-----------:LE QUOTIDIEN
Le Conseil national de l'Ordre des médecins est favorable à la création d'exceptions au principe d'accès direct des malades à leur dossier médical : pour les dossiers psychiatriques et les dossiers susceptibles de révéler au patient un diagnostic grave. Avez-vous les mêmes réserves à ce sujet ?
------------:Dr ANTOINE BESSE
Il ne s'agit pas tellement de réserves de notre part car nous approuvons l'esprit de la loi. Nous sommes, parmi les médecins spécialistes, ceux qui s'entendent le mieux avec leurs patients. Peut-être d'ailleurs parce que la psychiatrie est l'une des spécialités où les contacts avec le patient sont nombreux - souvent plusieurs fois par semaine.
Le projet de loi prévoit que l'on communique au malade l'ensemble des informations concernant sa santé, y compris les correspondances entre professionnels de santé. Mais cela fait bien longtemps qu'on fait lire à nos patients, avant de les cacheter devant eux, les lettres que l'on adresse aux confrères.
Malgré tout, en psychiatrie, les malades sont plus fragiles que d'autres. Ils peuvent notamment connaître un état de dépendance par rapport à leur entourage. Il ne faudrait pas que des tiers indélicats fassent pression sur le patient pour avoir accès à son dossier. En psychiatrie privée, nous fonctionnons surtout avec des psychothérapies. Or, les confidences que nous recueillons ne sont pas communicables à des tiers. On ne veut pas jouer les hypocrites en tenant des dossiers vides. Les patients n'aiment pas ça. Lorsqu'ils sont amenés à changer de région par exemple, on doit pouvoir être en mesure de communiquer leur dossier à un autre praticien.
-----QM:Que proposez-vous, alors ?
-----A.B:Nous sommes favorables à une déclinaison prudente de notre spécialité au niveau du décret d'application de la loi. Le dossier médical psychiatrique pourrait comprendre trois volets. Le premier volet, objectif, contiendrait le diagnostic et le traitement actuel, donc non définitif. Ce serait le seul volet communicable au patient. Le deuxième volet, incluant des informations plus confidentielles, serait communicable à d'autres confrères. Enfin, le troisième volet, subjectif, regrouperait les notes personnelles propres au praticien. Ces notes sont liées au contre-transfert, elles s'adressent à nous-même en fait.
Nous travaillons sur cette question, dans un esprit de concertation, avec les autres parties, c'est-à-dire les syndicats de psychiatres du secteur public et les représentants des patients.
Il s'agit d'obtenir un compromis juste, équitable et sans danger. Dans l'intérêt des malades et de notre travail, nous les psychiatres ne devons pas nous faire piéger par une loi trop générale dont on ne conteste pas l'utilité.
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