LE QUOTIDIEN - Que pensez-vous de la démarche du G7 ?
Dr CLAUDE PIGEMENT - La démarche est intéressante. Actuellement, tout travail de réflexion sur l'avenir du système de santé est une bonne chose. Les membres du G7, qui regroupent - et c'est important - des syndicats médicaux et pluricatégoriels, sont les premiers à s'exprimer. Je pense qu'ils contribuent au débat, qu'ils lancent des pistes, tout comme le feront par la suite le G12 ou le comité des sages (1) . Sur le fond, j'ai noté des idées à retenir, j'en ai relevé d'autres où la réflexion est un peu courte.
A quelles propositions en particulier attribuez-vous une « bonne note » ?
Tout ce qui touche à l'évaluation, à la formation médicale continue (FMC) , à la démographie, à la régionalisation, à l'informatisation, à la suppression à terme du secteur II, au dossier de suivi médical va dans le bon sens. Que l'évaluation des pratiques professionnelles et l'obligation de FMC soient consacrées par le projet du G7 témoignent d'une prise de conscience de ses signataires. Que ceux-ci proposent de réguler l'installation des médecins et de trouver des incitations à l'exercice en zones prioritaires montre qu'ils ont compris que jouer sur la démographie pouvait être un moyen important pour améliorer la qualité. Ils font de la région le niveau pertinent d'évaluation des besoins : cela recoupe tout à fait ce que nous pensons au Parti socialiste. En matière d'informatisation, ils acceptent et intègrent de fait le tiers payant dans le cadre de la monétique, ce qui n'a pas toujours été évident pour les syndicats médicaux ».
Scénario à l'eau de rose
Sur quels sujets pensez-vous que le G7 est « un peu court » ?
La maîtrise des dépenses et le débat sur la revalorisation du secteur I. Car sur ces deux points, le G7 se risque à faire des paris hasardeux. La maîtrise des dépenses ? Il la veut médicalisée, ce sur quoi tout le monde est d'accord aujourd'hui, les sanctions ou les lettres clés flottantes ayant montré leurs limites. Mais cela étant posé, il n'y a rien de très précis. Le G7, très optimiste, nous dit que la maîtrise va reposer sur l'amélioration de la qualité, laquelle entraînera moins de dérapages, moins de gaspillages. Rien n'est moins sûr. En termes d'outils de maîtrise, mon sentiment est donc qu'il faut travailler encore. Quant à ce que j'appelle le « nouveau secteur I », le cercle vertueux sur lequel table le G7 ne repose sur rien. Qui nous dit qu'une rémunération des actes revue à la hausse entraînera une baisse des volumes ? Or, si ce n'est pas le cas, si les volumes stagnent, l'assurance-maladie, au niveau des soins de ville, n'y résistera pas. En ce sens, les suggestions du G7 me paraissent relever du scénario à l'eau de rose : revaloriser le secteur I serait une bonne chose. Encore faudrait-il trouver les moyens pour que cela ne se fasse pas à guichet ouvert.
Y a-t-il une chance pour que le gouvernement se saisisse de tout ou partie de ce projet ?
A titre de délégué santé du PS, je pense que les points que je juge intéressants (et qui sont d'ailleurs pour certains dans les tuyaux de la loi de modernisation du système de santé) peuvent servir de tronc commun à une réflexion globale dépassant les conflits de chapelle. Syndicats et politiques, tout le monde peut se retrouver autour de ces propositions-là.
Un système tout ficelé, fonctionnant avec l'assentiment de tous les médecins, ne vaut-il pas mieux que pas de système du tout ?
Je ne lis pas les propositions du G7 comme un système livré clé en main. Je les vois comme faisant partie d'un texte qui ouvre les débats. Et je dirai la même chose quand le G12 et les sages rendront leurs conclusions. C'est dans le cadre de la discussion et sur la base des propositions de tous, par le biais d'un socle réunissant les professionnels de santé, sinon d'un consensus, que l'on peut arriver à améliorer le système.
La gauche plurielle reverra-t-elle l'organisation de la médecine de ville avant les échéances électorales de 2002 ?
Je souhaite deux choses. D'abord, que la loi de modernisation du système de santé, qui contient tout de même des dispositions importantes, soit présentée rapidement en conseil des ministres et qu'elle passe au Parlement en première lecture avant la fin de l'année. Ensuite, que certaines des mesures qui bouillonnent en ce moment puissent se retrouver dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) de 2002. Il ne s'agit peut-être pas de tout chambouler, mais à tout le moins de permettre des avancées.
(1) Le « G12 » doit rendre cette semaine ses premières conclusions. Il rassemble une douzaine d'organisations du monde de la santé, notamment MG-France, l'UCCSF, ainsi que la CFDT, qui préside la CNAM, et la Mutualité française. Le « comité des sages », désigné à l'issue du « Grenelle de la santé » d'Elisabeth Guigou, planche sur la rénovation des soins de ville et rend compte de ses travaux à la ministre.
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