B IOLOGISTES, chirurgiens-dentistes, infirmiers, kinésithérapeutes, orthophonistes, sages-femmes, médecins... : plusieurs milliers de professionnels libéraux (5 500 selon la police, plus de 10 000 selon les organisateurs), s'étaient donné rendez-vous à Paris mardi pour rappeler leur hostilité à la politique de santé du gouvernement.
Sous un soleil radieux, tous ont exprimé indignation, en détournant des chansons populaires ou en arborant des slogans hostiles aux ministres en place.
« Orthophonistes en colère, on veut plus être bouc émissaire », pouvait-on lire ainsi dans le dos de plusieurs manifestantes.
Le Collectif des pédiatres libéraux ne passait pas inaperçu : la centaine de manifestants qu'il avait rassemblée avançait dans une nuée de ballons jaunes et bleus, en arborant quelques baigneurs en plastique tantôt accrochés sur le ventre des manifestantes, tantôt calés dans une poussette, tandis que des pancartes proclamaient « Touche pas à mon pédiatre ».
« La maîtrise comptable est une bombe à retardement, confie un pharmacien du Val-de-Marne. Les politiques ne veulent pas l'avouer, mais il va bien falloir qu'ils y renoncent. La maîtrise à coups de génériques, c'est de la gnognote. » Sac au dos, casquette rouge arborant le sigle du CNPS et polo assorti, Hubert Le Toullec, dentiste venu de Bretagne, ne fait pas non plus mystère de sa colère : « Depuis cinq ans, non seulement nos actes ne sont pas revalorisés, mais nos conventions ne sont pas respectées. De notre côté, nous sommes prêts à reconnaître qu'il y a un dérapage sur le prix des prothèses. Mais il ne faut pas que nos droits soient bafoués ! »
Arrivé par le train avec une centaine d'autres manifestants du sud de la Bretagne, le Dr Pascal Mouton, gastro-entérologue de Vannes, n'a pas de mots assez durs contre la maîtrise comptable, qu'il considère comme une aberration. « Je trouve normal que les pouvoirs publics s'intéressent à ce que je fais, explique-t-il, mais je ne veux pas qu'on me dise : "Vous faites ce que vous voulez de l'argent public, tout ce qu'on vous demande, c'est de ne pas dépenser plus que tant". »
Quelque 15 ambulances, qui s'étaient donné rendez-vous au pont d'Austerlitz, ont fait entendre leurs sirènes à la fin du cortège pour attirer l'attention sur la situation des cliniques. Un directeur de clinique est venu comme tant d'autres par ce mode de locomotion.
Les revendications de l'hospitalisation privée portent sur deux points : d'une part, permettre au personnel d'avoir une rémunération correspondant à ses missions et identique à celle des personnels des autres hôpitaux ; d'autre part, permettre aux cliniques d'investir dans les équipements techniques pour suivre les progrès de la médecine.
Une alternative
A l'occasion de cette troisième manifestation nationale organisée par le Centre national des professions de santé (CNPS), Jacques Reignault, son président, a dénoncé la politique actuelle du gouvernement : « Il fixe un objectif des dépenses fixé sur des critères strictement budgétaires, donc inefficaces, a-t-il estimé. Et quand ces objectifs ne sont pas tenus, les professionnels de santé sont les seuls à être sanctionnés. »
Jacques Reignault a rappelé que le CNPS avait fait des propositions pour fournir une alternative à la maîtrise budgétaire, basées sur une « refondation partenariale » et qu'il attend la réponse du gouvernement.
Le Dr Claude Maffioli, président de la Confédération syndicale des médecins français (CSMF) a décrié une « politique uniquement budgétaire, qui se fiche des besoins », et exprimé la crainte que la France ne finisse par se trouver dans la situation de la Grande-Bretagne, dont le système de soins est à bout de souffle. Optimiste quant aux effets de la manifestation, il a souligné qu'il s'agissait d' « une action supplémentaire qui s'inscrit dans une stratégie d'ensemble ». « La meilleure pédagogie étant la répétition, nous continuons notre combat », a-t-il ajouté.
Les urgentistes aussi...
Une centaine de salariés des services d'urgence ont manifesté à Paris pour de « meilleures conditions de travail » à l'appel d'un « collectif des urgences ».
Soutenus par les organisations syndicales Sud et CGT, les manifestants ont réclamé « plus de personnel », des « lits d'aval » car « certains patients attendent plus de dix heures sur des brancards avant d'être soignés », selon Nathalie Bouillon, aide-soignante à la Pitié-Salpétrière.
Les urgentistes ont également demandé l'application de la NBI (nouvelle bonification indiciaire), prime attribuée aux personnes ayant affaire à des populations à risque.
« Alors que nous sommes en contact 24 heures sur 24 avec cette population, la NBI ne nous est pas attribuée et elle l'est à des personnes qui sont beaucoup moins exposées que nous », a expliqué Alain Moreau, infirmier urgentiste à Ambroise-Paré.
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