DANS LES PAYS industrialisés, l'hospitalisation initiale des malades souffrant d'infarctus du myocarde est devenu indispensable : elle permet la mise en place d'un traitement pour lutter contre la douleur, de procédures de reperfusion et l'instauration d'une prévention secondaire. En outre, l'admission dans une unité de soins intensifs de cardiologie (Usic) au cours des quarante-huit première heures permet l'accès immédiat à des procédures de défibrillation si des troubles du rythme s'installent.
Si la durée de séjour en Usic est généralement limitée à quarante-huit heures, c'est parce que 97 % des complications qui surviennent dans les trente jours suivant un infarctus du myocarde ont lieu dans ce court laps de temps. La durée totale du séjour dans un service de cardiologie pour les sujets souffrant de syndrome coronaire aigu s'est sensiblement raccourcie depuis trente ans. Dans les années 1970, en effet, l'American College of Cardiology et l'American Heart Association recommandaient une durée totale d'hospitalisation de quinze jours, alors que les sociétés savantes américaines et européennes estiment actuellement que les patients à faible risque peuvent sortir de l'hôpital quatre jours après l'admission.
La revue de trois grandes études.
Afin de savoir si ce type de mesure de retour à domicile précoce est réellement effectué en pratique quotidienne, une équipe de cardiologues - le groupe Vigour, coordonné par le Dr Padma Kaul (Edmonton, Canada) - a mis en place une étude de population sur 54 174 patients sélectionnés dans les participants de trois grandes études sur l'intérêt de la fribrinolyse dans l'infarctus du myocarde : Gusto-I, Gusto-III et Assent-2.
Ces études, dont la période d'enrôlement s'est déroulée entre 1990 et 1998, ont inclus des patients dans 9 pays : Etats-Unis, Canada, Nouvelle-Zélande, Belgique, France, Allemagne, Espagne et Pologne. Dans la première étude - Gusto-I, qui a eu lieu entre 1990 et 1993 -, une sortie précoce pouvait être proposée à 20 833 des 34 334 patients. Pour Gusto-III (1993-1997), ce chiffre s'élevait à 6 014 patients sur les 11 118 de l'étude ; et à 4 386 sur 8 722 pour Assent-2 (1997-1998).
Rétrospectivement, les taux de mortalité dans les groupes des patients considérés comme éligibles étaient de 2 % à trente jours et de 4 % à un an en moyenne.
Les auteurs ont pris en compte le pays de résidence dans leur analyse du taux de patients éligibles pour une sortie précise et ayant réellement quitté l'hôpital à l'issue des quatre premiers jours de soins. En France, par exemple, 73 % des patients de Gusto-I, 70 % de ceux de Gusto-III et 56 % de ceux de Assent-2 auraient pu quitter l'hôpital plus tôt. En réalité, ils n'ont été respectivement que 1, 2 et 3 %.
Une tendance semblable a été retrouvée dans tous les pays européens et c'est en Allemagne qu'elle était la plus prononcée. A l'inverse, aux Etats-Unis, 3 % des 58 % des patients éligible au début des années 1990 (Gusto-I) n'ont été hospitalisés que quatre jours et ce nombre est passé à 16 % sur 40 % des sujets éligibles à la fin de la décennie (Assent-2). C'est en Nouvelle-Zélande que le chiffre des patients ayant quitté plus tôt l'hôpital est le plus élevé : 40 % des sujets éligibles à la fin des années 1990.
Pourtant, comme l'explique le Dr Elliot Smith (Londres) dans un éditorial, « seule une telle attitude thérapeutique paraît compatible avec la mise en place des politiques d'économie de santé envisagées dans les pays développés. Néanmoins, il reste possible que l'un des freins à la sortie de l'hôpital tiennent à l'absence de structures d'accompagnent à domicile ou au manque de place dans les services de suite de soins cardiologiques ».
« The Lancet » vol. 363, pp. 502-504 et 511-516, 14 février 2004.
Les quatre premiers jours
Sont considérés comme patients à faible risque ceux qui, durant les quatre premiers jours d'hospitalisation, ne sont pas morts, n'ont pas subi de nouvel infarctus ni d'ischémie, d'AVC, d'insuffisance cardiaque, de pontage, de cathétérisation d'urgence, de défibrillation ou de réentraînement (pour tachycardie ventriculaire, fibrillation ventriculaire, asystolie ou dissociation électromécanique) et ceux chez qui la mise en place d'un ballonnet de contre-pulsion n'a pas été nécessaire.
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