision de justice ne tient pas compte du coût des formations réalisées à l'époque - plus de 1,4 million d'euros - qui étaient du ressort de la convention et que la Cnam doit au FAF-PM », se défend Didier Vignon. C'est la raison pour laquelle le président a adressé à la fin décembre un chèque de « seulement » 1 114 241 euros à la Cnam.
Si le FAF-PM devait payer l'intégralité de ses dettes majorées des intérêts légaux de retard, aucune prise en charge d'actions de formation ne pourrait être envisagée avant le mois d'août 2004, au moment où il percevra les cotisations des médecins à la formation professionnelle (CFP), environ 4,7 millions d'euros. Pire, « le FAF-PM serait dans le rouge », précise Didier Vignon, simulation à l'appui.
L'équilibre financier du FAF-PM est donc précaire. Pour le Dr Roger Rua, trésorier, le fonds est vraiment sur le fil du rasoir. « Il reste deux millions d'euros pour couvrir les six premiers mois de l'année ». Sans compter ce que le FAF-PM doit payer en septembre au trésor.
Mais le problème du financement de la FMC des médecins libéraux se posera plus durement en 2005. « Quand nous aurons soldé la caisse fin 2004, nous devrons attendre la cotisation des médecins à la formation professionnelle d'août 2005. Si l'Etat n'intervient pas, il va nous plonger dans une situation inextricable », prédit le président du fonds. A long terme, c'est l'ensemble du financement de la FMC réorganisée par le décret paru au « Journal officiel » du 16 novembre 2003 qui risque d'être rendu difficile. Jean-Louis Gayet, directeur du FAF-PM, est formel : « Les fonds de formation ne vont pas tomber du ciel, il faudrait utiliser au mieux ceux qui existent déjà. » En attendant, Didier Vignon s'est fixé un objectif : « Régler toutes ces casseroles » avant la fin de sa mandature en décembre 2004.
Malgré la tournure des événements, le FAF-PM, dont les réunions du conseil de gestion ont pu être animées par le passé, retrouve une unité. « Il n'y a plus de conflit d'ordre syndical et on évite tous les problèmes politiques, tranche Didier Vignon. Nous cherchons avant tout à préserver l'indépendance du FAF-PM pour qu'il perdure. Nous gérons l'argent des médecins et souhaitons pouvoir financer le maximum de formations. » L'avenir du FAF-PM passera par les ministères Fillon et Mattei. Le 15 janvier, Didier Vignon a rencontré les collaborateurs du ministre des Affaires sociales pour obtenir le rétablissement de l'article R.964-20 qui a dispensé, jusqu'en 1995, le FAF-PM de verser au fisc son excédent de trésorerie. « Le cabinet estime que c'est impossible », regrette-t-il cependant. Prochain rendez-vous au ministère de la Santé à la fin du mois. Le président Vignon attend un signe qui montrerait que l'Etat ne « veut pas tuer le FAF ».
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