«JE FERAI DE MON MEDECIN une vedette», avait lancé sur le mode provocateur le candidat Nicolas Sarkozy, invité du « Grand Journal », sur Canal+ (le 2 mars). Sur ce point précis, le nouveau chef de l'Etat n'a pas (encore) tenu parole. Tout au contraire : le Dr Jean-Elie Henry-Mamou, qui signe le communiqué de santé rendu public par l'Elysée, assure au « Quotidien » qu'il ne veut, en aucun cas, se prêter au vedettariat. «Depuis que mon nom a été cité, je ne cesse de recevoir des appels de journalistes auxquels je m'abstiens de répondre», poursuit-il, faisant une exception pour informer le corps médical. Médecin généraliste consultant depuis 1973 à l'hôpital du Perpétuel-Secours, à Levallois-Perret, chargé d'enseignement clinique à la faculté de Paris-VII, médecin-conseil national du groupe AXA, ce quinquagénaire dynamique exerce encore comme endocrinologue libéral, installé dans un cabinet du 16e arrondissement de Paris. «Mais pour Nicolas Sarkozy, précise-t-il, depuis Munich, où il participe à un congrès, j'interviens en tant que généraliste.
Le président est un patient comme les autres et il n'a pas modifié son comportement depuis qu'il est à l'Elysée», ajoute-t-il, se bornant à préciser qu'il est son médecin traitant «depuis quelques années» et qu'il le demeure, les deux médecins militaires attachés statutairement à l'Elysée n'exerçant donc pas cette fonction.
Nicolas Sarkozy a consulté à l'hôpital du Perpétuel-Secours.
S'astreignant à respecter la règle de discrétion qui lui est impartie, le Dr Henry-Mamou ne dira pas s'il est aussi le médecin de la famille Sarkozy. Tout au plus nous informe-t-il que c'est au Perpétuel-Secours qu'il a fait procéder à une partie du bilan de son patient, quelque temps avant l'élection. De fait, le personnel de cet hôpital privé reconnu d'utilité publique se souvient de la venue du ministre de l'Intérieur dans ses murs au tout début de l'année, une visite qui n'était pas passée inaperçue.
C'est à partir de ce bilan que le communiqué a été rédigé : «A la demande de monsieur leprésident de la République Nicolas Sarkozy, je délivre le certificat suivant: je, soussigné, docteur Jean-Elie Henry-Mamou, certifie que l'état du président Nicolas Sarkozy est bon et intégralement compatible avec l'exercice de ses fonctions présidentielles.» Le document est daté du 11 mai, soit cinq jours avant la passation officielle des pouvoirs et deux après le retour des vacances à Malte, à bord du yacht de Vincent Bolloré. Pour sibyllin qu'il soit, ce document n'en constitue pas moins une rupture avec l'ère Chirac. Il avait en effet fallu deux événements, la pose, controversée, d'une prothèse auditive photographiée dans les médias et, surtout, l'hospitalisation du président le 2 septembre 2005, à la suite d'un « petit accident vasculaire cérébral », pour que l'Elysée communique sur la santé présidentielle. Jacques Chirac n'avait pas voulu s'exposer à la réédition des publications incomplètes, voire mensongères, qui avaient émaillé, tous les six mois, les deux septennats de François Mitterrand. Sur ordre, le médecin signataire avait passé sous silence le cancer de la prostate dépisté sitôt après l'élection de 1981.
Quant à Nicolas Sarkozy, comme tous les candidats à l'élection présidentielle, il s'était engagé à faire publier régulièrement son bulletin de santé : «La question controversée de l'état de santé du président a pu se poser par le passé, avait-il déclaré en avril dernier, je pense en particulier aux présidents Pompidou et Mitterrand. Mais, à ma connaissance, elle ne me semble pas aujourd'hui d'une actualité brûlante. Ce qui doit préoccuper les Français au travers de cette question, c'est de savoir si l'état de santé du président l'empêche ou non d'assumer ses responsabilités. Le chef de l'Etat n'est pas un citoyen comme les autres. Il est normal que les Français soient (…) assurés de sa capacité à exercer les devoirs du mandat qu'ils lui ont confié.»
Se démarquant cependant d'une information à l'américaine, M. Sarkozy avait estimé qu' «il n'est pas nécessaire de rendre public l'ensemble du dossier médical dans ses moindres détails», et il avait promis : «Si je suis élu, je m'engage à publier un bulletin de santé dès mon entrée en fonction, au moins deux fois par an ensuite et plus si l'évolution de mon état de santé devait le justifier.» Dont acte.
«J'ai évidemment à l'esprit le cas du DrGubler (le médecin de François Mitterrand, signataire des bulletins de santé, ndlr), confie le Dr Henry-Mamou. Mais, pour ma part, je suis déterminé à ne rien cacher et à rédiger les certificats avec toute la transparence compatible avec les règles déontologiques fixées par le Conseil de l'Ordre des médecins.»
Pourquoi a-t-il été choisi comme médecin traitant du président ? «Posez-lui donc la question!», rétorque le praticien, décidément résolu à rester le plus discret possible. Tout au plus lâchera-t-il que, sur un plan personnel, il est marié et père de deux enfants. «Et surtout, si vous voulez parler de moi, lance-t-il, ne manquez pas d'évoquer le nom de mon père, Henry Mamou, un médecin éminent. Chef de service à La Pitié pendant plusieurs décennies, c'est à lui que l'on doit la première description, en 1952, de la maladie périodique. Et c'est en souvenir de lui que j'ai fait accoler à mon patronyme son prénom», précise le médecin traitant présidentiel, plus soucieux de rendre hommage à cette mémoire paternelle que de s'exposer lui-même sous les feux de la rampe. Prochain bulletin prévu : novembre 2007.
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