Le Dr Rachel Bocher (INPH) : « Je suis inquiète »

Publié le 12/09/2001
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LE QUOTIDIEN - Dans quel état d'esprit abordez-vous cette nouvelle étape dans la négociation des 35 heures pour les praticiens hospitaliers.
Dr RACHEL BOCHER - Dire que je me rends à ces négociations avec l'esprit apaisé et tranquilleserait bien contraire à la vérité : car en effet, je suis inquiète, très inquiète. A quelques heures de l'ouverture de ces négociations, nous n'avons encore reçu aucune proposition nouvelle des pouvoirs publics concernant les 35 heures pour les praticiens hospitaliers, dont l'application doit entrer en vigueur au 1er janvier 2002. C'est dire que nous en savons pas aujourd'hui quel est l'état d'esprit des pouvoirs publics sur ce problème, s'ils ont évolué depuis leurs dernières propositions que nous avons unanimement rejeté, tant elles nous semblaient irréalistes, même parfois indignes. Il faut espérer que le gouvernement ait depuis lors bien révisé sa copie. Sinon, il faut s'attendre au pire.

Appliquer totalement
le protocole d'accord de mars 2000

L'ensemble des syndicats de praticiens hospitaliers ont fait, au début de l'été, un ensemble de propositions aux pouvoirs publics sur l'application de ces 35 heures. Pensez-vous qu'Elisabeth Guigou et Bernard Kouchner vous ont entendus ?
Il est évident que nos syndicats n'auraient pas travaillé aussi dur sur ces propositions s'ils n'espéraient que les pouvoirs publics les étudient. C'est quand même le moins que nous puissions attendre. Mais, il est vrai, que nous ne savons même pas si cela a été le cas, et si le gouvernement tiendra compte de nos observations et de nos propositions. Nous n'avons eu en effet aucun retour, aucun écho de ces propositions que nous avons faites il y a pourtant déjà un certain temps.
Pensez-vous que les praticiens hospitaliers soient aujourd'hui suffisamment mobilisés pour convaincre les pouvoirs publics de conclure rapidement sur cette question des 35 heures ?
Les médecins dans les hôpitaux suivent de très près ces discussions. Mais surtout, ils sont préoccupés par la situation de l'hôpital public qui vit des moments difficiles. Ils disent au gouvernement : « Commencez par appliquer totalement le protocole d'accord que vous signé en mars 2000 ; accordez les moyens que vous avez promis pour que l'hôpital public puisse accomplir les missions qui sont les siennes. En clair, il faut donner aux médecins le moyens d'exercer leur métier dans des établissements de soins de qualité. »

La cerise sur le gâteau

La réduction du temps de travail appliqué aux médecins permettra-t-elle cependant de sauvegarder la sécurité, la qualité des soins des hôpitaux ?
En fait, vous me demandez clairement si les médecins vont déserter l'hôpital au nom des 35 heures. La réponse est évidente : les praticiens hospitaliers continueront à travailler 51 heures par semaine, à soigner leurs malades et à s'occuper de l'hôpital public. Mais il est vrai que nous tenons à ces 35 heures, qui font envie aux médecins qui pourront avoir de nouveaux temps libres. L'important, l'essentiel reste, il est vrai, le problème du statut sur lequel nous travaillons. Les 35 heures, c'est la cerise sur le gâteau. Mais pour nous, elle est importante.
Comment appréhendez-vous la négociations entre le gouvernement et les autres personnels hospitaliers ?
Nous comprenons les revendications des syndicats qui, eux aussi, demandent que l'on prenne en compte la situation de l'hôpital public et la qualité des soins dans la mise en place des 35 heures. C'est pourquoi il y a une divergence importante entre les demandes de création d'emplois des syndicats de personnels et le propositions du gouvernement.
Ces syndicats appellent à une manifestation le 20 septembre. Plusieurs organisations de praticiens hospitaliers semblent prêts à s'y associer. Et l'INPH ?
Tout est possible, selon le résultat des négociations et les propositions des pouvoirs publics. Nous n'écartons aujourd'hui aucune éventualité.

Propos recueillis par Jacques DEGAIN

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6966