Les 40 membres du Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM), réunis au siège de l'institution à Paris, ont élu le Dr Michel Ducloux (75 ans le 10 août prochain et jusqu'à présent vice-président) à la présidence du CNOM (« le Quotidien » du 3 juillet).
Un scrutin contesté par certains conseillers et médecins, qui regrettent que le nouvel élu soit plus âgé que le précédent.
Cette élection a le mérite de mettre un terme à deux années de flottement qui ont fait suite à la crise ouverte au début de l'année 2002, lors de la signature pour le moins controversée d'un protocole sur la permanence des soins qui avait contraint le professeur Bernard Hrni, alors président de l'Ordre, à présenter sa démission en même temps qu'une partie de son équipe.
Son successeur, le Pr Jean Langlois, ayant annoncé dès son élection qu'il ne solliciterait pas de nouveau mandat à l'échéance de celui-ci, en juin 2003, une période transitoire s'ouvrait à l'Ordre. Cette période se termine par l'élection de Michel Ducloux, qui devrait rester à son poste jusqu'en juin 2005.
Chirurgien orthopédique, le Dr Ducloux a été président du conseil départemental du Nord de 1972 à 2002. Il est membre du Conseil national depuis 1999, et a été élu président du CNOM par 24 voix contre 15 au Dr Jacques Lucas, et un vote blanc.
« Je veux associer étroitement les jeunes médecins à nos travaux »
LE QUOTIDIEN
Comment jugez-vous l'état d'esprit du corps médical au moment où vous prenez vos fonctions à la présidence du Conseil de l'Ordre ?
Dr MICHEL DUCLOUX
Actuellement, les médecins sont en grande difficulté : il y a en particulier des problèmes de succession et de démographie.
De plus, il y a un besoin chez les jeunes médecins de concilier leur vie de famille et leur vie quotidienne avec leurs activités professionnelles. Mais on ne peut pas le leur reprocher, d'autant qu'on leur demande tellement de choses, comme de remplir de plus en plus de tâches administratives, d'accomplir des tâches réglementaires, qu'ils sont un peu asphyxiés. Comme, par ailleurs, ils ne sont pas toujours récompensés pour leurs efforts, il y a un certain désenchantement de la profession qui est parfaitement compréhensible. Et c'est pour ça qu'il faut les aider dans leur exercice de tous les jours.
Votre prédécesseur, le Pr Langlois, avait dit, dès son élection, qu'il ne se représenterait pas. Est-ce que cela fait longtemps que vous envisagiez de vous présenter à sa succession ?
Il faut revenir un peu en arrière, en juin 2002. Lors de la dernière élection, les conseillers nationaux m'avaient désigné pour être, au cas où Jean Langlois ne se présenterait pas, leur candidat. J'ai beaucoup d'estime pour Jean Langlois. Aussi, quand il s'est présenté, je me suis retiré discrètement. Donc, ma candidature est une suite logique et légitime. Quand j'ai présenté ma candidature pour cette nouvelle élection, c'est à Jacques Lucas, pour qui j'ai la plus haute estime, que je l'ai annoncé en premier. En conséquence, ce n'est ni une surprise ni une traîtrise, c'est juste une autre candidature.
Parlons de l'avenir. Si vous deviez prendre une première mesure qui serait emblématique de votre action à venir, quelle serait-elle ?
Il y a une chose qui m'importe depuis très longtemps, c'est me rapprocher des hospitalo-universitaires, des jeunes médecins et des étudiants. C'est, pour moi, capital, parce que, l'avenir, ça n'est pas moi qui l'incarne, ce sont les jeunes qui arrivent et qui se demandent où ils vont. Ils ont perdu leurs repères, ils ont perdu beaucoup de choses, c'est à tout cela que je pense. Et c'est de les associer étroitement à nos travaux qui m'intéresse d'abord : eux aussi ont des idées et des souhaits, ils se projettent dans l'avenir, et, nous, les aînés, nous sommes là pour les accompagner, pour les aider. Il y a du travail à faire de ce côté-là, et il y a une attente. A cet effet, je voudrais créer une « cellule jeunes », avec un jeune conseiller national, à laquelle viendraient participer des représentants des jeunes médecins, des étudiants en fin de troisième cycle, de façon qu'on discute ensemble et qu'on voie quelques grandes lignes.
Il y a une deuxième priorité qu'il faut reprendre, à mon avis, et ça va dans la lignée des travaux menés par Jean Langlois : il s'agit du chantier de la permanence des soins. Mais il faut sans doute agir différemment, parce qu'on ne peut plus faire comme auparavant. Il faut en tout état de cause trouver des solutions. On ne pourra pas organiser la permanence des soins sans un accord avec les médecins : elle fait partie du devoir de médecin. Il faut que l'on se réunisse avec les syndicats médicaux et les unions régionales, de façon à étudier tous ces problèmes ensemble, car ce n'est pas l'Ordre qui peut et va tout faire. Que l'Ordre soit responsable de l'organisation, d'accord, mais on ne pourra pas tout faire tout seuls. La permanence des soins, c'est sans doute le dossier prioritaire, mais ça ne va pas se faire d'ici à demain, il ne faut pas se faire d'illusions.
Sur ce dossier de la permanence des soins, certains syndicats reprochent à l'Ordre d'agir de manière un peu unilatérale.
Je crois justement qu'il faut que chacun sache où sont nos limites, des uns et des autres. Le syndicat s'intéresse à la profession dans le cadre de tout ce qui est matériel, c'est-à-dire la défense des intérêts des médecins, ou les discussions salariales. Et c'est parce que, nous, au Conseil de l'Ordre, à un moment donné, on a franchi la limite et qu'on s'est transformé en syndicat qui discutait les conventions en dehors des syndicats qu'il y a eu les problèmes que l'on connaît. Qu'on soit complémentaires dans l'action, d'accord, qu'on travaille ensemble pour défendre l'honneur et l'indépendance de la médecine, d'accord, mais il y a des domaines qui appartiennent à l'Ordre et le code de déontologie, c'est de la responsabilité de l'Ordre.
A la tête de l'Ordre, y aura-t-il un grand chantier qui portera votre empreinte ?
Pour l'instant, j'arrive, et il y a un rodage nécessaire. Mais mon grand chantier, comme vous dites, j'aimerais que ce soit la commission jeunes. Non que je veuille faire du jeunisme, mais je veux qu'il y ait une participation des plus jeunes aux travaux de l'Ordre. Et qu'on ne dise plus, comme on l'a fait pendant très longtemps, que la mission de l'Ordre s'arrête aux portes de l'hôpital. C'est une erreur, et je mesure mes termes. Je crois que les hospitalo-universitaires souffrent actuellement autant que les libéraux.
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