CLASSIQUE
Bien sûr l'ambiance n'y sera pas, ni le pique-nique à l'entracte, ni les moutons sur gazons verdoyants, mais le Festival de Glyndebourne ne vient pas moins in corpore montrer deux productions de ces dernières saisons au public parisien. On ne l'avait pas vu depuis 1980 avec un certain « Rake's Progress » mis en scène par John Cox dans des admirables décors de David Hockney, avec Felicity Lott (incontestablement un de ses meilleurs rôles) au Théâtre des Champs-Elysées dans le cadre d'une intégrale Stravinsky, produite par le Festival d'Automne à Paris.
Le « Fidelio » est de la saison dernière. La mise en scène très moderne, radicale et réductrice de Deborah Warner, en fut très contestée outre-Manche. Dirigée par Simon Rattle à la tête de l'Orchestra of the Age of Enlightment, la distribution comprend Kim Bengley (Florestan), Anne Schwanewilms (Leonore) et Matthias Hölle (Don Fernando).
La production de « Rodelinda, Reine de Lombardie » (1725), mise en scène par Jean-Marie Villégier, date de 1998 et était le premier opéra de Haendel produit dans l'histoire de ce festival et pas le plus joué ni même le plus enregistré de ses opéras. Il pose un sérieux problème dramaturgique : pas d'ensembles hormis de rares duos, pas de churs et une succession d'arias solistes alourdis par leurs da capo (reprise systématique et intégrale de l'aria avec une ornementation plus virtuose), une structure dramatique peu convaincante et difficilement exploitable. Les générations ayant assuré la renaissance de ces opéras dans les cinquante dernières années ont cru avoir raison de ce handicap en pratiquant largement l'art de la coupure. Aujourd'hui que la musique ancienne est devenue un des moteurs des théâtres et salles de concerts, on peut faire confiance à William Christie pour défendre bec et ongles la moindre note de la partition.
Pour « Rodelinda », Glyndebourne avait fait appel à une équipe entièrement française, celle-là même qui avait assuré le succès parisien puis mondial de « Atys », de Lully, en 1987 : Christie à la baguette, Jean-Marie Villégier pour la mise en scène, Nicolas de Lajartre, Pascale Cazales (décors) et Patrice Cauchetier (costumes). Musicalement, le résultat est superlatif. Christie dirige Haendel avec une infinie souplesse, une palette de couleurs et d'expressions que permet le merveilleux Orchestra of the Age of Enlightment. Quasi perfection aussi dans la distribution. Avant tout par le succès personnel du jeune haute-contre allemand Andreas Scholl dont c'était non seulement les débuts à Glyndebourne, mais aussi les premiers pas sur une scène d'opéra. La puissance de sa voix sur trois grandes heures de représentation, l'infinie capacité de doser et nuancer et sa grande intelligence musicale ont abouti à un fascinant Bertarido, le malheureux monarque exilé de cet abracadabrantesque libretto. Formidable aussi la Rodelinda d'Anna Caterina Antonacci (qui alternera dans cette série avec Emma Bell), extrêmement convaincante avec des moyens moins considérables.
En transposant l'action au XX° siècle dans ses années trente, dans un univers noir et blanc au glamour cinématographique pour les costumes mais fasciste par l'architecture et les inévitables uniformes militaires, Villégier et ses décorateurs superposent deux esthétiques sans que cela ne facilite la compréhension d'une action, qui bien que conventionnelle, est assez compliquée. Le premier acte exposant seulement personnages et situations n'y gagne aucune vie. Miraculeusement, le second convainc grâce à quelques idées brillantes de mise en perspective de l'action. Le troisième, résolutif, retombe à plat avec quelques gags un peu infantiles que Villégier a cru bon d'y parsemer. Mais grâce à sa haute tenue musicale et en dépit des réserves scéniques exprimées, tempérées par les difficultés inhérentes à sa structure, « Rodelinda » est un magnifique spectacle et certainement celui à choisir dans les deux réalisation que Glyndebourne présentera à Paris.
Châtelet (01.40.28.28.40). Site Internet : www.chatelet-theatre.com. Les 30 janvier ; 2, 5, 8 février (« Fidelio ») ; 29 janvier, 1er, 4 et 7 février (« Rodelinda »).
La saison 2002 du Festival de Glyndebourne
Bien que cela ne soit plus vrai depuis la construction d'un nouveau théâtre en 1994, il est toujours de coutume de dire qu'il est impossible de trouver des places pour le Festival de Glyndebourne. Avec un minimum d'organisation (les demandes se font en janvier pour l'été, cela n'excluant pas, pour les spectacles moins demandés, de trouver des billets au dernier moment) et un certain budget (le prix des places va jusqu'à 200 euros environ) et à condition de respecter la règle qui consiste à se mettre en tenue de soirée dès l'heure du thé et quelle que soit la température, tout un chacun peut tenter sa chance.
Cet été (le festival s'étale entre le 18 mai et le 25 août) trois nouvelles productions seront à l'affiche : « Carmen » (Philippe Jordan/David McVicar) avec en alternance Anne Sofie von Otter et Charlotte Hellekant, « Euryanthe », de Von Weber (Mark Elder/Richard Jones) et « Iphigénie en Aulide », de Gluck (Ivor Bolton/Christof Loy). Trois reprises majeures aussi : le « Don Giovanni », de Graham Vick dirigé par Louis Langrée, « Katia Kabanova », de Jan[135]cek (Jir[146] Kout/Nikolaus Lenhoff) et, pour la première fois dans le nouveau théâtre, la délicieuse mise en scène de 1985 de Peter Hall de « Albert Herring », de Britten, qui fut créé à Glyndebourne, dirigée par Vladimir Jurowski qui marquera le retour attendu de Felicity Lott à Glyndebourne dans le rôle de Lady Billows.
Glyndebourne Festival Opera (00.44.1273.813813). Site Internet : www.glyndebourne.com
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